Correspondance de Napoléon – Avril 1813
Mayence, 20 avril 1813, onze heures du matin.
À Frédéric-Auguste, roi de Saxe, à Ratisbonne.
Le baron de Lauriston arrive en ce moment à Mayence sans réponse de Votre Majesté, de sorte que je ne sais pas si les 1,800 hommes de cavalerie qui me seraient si précieux sont en marche, et je n’ai pas leur itinéraire. Je suppose que Votre Majesté les aura mis en mouvement et que je ne tarderai pas à recevoir sa réponse.
Je vais entrer en campagne; le prince de la Moskova est déjà entré à Erfurt et à Weimar, et le manque de cette cavalerie me fait beaucoup de tort.
Je prie Votre Majesté, si elle persiste dans le parti politique qu’elle a pris, de m’envoyer sur-le-champ toute la cavalerie dont elle peut disposer : c’est le seul secours que je puisse attendre d’elle, et c’est ce qu’elle peut faire de plus avantageux pour délivrer ses États.
Mayence, 20 avril 1813.
Au général comte Bertrand, commandant le 4e corps de la Grande Armée, à Bamberg.
Monsieur le général Bertrand, un général prussien, nommé Heister, est arrivé à Ratisbonne, sous le prétexte d’une mission près le roi de Saxe, et probablement pour nous espionner. Écrivez aux Bavarois de tâcher de l’arrêter.
Mayence, 20 avril 1813.
À Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel
Mon Frère, les dernières nouvelles que j’ai d’Eisenach sont du 18. On n’y avait connaissance de la marche d’aucun corps sur vous e et au contraire on m’annonçait que le général Hammerstein se trouvait à Heiligenstadt. Le prince de la Moskova est arrivé le 17 à Erfurt et se proposait d’occuper Weimar le 18. Moi-même je me mettrai incessamment en marche. Le vice-roi m’écrit, en date du 17, qu’il fait poursuivre les partisans qui avaient passé l’Elbe. La division wurtembergeoise arrive aujourd’hui à Würzburg. Le général Bertrand, avec 60,000 hommes, arrive à Cobourg. 20,000 hommes de ma Garde doivent être partis de Fulde; ils suivent la marche du duc de Raguse. La tête de 20,000 autres arrive dans ce moment à Mayence, et ils seront arrivés dans cinq jours. D’un moment à l’autre, je me porterai de ma personne à Eisenach. On dit que vos troupes désertent beaucoup; faites-moi connaître le vrai de cela et jusqu’à quel point c’est fondé. Faites connaître au général Vandamme que toute l’armée est en mouvement, et que moi-même j’arrive à Weimar.
Mayence, 20 avril 1813, cinq heures après midi.
À Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel
Mon Frère, je reçois votre lettre du 19, à midi. Le général Teste n’a que deux bataillons; je vois avec plaisir qu’il les ait fait avancer. Je lui donne l’ordre de se porter à Cassel de sa personne. C’est un bon officier; vous pourrez lui compléter une division avec vos troupes, jusqu’à ce que le reste de ses troupes arrive, ce qui ne sera qu’en mai. Je viens de recevoir des lettres d’Eisenach du 18 au soir. La division Bonet était déjà à Gotha ; la division Compans était à Eisenach. L’opinion de ces officiers généraux était qu’il ne se trouvait que des partisans sur leur gauche. Je crains que le général Hammerstein ne voie des fantômes et ne s’en laisse imposer par ses espions. Toutefois j’espère qu’actuellement il aura établi ses communications avec les ducs de Raguse et d’Istrie, qui ont dû être le 19 à Eisenach. Je compte moi-même partir bientôt. Envoyez-moi donc vos dépêches importantes par duplicata sur Mayence, jusqu’à ce que vous appreniez mon départ.
Mayence, 20 avril 1813, an soir.
À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Mayence.
Monsieur le Duc de Bassano, je vous réitère que mes intentions sont de rappeler le baron Serra. Je n’ai aucun doute non-seulement qu’il n’exerce aucune influence sur la Saxe, mais encore que son langage donne lieu de prendre de fausses idées de nos ressources et de nos moyens.
Mayence, 20 avril 1813, au soir.
À Frédéric-Auguste, roi de Saxe, à Ratisbonne.
Monsieur mon Frère, la lettre de Votre Majesté m’a fait de la peine. Elle n’a plus d’amitié pour moi; j’en accuse les ennemis de notre cause qui peuvent être dans son cabinet. J’ai besoin de toute sa cavalerie et de tous ses officiers. J’ai dit ce que je pensais, avec cette franchise que Votre Majesté me connaît, à son aide de camp; je m’en rapporte à lui; mais, quel que soit l’événement, que Votre Majesté compte sur l’estime qu’elle m’a inspirée et qui est à l’abri de tout.
Mayence, 20 avril 1813, au soir.
Au comte Germain, ministre plénipotentiaire près le grand-duc de Würzburg.
Je reçois la lettre que vous écriviez le 19 au duc de Bassano. Les conjectures que l’on fait sur la fidélité du roi de Saxe sont absurdes; on ne connaît ni les sentiments ni la probité de ce prince. Vous devez démentir ces bruits de toutes vos forces. Vous aurez vu le général Flahault, qui vous aura fait connaître mes intentions. Envoyez des agents par la Bohême et par la Saxe, et tenez-moi instruit de tous les mouvements.
Mayence, 20 avril 1813, au soir.
Au baron Saint-Aignan, ministre plénipotentiaire près les maisons de Saxe, à Weimar.
Je reçois la lettre que vous écriviez le 19 au duc de Bassano. Rendez-vous sans délai à Gotha et, aussitôt que vous le pourrez, à Weimar. Ne vous engagez pas sur la conduite que je veux tenir avec ces gouvernements. Je suis surpris qu’ils aient laissé prendre leur contingent, et qu’ils soient restés dans leurs pays pendant qu’ils étaient occupés par les Russes. Tenez-vous donc sur la réserve. Envoyez des espions de tous côtés, et tâchez de savoir où est l’ennemi.
Mayence, 20 avril 1813, dix heures du soir.
Au maréchal Ney, prince de la Moskova, commandant le 3e corps de la Grande Armée, à Erfurt.
Je reçois votre lettre du 18. L’officier d’ordonnance de Laplace, qui vous a quitté le 19, à dix heures du matin, me rend compte de votre situation à Erfurt. Je suis surpris que vous n’ayez aucune nouvelle de l’ennemi et que vous ne sachiez pas s’il a beaucoup d’infanterie du côté de Leipzig. Je suppose qu’on aura eu des renseignements à la cour de Weimar.
Je ne saurais trop vous recommander de faire travailler à la construction des fours. Il nous faut deux manutentions, c’est-à-dire vingt-quatre fours. Faites faire du pain biscuité dans tous les environs et faites-en venir à Erfurt.
N’occupez pas Gotha, qu’il faut laisser aux autres corps. Recommandez au général Souham de ne pas laisser sa cavalerie sans infanterie, et l’infanterie qu’il aurait avec cette cavalerie, il faut qu’elle se retranche et se poste avec la plus grande circonspection, pour ne pas avoir d’échauffourée de cavalerie. Choisissez un bon champ de bataille près d’Erfurt; faites-en lever le plan et envoyez-le-moi, ainsi que le projet des redoutes qu’il y aurait à y faire.
Mayence, 21 avril 1813.
Au prince Cambacérès, archichancelier de l’empire, à Paris
Mon Cousin, il est nécessaire que la Régente ne signe rien de ce qui est relatif aux gardes d’honneur, à moins d’urgence. Vous me ferez envoyer directement tout le travail ; sans quoi le ministre de la guerre me tirera de l’armée des hommes qui m’y sont nécessaires, pour les placer là.
Mayence, 21 avril 1813.
À M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Paris
Monsieur le Duc de Bassano, je suis très-mécontent qu’un de vos courriers soit passé par Mayence sans se rendre chez le grand écuyer, et qu’à Kaiserslautern il ait continué sa route, nonobstant l’ordre que M. de Rumigny lut a donné de retourner.
- S. J’attends avec impatience l’envoi que vous me ferez de ce dont était porteur le courrier de Vienne qui a passé ici le 19. J’ai des raisons de croire qu’il portait des choses importantes.
Mayence, 21 avril 1813.
Au général comte Lemarois, commandant la 25e division militaire, à Wesel.
Monsieur le Comte Lemarois, je reçois votre lettre du 16. Le commissaire de police d’Aubignosc donne des nouvelles fausses et ridicules. Faites-lui comprendre qu’il faut donner des nouvelles sûres; que la guerre n’est pas la police, et que tout ce qu’il dit sur la marche de Blücher est absurde.
Le corps du prince de la Moskova, fort de 60,000 hommes, est en avant d’Erfurt ; son avant-garde, commandée par le général Souham, est à Weimar. 300 hussards prussiens ont été culbutés par le 10e de hussards : on leur a pris 60 hommes et 4 officiers, dont l’aide de camp de Blücher. L’ennemi n’a pas d’infanterie sur la rive gauche de la Saale. Le duc de Raguse est à Gotha avec le 6e corps. Le duc d’Istrie est avec la Garde à Eisenach. Le général Bertrand, avec le 4e corps, est à Cobourg. Le vice-roi est dans la même position : sa gauche appuyée sur l’Elbe, à l’embouchure de la Saale, son centre à Bernburg et sa droite au Harz. Mandez cela au général Vandamme et, en Hollande, à l’architrésorier, dont l’habitude est d’avoir grand’peur.
Mayence, 21 avril 1813.
À Frédéric, roi de Wurtemberg, à Stuttgart
Monsieur mon Frère, je reçois la lettre de Votre Majesté. Puisqu’elle ne peut pas m’envoyer plus que son contingent, je m’en repose donc sur son zèle et sur son attachement à la cause commune pour le compléter le plus tôt possible; je désire que ce soit au commencement de mai, et qu’en attendant elle le réunisse à Mergentheim.
J’ai remarqué une phrase dans la lettre de Votre Majesté, qui a fixé mon attention; c’est celle-ci : « Une nouvelle officielle, venue de Ratisbonne, assure que la forteresse de Torgau a capitulé ». Or j’ai des nouvelles de Torgau du 19, mes troupes étant entrées hier à Weimar, et l’on ne savait rien de cela à Torgau. Il y a donc mystère là-dessous. La phrase de votre Majesté est trop précise ; on aurait donc fait la capitulation à Ratisbonne. Je prie Votre Majesté de me dire sans réserve tout ce qu’elle sait là-dessus.
Mayence, 23 avril 1813, au matin.
Au général comte Bertrand, commandant le 4e corps de la Grande Armée, à Cobourg.
Monsieur le Comte Bertrand, je reçois votre lettre du 21 avril, de Cobourg. Je n’y vois aucune nouvelle de l’ennemi, ni de tout ce que vous avez dû apprendre de Cobourg. Je ne sais pas ce que vous entendez par e exécution des réquisitions pour le 24 : e si c’est pour des chevaux, je vous ai fait dire que l’on ne devait transporter des voitures au-delà du Danube qu’attelées ; si vos réquisitions sont pour des subsistances, il n’y a pas de doute qu’il faut vivre, et il est impossible que les autorités bavaroises s’y refusent.
Je remarque que vous n’indiquez jamais dans la date de vos lettres l’heure à laquelle vous les écrivez.
Mayence, 23 avril 1813.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
Monsieur le Duc de Feltre, répondez au roi d’Espagne que je lui ai donné le commandement en chef de mon armée; que je suis surpris, après cela, des plaintes perpétuelles qu’il fait de n’être pas obéi; que cela vient de ce qu’il confond le roi d’Espagne et le commandant en chef de mon armée; que je n’entends pas que mes armées dépendent jamais des ministres espagnols, à qui j’ai droit de ne pas me fier, et qui sont fort indifférents sur le sort de mes soldats ; que les ordres qu’il donnera aux généraux et aux officiers de mes armées seront exécutés ponctuellement s’ils sont transmis par le maréchal Jourdan pour les opérations militaires, et par l’ordonnateur Mathieu Faviers pour les affaires administratives ; mais que le ministre O’Farrill, ni tout autre, ne doit être employé dans ces relations, et que mon intention n’est pas que mes troupes puissent dépendre, en aucune façon, de l’administration espagnole.
De plus, mandez-lui qu’il ne doit rien attendre de moi dans les circonstances actuelles où se trouve la France, si ce n’est la portion de solde qui est portée au budget; qu’il est donc indispensable, 1° qu’il retranche de ses règlements tout ce qui mettrait la subsistance de mes troupes à la disposition des agents espagnols; 2° qu’il fasse transmettre aux généraux ses ordres pour la sûreté et le mouvement des armées par le maréchal Jourdan, et ceux concernant l’administration par l’ordonnateur Mathieu Faviers.
Écrivez donc dans ce sens au maréchal Jourdan et à l’ordonnateur Faviers. Je ne puis nommer celui-ci intendant; mais il est ordonnateur en chef, et les autres sont ordonnateurs des corps d’armée. Le Roi est général en chef, et les autres généraux commandants des corps d’armée. Écrivez aussi dans ce sens à tous les commandants d’armée.
Rappelez au Roi les instructions que vous lui avez envoyées sur la nécessité d’approvisionner Burgos et Santoña et de former des magasins. Répondez-lui enfin que, pour commander une armée, il faut s’en occuper sans cesse, aller au-devant des nouvelles, pourvoir à tout, et que je vois avec peine que c’est le contraire qu’il a fait depuis quatre mois ; qu’il a laissé les troupes dans l’oisiveté, au lieu de les employer à rétablir l’ordre dans la Navarre et sur ses derrières, ce qui les rendrait aujourd’hui disponibles pour repousser les efforts des Anglais; mais que, dans les circonstances actuelles, son premier devoir est d’avoir tous les jours des nouvelles de Rayonne, en faisant marcher l’estafette à raison d’une lieue par heure, ce qui est facile avec une succession de postes bien établie ; qu’on aurait ainsi à Valladolid des nouvelles de Rayonne en quatre jours, et, l’estafette ne partirait-elle que tous les deux jours, on aurait encore des nouvelles tous les cinq à six jours ; que cela est de la plus grande nécessité.
Mayence, 23 avril 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mayence.
Mon Cousin, donnez ordre que le 6e bataillon du 134e bien habillé, bien armé et formant de 7 à 800 hommes, parte pour se rendre à Würzburg, où il restera en garnison dans la citadelle. Ce bataillon, joint aux bataillons des 127e, 128e, et 129e qui s’y trouvent, portera la garnison française de cette place à 1,500 hommes; ce qui, avec le bataillon du prince Primat et les troupes de Würzburg, fera un total de 3,000 hommes. J’ai donné l’ordre également que la compagnie d’artillerie fût complétée à 100 hommes. Je suppose qu’il y a un officier du génie et un d’artillerie dans cette place. Je vais faire compléter l’armement de la citadelle. Vous devez y avoir envoyé un colonel en second pour en prendre le commandement.
Donnez ordre au commandant de faire faire le service des escortes par les troupes du prince Primat et de Würzburg, et de garder intactes dans la citadelle les troupes françaises, surtout le 134e qui doit y achever de se former. Recommandez au commandant de faire fermer les portes de la ville la nuit, et de se tenir en mesure de défendre la citadelle, et même la ville, contre tout parti de troupes légères ennemies qui pourrait se présenter.
Je donne ordre au général Delaborde de se rendre à Würzburg pour y commander les quatorze bataillons de voltigeurs de la Garde qui reçoivent les conscrits des six années. Ces bataillons se rendront à Würzburg au fur et à mesure qu’ils seront réunis à Mayence.
Mayence, 23 avril 1813.
Au général Duroc, duc de Frioul, grand-maréchal du palais, à Mayence.
La division du général Delaborde, composée des quatorze bataillons de voltigeurs qui s’habillent et s’organisent à Mayence, se réunira à Würzburg. Vous donnerez ordre au général de brigade Decous de rejoindre les deux bataillons de la vieille Garde qui sont aujourd’hui à Francfort : il y joindra le bataillon de flanqueurs-chasseurs lorsqu’il sera arrivé; et les bataillons qui forment la 1e brigade du général Barrois, avec les batteries de réserve et une compagnie du train, continueront leur route pour se rendre à Eisenach, et vous me ferez connaître quand ils y arriveront. Une des deux brigades, ou du général Mouton, ou du général Boyeldieu, se réunira à Hanau, et l’autre à Francfort. La première arrivée des deux sera celle qui ira à Hanau. Le général Barrois portera son quartier général le 26 à Hanau, et se mettra en mouvement le 29 pour Eisenach, avec une batterie d’artillerie à cheval et trois batteries d’artillerie à pied, indépendamment des deux de réserve qu’aura amenées la brigade Decous. Faites partir le même jour, sous les ordres du général Barrois, 1,000 à 1,200 chevaux. Remettez un état en règle de tout ce mouvement au major général.
Je désire aussi que vous remettiez au major général un état complet de la Garde, telle qu’elle est aujourd’hui : 1° la division Roguet, qui n’a pas de numéro, mais qui est connue sous le nom de division de vieille Garde; 2° la 1e division, que commande le général Dumoustier ; 3° la 2e, que commande le général Barrois ; 4° la 3e, que commandera le général Delaborde; 5° la 4e qui se forme à Paris.
Aussitôt que je pourrai former ma vieille Garde, vous réunirez les six bataillons que j’ai dans ce moment et les deux qui sont à Paris. Donnez ordre que ces deux bataillons, aussitôt qu’ils seront habillés et rééquipés, nous rejoignent en poste. Ces huit bataillons formeront 3,200 hommes de vieille Garde; ils seront commandés par le général Roguet. Cette division, comme vieille Garde, me paraît suffisante; l’augmenter serait s’embarrasser inutilement. La division Dumoustier sera composée de quatorze bataillons ; la division Barrois sera également composée de quatorze bataillons, en lui donnant les deux qui sont à la division Roguet; enfin les deux autres divisions à former seront également de quatorze. Les cinq divisions formeront soixante-deux bataillons, ce qui fait la valeur de 30 à 36,000 hommes sous les armes et un effectif de 50,000 hommes.
Artillerie. J’ai réglé l’organisation de l’artillerie. Il est actuellement nécessaire que vous me fassiez un rapport qui me fasse connaître à quelle époque des batteries seront attachées à la 3e et à la 4e division. Comme de raison, ces deux divisions ne doivent avoir ni batterie à cheval ni batterie de réserve; elles ne doivent avoir que les batteries à pied, telles que je les ai désignées.
Équipages militaires. J’ai dix compagnies d’équipages militaires; ces dix compagnies sont pour le service de la vieille Garde et des deux divisions en avant. Je pense qu’il faudrait organiser deux nouvelles compagnies pour la division Delaborde et la 4e. Ces divisions auront chacune six caissons d’ambulance. C’est donc une 11e et une 12e compagnie qui peuvent être organisées à Francfort. Les hommes peuvent être pris dans les dépôts de Paris déjà appartenant à la Garde, les chevaux et les harnais à Francfort, et les voitures à Metz.
Je vous prie aussi de me régler tout ce qui est relatif aux musiques de ces corps. Je suppose que les régiments de la vieille Garde auront chacun leur musique, et que les autres auront une musique pour six bataillons. Ainsi il faudrait que le régiment des fusiliers-grenadiers et celui des flanqueurs-grenadiers eussent une musique ; que les régiments flanqueurs-chasseurs et fusiliers-chasseurs eussent une autre musique ; les trois premiers régiments des tirailleurs, une musique ; les 4e, 5e et 6e, une musique; les 7e, 8e, 9e, une musique; les 10e, 11e 12e, une musique; ce qui fait pour l’arme des chasseurs six musiques, et pour celle des grenadiers six musiques ; total, douze musiques pour toute la Garde à pied.
J’ai réglé tout ce qui est relatif aux sapeurs.
Je n’ai besoin de rien statuer pour tout ce qui doit être sur les chevaux de bas; seulement, recommandez au général Michel et au général Curial de faire les fonds et d’organiser ce service.
Mes douze compagnies d’équipages militaires peuvent facilement fournir les huit ambulances que la Garde doit avoir et qui n’emploient que 48 caissons. Il restera plus de 400 voitures, qui peuvent charger 6,000 quintaux de farine, c’est-à-dire plus de 600,000 rations, ou des vivres pour la Garde pour quinze à vingt jours.
Mayence, 24 avril 1813.
Au prince Cambacérès, archichancelier de l’empire, à Paris.
Mon Cousin, je pars ce soir à huit heures pour me rendre à Erfurt, où je serai dans la journée de demain 25. Il n’y a rien de nouveau. Il paraît que l’ennemi reploie les postes qu’il avait sur la droite de la Saale. Le vice-roi me mande de Bernburg, sur la basse Saale, que l’ennemi se dégarnissait beaucoup devant lui: on pense qu’il va repasser l’Elbe; mais ces conjectures sont hasardées. Je vous envoie copie d’une lettre du général Sébastiani au vice-roi, où vous verrez le détail d’une affaire peu importante, mais qui donne un aperçu de la situation des choses de ce côté. Ce général s’avance pour obliger l’ennemi de se retirer derrière le bas Elbe. Pendant ce temps, le général Vandamme organise son corps.
Pressez les ministres de la guerre et de l’administration de la guerre de faire partir des dépôts les détachements de cavalerie. Tout cela part bien lentement.
Mayence, 24 avril 1813.
Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris
J’ai lieu d’être content des intentions de l’Autriche. Je ne soupçonne pas ses dispositions; cependant mon intention est d’être en mesure et de ne pas dépendre d’elle. La partie vulnérable à l’égard de l’Autriche est mon royaume d’Italie : mon intention est le plus tôt possible d’y renvoyer le vice-roi.
Occupez-vous de tous les moyens de former une armée en Italie. Cette armée doit se composer du corps d’observation de Vérone, dont les six vieux régiments qui sont en Italie font partie. Complétez les cadres en officiers et sous-officiers, de façon qu’ils offrent vingt-quatre bataillons complets, avec majors, capitaines, etc. Quant aux canons, à raison de deux pièces de 6 par régiment, cela formera douze pièces de canon. Le 14e léger et le 6e léger formeraient chacun un bataillon, organisez-les. Les bataillons des trois demi-brigades provisoires qui se réunissent en Piémont porteraient ces bataillons à trente-cinq bataillons ; c’est déjà un commencement d’armée. Le royaume d’Italie doit pouvoir fournir vingt ou vingt-quatre bataillons pour une guerre d’Italie. Enfin écrivez à Naples pour que, outre son contingent, le roi de Naples ait un corps d’infanterie, artillerie et cavalerie, qu’il ne ferait marcher que si l’Autriche devenait suspecte ; sinon, il fournirait seulement son contingent. Écrivez donc directement au Roi sur cet objet.
Ainsi, indépendamment du corps d’observation de Vérone, que j’ai porté à soixante-quatre bataillons, il y aurait de plus dix bataillons italiens et dix bataillons napolitains. Enfin, dans des circonstances aussi extraordinaires, je ferai marcher les demi-brigades destinées à la garde de Toulon et celles destinées à la garde de la Bretagne. Je compte avoir là une armée de 80,000 hommes d’infanterie.
Faites-moi deux états : l’un du corps d’observation de Vérone, destiné à entrer en Allemagne; l’autre du corps plus spécialement chargé de la défense de l’Italie, qu’il faudrait compléter à cent bataillons.
Le corps de Vérone serait divisé en quatre divisions, l’autre corps en deux; en tout, six divisions actives.
J’ai ordonné d’acheter 1,000 chevaux en Suisse, et en Carinthie 1,500 chevaux pour l’artillerie de l’armée d’Italie. Ces 1,500 chevaux formeraient six compagnies du train; dirigez-les sur Turin et Vérone. Il faut aussi deux compagnies de pontonniers et trois compagnies d’artillerie à cheval. Quatre-vingt-dix-huit bouches à feu sont suffisantes ; ce qui, joint à trente pièces fournies par l’Italie, ferait cent vingt-huit bouches à feu. 1,000 chevaux napolitains, 2,000 chevaux italiens auraient besoin de 2 à 3,000 chevaux français pour porter la cavalerie à 5 ou 6,000 hommes, ce qui est suffisant pour ce pays. Je les fournirais si les intentions de l’Autriche devenaient suspectes.
J’ai ordonné d’acheter 1,500 chevaux à Francfort; cela sera suffisant pour le corps d’observation de Mayence. En cas de guerre avec l’Autriche, ce corps, avec les Bavarois et les Wurtembergeois, ferait un corps sur l’Elbe.
Veillez donc à ce que les bureaux présentent un projet, pour un cas extraordinaire de guerre avec l’Autriche, pour avoir cent bataillons et cent vingt-huit bouches à feu, y compris les Français, les Italiens et les Napolitains, et que le corps de Mayence soit renforcé pour garder les frontières et les places fortes.
Quant aux généraux, ordonnez que ceux d’Espagne viennent à Paris en poste. Je vais nommer quatre généraux pour aller en Italie. L’Italie surtout doit vous occuper.
Mayence, 24 avril 1813.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Mayence.
Mon Cousin, donnez ordre au duc de Reggio de partir en poste pour être arrivé demain matin à Bamberg. Il y prendra le commandement des 2e et 3e divisions du 4e corps, qui ont le numéro général de 13e et 14e division de la Grande Armée : la 13e, commandée par le général Pacthod, et la 14e par le général Lorencez; l’une de quinze bataillons, l’autre de quatorze. Il aura l’artillerie attachée à ces deux divisions et une des deux batteries de réserve du 4e corps. Son corps prendra le numéro de 12e corps de la Grande Armée. Vous lui ferez connaître l’itinéraire de l’une et de l’autre de ces divisions. Vous attacherez à son corps une des compagnies d’équipages militaires du 4e corps. Ce corps sera ensuite définitivement formé, quand nous aurons fait notre réunion avec les corps de l’Elbe. Je suppose que son corps arrivera dans la journée du 26. Vous instruirez le général Bertrand de ce changement. Le 4e corps ne sera plus composé que de deux divisions : la division Merand et la division italienne. Le général Ruty commandera l’artillerie du 12e corps. Vous lui donnerez ordre d’être rendu demain à Bamberg.
Vous ferez connaître au maréchal duc de Reggio que le général Bertrand a eu ordre de.se porter avec ses deux divisions sur Saalfeld, où son avant-garde est arrivée le 22, et où lui-même arrivera aujourd’hui 24 et demain 25 ; que le duc de Reggio doit faire occuper Cobourg, pour être sur-le-champ en communication avec le général Bertrand, y réunir le 12e corps, et pouvoir appuyer le général Bertrand dans sa position à Saalfeld.
Faites connaître au duc de Reggio la position de l’armée et celle du général Marchand ; que j’aurai demain mon quartier général à Erfurt; que les Bavarois occupent Bamberg et Bayreuth, qu’ils paraissent n’avoir d’autre ordre de leur souverain que de garder leurs frontières; qu’il doit du moins en tirer tous les renseignements qu’ils auraient sur la position de l’ennemi à la droite; qu’en cas de réunion sur Saalfeld du général Bertrand avec le général Marchand ou tout autre, le plus ancien aura le commandement ; qu’il laisse continuer au général Bertrand le détail de ce qui est relatif à l’organisation de son artillerie et des équipages militaires à Augsburg.
Mayence, 24 avril 1813.
À Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel
Mon Frère, je pars à sept heures du soir pour passer à Francfort après dix heures. Je continuerai ma route sans m’arrêter jusqu’à Erfurt. Je vous verrai avec plaisir aussitôt que votre présence ne sera plus nécessaire à Cassel. Je pense que dans ce moment il pourrait y avoir de l’inconvénient à ce que vous quittiez cette ville; mais aussitôt que l’ennemi sera rejeté sur la rive droite de la Saale, et que la rive gauche sera entièrement libre de partis ennemis, je vous verrai avec grand plaisir.
Mayence, 24 avril 1813.
À Frédéric, roi de Wurtemberg, à Stuttgart
Monsieur mon Frère, je reçois la lettre de Votre Majesté du 23 avril. Je la remercie des renseignements qu’elle me donne sur Torgau. Si la nouvelle est sûre, je suis surpris que le roi de Saxe ne me l’ait pas fait connaître ; mais il paraît qu’il y a beaucoup d’intrigues auprès de ce respectable souverain. Je renvoie ce courrier à Votre Majesté pour qu’elle puisse m’instruire des premières nouvelles qu’elle recevra, soit de l’ennemi, soit de la Saxe, soit de l’Autriche. Je prie Votre Majesté de me faire connaître ce qu’en dernière analyse elle pense des dispositions de l’Autriche. Le prince Schwarzenberg m’a apporté les assurances les plus positives, et l’empereur écrit dans le même sens à l’Impératrice. J’ai demandé au prince de Schwarzenberg si le corps du général Frimont, qui est du côté de Cracovie, est sous mes ordres ; sur sa réponse affirmative, je viens de prévenir le général autrichien de se tenir prêt à dénoncer l’armistice lorsque je lui en enverrai l’avis ; et, en effet, je lui en enverrai l’ordre aussitôt que j’aurai passé la Saale.
Dans les propositions qu’a faites l’Autriche, elle n’a éprouvé aucun obstacle de ma part; mais le prince Schwarzenberg, qui a retardé longtemps son départ pour attendre la réponse de l’empereur de Russie, m’a assuré qu’il n’en était pas venu. Une proposition avait été faite par l’Autriche de réunir un congrès à Prague, et j’y avais adhéré de tout mon cœur ; mais il paraît que la Russie n’a pas répondu.
Peut-être ne serait-il pas hors de propos que Votre Majesté et le roi de Bavière fissent quelques instances auprès de la cour de Saxe pour l’engager à persister dans le système de la Confédération. Je n’en ai encore fait rien dire à la Bavière, que l’on m’assure devoir être très-surprise du départ du roi de Saxe. J’attendrai de connaître quelle est l’opinion de Votre Majesté là-dessus.
Je pars ce soir pour être demain à Erfurt.
Les nouvelles du vice-roi, qui a toujours sa gauche à l’embouchure de la Saale et sa droite au Harz, sont que l’ennemi se dégarnit
devant lui. L’opinion de ce quartier général est que l’ennemi se rapproche de ses ponts de Dessau. Toute mon armée, hormis une division de la Garde, qui arrivera aujourd’hui à Francfort, et le 12e corps, que commande le duc de Reggio, dont le quartier général sera demain ou après à Bamberg, a passé les montagnes de la Thuringe. Votre Majesté ne doit ajouter foi à aucune des nouvelles que l’on fait courir en Allemagne ; et, tant que la guerre sera en deçà de l’Elbe, elle peut être certaine que je la préviendrai directement du moindre événement qui pourrait l’intéresser. Cela intéresse trop sa tranquillité pour que je ne le fasse pas avec plaisir.
Je me trouverais en position de finir très-promptement les affaires, si j’avais 15,000 hommes de plus de cavalerie ; mais je suis un peu faible dans cette arme. Le premier but de mes opérations est de jeter l’ennemi sur la droite de la Saale, après sur la droite de la Mulde et même sur la droite de l’Elbe. J’ai en mouvement plus de 30,000 hommes de cavalerie, qui me rejoindront dans le courant de mai. Il y aura à Mayence, à la fin de mai, soixante-quatre bataillons, formant quatre divisions sous le titre de Corps d’observation de Mayence; ce corps sera composé de conscrits des six années que je viens de lever et de conscrits de 1814, placés dans d’excellents cadres venant d’Espagne. Ils auront leur artillerie, leur cavalerie. J’aurai en outre deux divisions de ma Garde, de quatorze bataillons chacune, dont une à Würzburg, où elle sera commandée par le général Delaborde, et l’autre à Aschaffenburg. J’aurai à la même époque, réuni sur l’Adige, le corps d’observation de Vérone, fort de quatre-vingts bataillons : mon intention est de laisser ces troupes sur mes derrières, pendant juin et juillet. J’annonce ceci à Votre Majesté pour sa tranquillité.
Tous les calculs possibles me portent à penser que l’Autriche persistera dans son système ou sera neutre; mais, si elle se déclarait contre moi, je me crois, au mois de juillet, délai qui lui serait nécessaire à elle-même pour se préparer, en mesure de faire face à cet accroissement de forces contre moi.
Erfurt, 25 avril 1813.
Au général Duroc, duc de Frioul, grand-maréchal du palais, à Erfurt.
Donnez ordre au commissaire des guerres et au commandant de la place de faire faire du pain dans la nuit et dans la journée de demain, de manière qu’il y ait demain au soir 50,000 rations de pain à Erfurt. Si les habitants avaient le moyen d’en faire sans qu’on leur fournit des farines, l’intendant pourrait taxer le pain qu’ils fourniraient et qu’on payerait comptant. Ainsi, si les habitants pouvaient s’engager à fournir 200,000 rations de pain, à raison de 50,000 par jour, à compter de demain, on leur payerait ces 200,000 rations au prix qui serait déterminé selon les mercuriales, et le payement se ferait sur-le-champ.
Il n’y a ici que des approvisionnements de siège auxquels je ne veux pas toucher; il n’y a aucun approvisionnement de réserve : il est -de la plus haute importance d’en avoir un. Réunissez cette nuit l’intendant et deux ou trois des principaux membres de l’administration du pays, ainsi que le commissaire des guerres, et avisez aux mesures à prendre pour arriver à ce résultat. Le premier résultat est qu’il faut demain 50,000 rations de pain, et qu’il m’en faut dans l’espace de quatre jours 200,000. On dit qu’on peut faire ici 100,000 rations de pain par jour. Ce que les habitants fourniraient, je le ferais payer comptant, au prix qui sera réglé dans cette assemblée que vous tiendrez, et, comme je vous l’ai dit, selon les mercuriales. Il faudrait qu’en conséquence les habitants fournissent, en bon pain de munition, 50,000 rations demain, et ainsi de suite pendant trois jours. Il faut savoir si, moyennant le payement comptant que j’en ferai, ils pourraient continuer cette fourniture, puisqu’ils pourraient se réapprovisionner.
Mon intention est d’avoir 2 millions de rations de farine en réserve à Erfurt, autant d’eau-de-vie, autant de viande sur pied, et enfin d’avoir 2 millions de boisseaux d’avoine. Comment peut se faire la répartition de toutes ces quantités entre tous les pays voisins ? J’ai fait demander à Gotha 3,000 quintaux de farine et 7,000 de grains, seigle et froment, 100,000 boisseaux d’avoine, un million de rations de viande. S’il fallait de l’argent pour arriver promptement à ce résultat, et qu’on ne payât tout qu’à sa juste valeur, je ne verrais pas d’inconvénient à en fournir.
Enfin il est nécessaire d’avoir à Erfurt des hôpitaux pour 4,000 malades, d’établir sur-le-champ les locaux, et de pourvoir à tout ce qui est nécessaire. Je n’entends pas que ce soit aux frais de la ville, je payerai tout. Mais il y a un tas d’objets de détail qu’on ne peut pas porter; il faut les requérir et les faire faire dans le pays voisin.
Enfin, il faut que sur-le-champ l’administration fasse le recensement des moulins de la principauté; ils doivent fournir 1,000 quintaux de farine par jour, et il faut ordonner à chaque meunier de moudre et d’apporter chaque jour telle quantité de farine à Erfurt, qui sera payée comptant et au prix des mercuriales réglé par l’administration. Par ce moyen, on pourrait se procurer 1,000 quintaux de farine par jour. Il faudrait aussi répartir la viande entre les communes et les obliger à la fournir, sauf à la faire payer de suite.
Erfurt, 26 avril 1813, sept heures du matin.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Erfurt.
Mon Cousin, envoyez l’ordre au duc de Raguse de diriger la division Compans sur Weissensee, d’où elle poussera des postes sur Kœlleda, la 3e division sur Gotha, et la 1e en colonne dans les villages entre Erfurt et Gotha; le quartier général à Gotha; le parc général et les équipages militaires à Gotha. Telle doit être la position de ce corps ce soir. Le général Compans aura ordre de bivouaquer ce soir en carré, et jusqu’à ce qu’il y ait des nouvelles du vice-roi, qui doit venir par Querfurt, et du maréchal Ney, qui doit être sur la hauteur de Naumburg. S’il entendait du canon du côté de Naumburg, il s’en approcherait pour concourir à l’affaire. La lre division doit être placée de manière que la tête de la 1e brigade puisse arriver demain à Weimar, s’il le fallait.