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9 juin 1811 – Baptême du roi de Rome

Cet article est republié en hommage à Notre-Dame de Paris

Compte-rendu paru dans le Journal de l’Empire

Lundi 10 – Mardi 11 juin 1811

La cérémonie du baptême du Roi de Rome, et les fêtes dont elle a été accompagnée dans cette capitale, ont été célébrées avec la pompe digne de leur objet, elles ont eu pour spectateurs la population de Paris toute entière, augmentée d’une foule prodigieuse d’étrangers de toutes les classes.

A quatre heures, le Sénat est parti de son palais, le conseil d’État des Tuileries, le corps législatif de son palais ; la cour de cassation, la cour des comptes, le conseil de l’université, la cour impériale, du lieu ordinaire de leurs séances ; le corps municipal de Paris et les députations des quarante bonnes villes, de l’Hôtel de Ville. A leur arrivée dans l’église métropolitaine, ces corps ont été placés par les maîtres et aides des cérémonies,  suivant leur rang, à droite et à gauche du trône, depuis le cœur jusqu’au milieu de la nef. Le corps diplomatique s’est rendu à cinq heures à la tribune qui lui était destinée.

Madame de Montesquiou
Madame de Montesquiou

A cinq heures et demie, le canon a retenti pour annoncer le départ de LL. MM. II. du palais des Tuileries. Le cortège s’est rendu à Notre-Dame par le jardin des Tuileries, la place et la rue de la Concorde, le boulevard, la rue Saint-Denis, la place du Chatelet, le Pont-au-Change, la rue de la Barillerie, celles du Marché-Neuf et du Parvis-Notre-Dame. La superbe tenue des troupes, la richesse et l’élégance des voitures, la magnificence des costumes, offraient un spectacle ravissant dont il est difficile de se faire une juste idée, à moins de l’avoir vu : les voitures de la cour, qui dans les cérémonies précédentes étaient peintes en ver, avaient toutes la couleur d’or ; les princes et les princesses de la famille impériale étaient dans quatre voitures attelées de six chevaux ; venaient ensuite la voiture de l’Impératrice attelée de huit chevaux blancs, et dans laquelle était le Roi de Rome, Mad.  la gouvernante, les sous-gouvernantes et la nourrice ; la voiture de l’Empereur, attelée de huit chevaux isabelle, et dans laquelle étaient LL.MM.II. ; une voiture pour la dame d’honneur, la dame d’atours, le chevalier d’honneur et le premier écuyer de l’Impératrice ; les voitures des princes et des princesses, dans lesquelles étaient les dames et les officiers de service près LL.MM.II.

LL.MM. ont partout recueilli sur leur passage les plus éclatants témoignages de l’allégresse et de la reconnaissance publique : aux cris de Vive l’Empereur ! Vive l’Impératrice ! se sont parfois mêlés ceux de Vive le Roi de Rome ! Sur le boulevard et dans les principales rues que le cortège devait parcourir, beaucoup de maisons particulières étaient ornées de festons, de draperies, de tapisseries.

Le cardinal Joseph Fesch, Grand-Aumônier
Le cardinal Joseph Fesch, Grand-Aumônier

S. Em. le cardinal Fesch, grand-aumônier, accompagné de son clergé est venu au-devant de LL.MM. à la porte de l’église métropolitaine, avec un dais pour l’Empereur et un dais pour l’Impératrice. Le chapitre et le clergé de la cathédrale sont resté dans le sanctuaire. Les personnes désignées pour porte les honneurs de l’enfant et ceux des parrain et marraine, le bassin, l’aiguière, la serviette. Le grand-officier chargé de porter la queue du manteau du Roi de Rome est allé recevoir ce manteau près de la table où il était déposé. Le cortège est entré dans l’église dans l’ordre suivant :

Les huissiers, les hérauts d’armes, le chef des hérauts d’armes, les pages, les aides de cérémonie, les officiers d’ordonnance de service, les maitres des cérémonies, les préfets du palais de service, les officiers de service près le Roi de Rome ; les écuyers de l’Empereur, de service ordinaire et extraordinaire ; les chambellans de service ordinaire et extraordinaire, les écuyers de jour, les chambellans de jour, le premier écuyer, les grands-aigles de la Légion d’honneur, les Grands-Officiers de l’Empire, les ministres.

Le grand-chambellan, le grand-écuyer et le grand-maître des cérémonies ; six dames marchant sur deux de front, les unes portant, à droite, les honneurs des parrain et marraine, et les autres portant, à gauche, les honneurs de l’enfant.

Le parrain et la marraine ; le Roi de Rome porté par la gouvernante, et revêtu d’un manteau de tissu d’argent doublé d’hermine, ayant à droite et à gauche les deux sous-gouvernantes et sa nourrice, la queue du manteau de S.M. portée par un grand-officier. L’Impératrice sous son dais, la queue du manteau portée par son premier écuyer ; la dame d’honneur et la dame d’atours, à droite et à gauche du dais, ainsi que le chevalier d’honneur et le premier aumônier. Derrière le dais de S.M., les princesses, le manteau de chacune des princesses porté par un officier de sa maison ; les dames du palais ; les grands-dignitaires ; les princes ; l’Empereur sous son dais. A droite et à gauche du dais, les aides-de-camp de S.M. ; derrière le dais de S.M., le colonel-général de la Garde, de service, le grand-maréchal et le premier-aumônier, les dames d’honneur des princesses, les dames et officiers de service près LL.MM.II.

En arrivant à la croisée de l’église, toutes les personnes qui précédaient LL.MM., se sont rangées à droite et à gauche. LL.MM.II. sont allées à leurs prie-Dieu.

Les ministres et les grands-officiers de l’Empire, et les dames portant les honneurs, lorsque LL.MM. furent arrivées à leur prie-Dieu, ont occupé les places qui  leur étaient destinées ; les ministres à droite, et les grands-officiers à gauche.

A droite et à gauche de LL.LL., les princes et princesses placées selon leur ordre de famille, et de la manière suivante : à droite de l’Empereur, le Roi de Rome, porté par la gouvernante ; derrière la gouvernante, les deux sous-gouvernantes et la nourrice ; à la droite du Roi de Rome, le parrain (S.A.I. le grand-duc de Wurtzbourg) ; immédiatement après lui, la marraine (S.A.I. Madame, mère de l’Empereur) ; à la droite de la marraine, le prince Joseph Napoléon, roi d’Espagne ; le prince Jérôme Napoléon, roi de Westphalie ; le prince Borghèse, duc de Guastalla ; le prince Eugène, vice-roi d’Italie, grand-duc héréditaire de Francfort ; le duc de Parme, prince archichancelier de l’Empire ; les dames portant les honneurs des parrain et marraine.

Le baptême du roi de Rome (Innocent-Louis Goubaud)
Le baptême du roi de Rome (Innocent-Louis Goubaud)

A la gauche de l’Empereur, l’Impératrice ; la princesse Julie, reine d’Espagne ; la reine Hortense ; la princesse Pauline, duchesse de Guastalla ; le prince de Neuchâtel et de Wagram, vice-connétable ; le prince de Bénévent, vice-grand-électeur ;les dames portant les honneurs de l’enfant ; les ministres, en avant et à droite de l’Empereur ; et en arrière des princes les grands-officiers de l’Empire et le grand-aigle de la Légion, vis-à-vis des ministres et en arrière des princesses.

Derrière l’Empereur, le colonel-général de la garde, le grand-maréchal, le grand-écuyer, le premier aumônier de l’Empereur.

Derrière le fauteuil de l’Impératrice, la dame d’honneur, la dame d’atours, le chevalier d’honneur, le premier écuyer et le premier aumônier de S.M. Les dames du palais, derrières la dame d’honneur et la dame d’atours.

Les dames d’honneur des princesses et les officiers chargés de porter leurs manteaux, derrière LL.AA. ; les officiers de la maison de l’Empereur, derrière les grands-officiers de la couronne ; les officiers des princes et princesses derrière les dames du palais ; les officiers d’ordonnance, après officiers de la maison ; le grand-maître des cérémonies, à droite, un peu en avant du prie-Dieu de l’Empereur ; les maitres et aides de cérémonies ; les uns à droite du grand-maître, et un peu en avant ; les autres, à gauche, vis-à-vis d’eux.

Les hérauts d’armes, en dedans du chœur, près de la grille ; les uns du côté du sénat, les autres du côté du conseil d’État. Les pages et les huissiers, derrière les officiers de la maison, à droite et à gauche le long de la nef.

Pendant que LL.MM. faisaient leurs prières, le clergé s’est rendu dans le sanctuaire. S. Em. le grand-aumônier a entonné le Veni Creator, qui a été exécuté par l’orchestre.

Pendant le Veni Creator, les dames portant les honneurs se sont avancées vis-à-vis le trône de l’Empereur, ont fait une profonde révérence à LL.MM., et ont déposé les honneurs sur les crédences placées dans le sanctuaire pour les recevoir, les honneurs des parrain et marraine à droite, et ceux de l’enfant à gauche.

Ces dames étaient précédées par un maître et un aide des cérémonies.

A la fin du Veni Creator, un maître et aide des cérémonies a fait une révérence à l’autel et à LL. MM., et a précédé le grand-aumônier, qui s’est rendu à l’entrée du chœur auprès du Roi de Rome, et a fait la cérémonie des catéchumènes.

Après cette cérémonie, le grand-maître ayant prévenu LL. MM., le cardinal a conduit l’enfant par les langes dans le chœur, et toutes les personnes qui étaient à droite et à gauche de LL. MM. et du Roi de Rome, et derrière eux, ont marché en avant dans le même ordre où elles étaient placées, et sont entrées dans le chœur pour y occuper, autour du trône, les mêmes places qu’elles occupaient autour du prie-Dieu. LL. MM. ont pris leurs places sur le trône.

Tout le cortège étant ainsi placé, le cardinal grand-aumônier a fait la cérémonie du baptême, ainsi qu’elle est détaillée dans le rituel.

Après le baptême, S.M. l’Empereur a pris son auguste fils entre ses bras, et l’a élevé pour le montrer aux assistants. Aussitôt l’enthousiasme, qui jusqu’alors avait été contenu par la sainteté de la cérémonie et la majesté du lieu, a éclaté de toutes parts. Vive le Roi de Rome ! Toutes les voix ont fait entendre à l’envi et ont longtemps répété ce cri d’amour et de bénédiction. L’orchestre a ensuite le Vivat, pendant lequel le Roi de Rome, porté par Mad. la gouvernante et accompagné de son cortège, est sorti par la sacristie pour aller à l’Archevêché, d’où il est retourné aux Tuileries.

A la fin du Vivat, S. Em. M. le grand-aumônier s’est rendu au pied de l’autel, et a entonné le Te-Deum, qui a été exécuté par l’orchestre. Après le Te-Deum, on a chanté le Domine Salvum, et S. Em. a donné la bénédiction épiscopale. L’Empereur et l’Impératrice se sont mis à genoux sur leurs prie-Dieu. Pendant la prière de LL. MM., les personnes qui formaient le cortège, ont pris leur rang dans le chœur et dans la nef, les princesses marchant en avant du dais de l’Impératrice, afin de pouvoir prendre leurs voitures avant LL. MM.

S. Em. le cardinal Grand-aumônier, précédé de son clergé, s’est rendu auprès de l’Empereur et de l’Impératrice. LL. MM. sont rentrées sous leurs dais, ont été reconduites par S. Em. jusqu’à la porte de l’église. L’Empereur et l’Impératrice sont remontés dans leur voiture, et se sont rendu à l’Hôtel-de-Ville. Des salves d’artillerie ont annoncées le départ de LL. MM. de Notre-Dame.

Le cortège, pour aller à l’Hôtel-de-Ville, a passé par la rue du parvis Notre-Dame, celle du Marché-Neuf, de la Barillerie, le Pont-au-Change, le quai de Gèvres, le quai Pelletier et la place de Grève. Les acclamations de la joie publique ont retenti de nouveau sur tout le passage de LL. MM.

Médaille commémorative du baptême
Médaille commémorative du baptême

Il nous serait impossible de décrire en détail la richesse et l’élégance des illuminations ; on ne peut leur comparer que celles des fêtes du mariage : les Tuileries, la place de la Concorde, le Garde-Meuble, le palais du Corps Législatif, la grande avenue des Champs-Élysées, tout cet ensemble produisait un effet admirable.

LL. MM. sont rentrées à onze heures du soir au palais des Tuileries, d’où elles sont parties pour retourner à Saint-Cloud. Le Roi de Rome les avait précédées.

Le temps le plus serein et la plus douce température ont constamment favorisé cette belle journée.