[ed-logo id=’7324′]

Latest Posts

Gaspard Gourgaud (1783–1852)

Portrait du général Gourgaud
Portrait du général Gourgaud

Le général baron Gaspard Gourgaud naquit à Versailles le 14 septembre 1783. Son père était un des musiciens de la chapelle du roi Louis XVI ; son oncle, Henri Gourgaud, plus connu sous le nom de Dugazon, excellait au théâtre dans les rôles de valets, et sa tante, madame Vestris ou Paco-Vestris, née Gourgaud, ancienne élève de Lekain, jouait passablement la tragédie.

La révo­lution ouvre au jeune Gourgaud une autre car­rière que celle où semblaient l’appeler ses tradi­tions domestiques. Il entre à quinze ans à l’école polytechnique, d’où il passe ensuite, comme élève sous-lieutenant, à l’école d’artillerie de Chalons. A dix- sept ans, après seulement deux ans d’apprentissage, Gour­gaud est lieutenant d’artillerie et professeur adjoint de fortification à l’école de Metz.

Sans être un sujet hors ligne, c’est un sujet intelli­gent, souple, adroit, très-actif. En 1801, il quitte Metz pour entrer avec son grade dans le 6e régiment d’artillerie à che­val. Il fait avec ce régiment la campagne de Hanovre. Là il sut attirer l’attention du général d’artillerie Foucher, qui le prend pour aide de camp  (1803), et bientôt l’emmène avec lui au camp de Boulogne.

C’est en 1805, dans la guerre contre l’Autriche, que le jeune officier, il n’a encore que vingt-deux ans, commence à déployer son courage. Il sert dans le corps d’armée du maré­chal Lannes, qui commande l’avant-garde. Il se signala au pont de Tabor, près de Vienne, et même à Austerlitz, où il est blessé d’un éclat d’obus. Il n’obtient cependant aucune promotion.

On le retrouve en 1806, à l’ouverture de la campagne de Prusse, lieutenant d’artillerie. Il combat à Saalfeld, et gagne la croix d’hon­neur à la bataille d’Iéna. L’an d’après, à Fried­land (juin 1807), il est enfin nommé capitaine. C’est en cette qualité qu’il est sous les murs de Saragosse en 1808. Il y figure dans le 3e corps, et son nom est inscrit au bulletin d’une des plus chaudes journées de ce lamentable siège.

Il est rappelé à l’armée du Nord, et prend part, à son rang, aux affaires d’Abensberg, d’Eckmühl, de Ratisbonne, d’Ebelsberg, d’Essling, de Wagram. On l’at­tache pendant la paix à la manufacture d’armes de Versailles. Quelques perfectionnements à introduire dans la fabrication des lances et des fusils, le voisinage de Paris, l’envie de percer, l’amènent et le ramènent souvent dans les bureaux, dans le cabinet, dans les salons du ministre de la guerre. Ces vi­sites lui seront plus utiles que ses états de ser­vices.

Le ministre de la guerre l’envoie à Dant­zig, où les Français tiennent garnison. Il a pour mission d’étudier avec soin l’état de cette place et les ressources qu’elle peut offrir en cas de guerre avec la Russie. Il doit également, mais le plus secrètement possible, faire exécuter dans les arsenaux des ponts volants et des équipages de siège, de manière que tout soit prêt d’avance, au moment imprévu où l’on pourrait en avoir be­soin.

A son retour, il devient un des officiers d’or­donnance de l’empereur (1811). Il l’accompagne en Hollande, et est ensuite chargé d’aller inspec­ter les côtes et les places de l’Aunis et de la Saintonge. Après avoir visité Rochefort et la Rochelle, il parcourt les îles d’Aix, de Ré, d’Oléron, et reconnait par des sondages que la passe de Manusson, jusque-là réputée inabordable aux vais­seaux de guerre, a besoin d’être gardée.

Le 1er janvier 1812, Gourgaud reçoit le titre de chevalier de l’em­pire, titre auquel est joint un majorât de deux mille francs de rente. Parmi les officiers atta­chés à la personne de Napoléon, il est déjà un de ceux dont le service est le plus goûté. Aussi a-t-il l’honneur très-envié d’accompagner son maître au congrès de Dresde. Il le suit en­suite en Russie. Là, Gour­gaud est encore plus brave qu’à l’ordinaire. Tantôt l’empereur l’envoie en reconnaissance ; tantôt il lui ordonne d’aller redresser le feu de quelque batterie. Gourgaud se multiplie. Il est au passage du Niémen, aux com­bats d’Ostrowno et de Vitebsk; il est blessé à la prise de Smolensk. Il paie de sa personne à l’af­faire de Valentina et à la grande bataille de Borodino (7 septembre 1812). A Moscou, il devance l’armée et se rend au Kremlin, en par­lementaire, n’ayant pour escorte qu’un inter­prète.

A Moscou il a la chance, qui du reste se pré­senta plusieurs fois dans sa carrière, de préserver les jours de Napoléon : à la suite d’une exploration minutieuse du Kremlin, il découvre une masse énorme de poudre (400 milliers), que l’incendie était sur le point d’atteindre, et réussit à empêcher cette épouvantable explosion. En récompense de ce signalé service, il fut créé baron.

 

Il rend d’autres ser­vices pendant la retraite. On le voit, par exemple, se jeter à cheval dans les eaux de la Bérézina, et traverser le fleuve, non pour assurer son propre salut, mais pour aller reconnaître sur la rive opposée les endroits où l’on pouvait appuyer les ponts destinés au passage de l’armée.

De retour à Paris, Napoléon nomme Gourgaud son premier officier d’ordonnance, titre nouveau créé pour lui, tous les offi­ciers d’ordonnance ayant servi jusque-là sur un pied d’égalité.

Gourgaud suit l’empereur en Saxe. Il est à ses côtés à Lützen, à Bautzen, à Würschen (mai 1813). Après l’armistice conclu, le 4 juin, à Plesswitz, en Silésie, il est chargé d’inspecter le ma­tériel d’artillerie, tant celui des forteresses que celui des corps d’armée. A la reprise des hostilités, Napoléon, prêt à marcher sur Königsberg, reçoit de Gourgaud (le 24 août) des informations qui le décident inopinément à prendre une autre route. Il se porte sur Dresde. La bataille est livrée le 26, et recommence le lendemain. C’est une victoire, mais coûteuse, épuisant le vainqueur sans abattre l’ennemi. Gourgaud n’en reçut pas moins, pour l’avis qu’il avait donné, une dotation de six mille francs de rente, avec la croix d’officier de la Légion d’honneur.

Il assis­te, peu de temps après (19 octobre), à la bataille de Leipzig; et pendant que l’armée française effectue sa retraite, il reste au pont de Freyberg, avec ordre de le détruire à la fin du jour, afin d’arrêter l’ennemi sur l’autre rive. Mais l’ennemi ne se présentant pas, et des bles­sés, des traînards, arrivant à la file pendant toute la nuit, Gourgaud diffère d’heure en heure, jusqu’au lendemain, l’exécution de ses ordres, sauvant ainsi non-seulement quelques fuyards, mais le corps d’armée du maréchal Oudinot, ou du moins tout ce qui en reste.

Gourgaud sauvant Napoléon à Brienne.
Gourgaud sauvant Napoléon à Brienne.

Revenu à Paris, Gourgaud concourt de son mieux, dans sa sphère, aux préparatifs de la campagne de France. Au début de la campagne, Napoléon faillit périr de la main d’un Cosaque. Cela se passe à Brienne, dans la soirée du 29 mars : Gourgaud voit le danger, fait feu sur le Cosaque, et le tue. Napoléon lui marque sa reconnaissance par le don de l’épée qu’il portait à Lodi, à Montenotte, à Rivoli.

Le 10 février, Gourgaud est encore près de l’empereur, à Champaubert, et le lende­main à Montmirail, où il reçoit une blessure. Il remonte bientôt à cheval; et le 17, à Nangis, il est à son poste. Le 10 mars, on le retrouve à Laon, et son nom est mentionné au bulletin de la journée. Le 13, devant Reims, c’est lui qui, avec deux bataillons et une batterie d’artillerie, enfonce les portes de la ville, barricadées par les Russes. Cette affaire lui vaut le grade de colonel d’artillerie; mais il ne quitte point la personne de l’empereur. Il le suit à Arcis et à St-Dizier, et de St-Dizier revient en poste avec lui sur la capitale. A quatre lieues de Paris, ils apprennent la bataille de Paris, la capitulation, l’entrée des alliés, la conduite du Sénat, la formation d’un gouvernement provisoire. Napoléon, étourdi de ces nouvelles, se retire à Fontainebleau, puis, envoie Gourgaud aux informations. Gourgaud lui apprend, à son retour, la convention de Chevilly, entre Marmont et le prince de Schwartzenberg (3 avril 1814). Le même jour s’ouvrent à Fontainebleau les conférences relatives à l’abdication, qui est signée le 11 avril, et Napoléon partant le 20.

Gourgaud ne le suit pas à l’île d’Elbe ; il s’em­presse au contraire de venir à Paris et d’offrir ses services au gouvernement royal, qui le nomme chef d’état-major de la première division militaire, et chevalier de St-Louis.

Ne sut-il rien des projets de l’ile d’Elbe ? Fut-il aussi étonné qu’il feignit de l’être à la nouvelle du débarque­ment de Cannes ? Bien des gens en ont douté. Ce qui est certain, c’est qu’il ne tenait pas plus aux institutions de 1814 qu’il n’avait paru tenir à celles de l’empire. A peine Napoléon fut-il de retour aux Tuileries que Gourgaud reprend auprès de lui son service habituel de premier officier d’ordonnance. Il le suit à l’armée, et est nommé  à Fleurus (le 16 juin 1815) général de brigade et aide de camp de l’empereur.

Il soutient de son mieux, à Waterloo, la fortune croulante de l’empire; après la défaite, il accompagne l’empereur jusqu’à Malmaison, et de là à Rochefort.

A l’île d’Aix, maison occupée par la famille Gourgaud en 1815
A l’île d’Aix, maison occupée par la famille Gourgaud en 1815

Chargé de porter au prince régent la lettre par laquelle Napoléon lui demandait l’hospitalité sur le sol britannique, il passe sans obstacle à travers la croisière anglaise; mais arrivé à Plymouth, il lui est interdit de débarquer. On le conduit à Torbay. C’est là que Napoléon, qui s’est livré à la flotte anglaise, et que la flotte anglaise transporte à Ste-Hélène, que Na­poléon le retrouve et le choisit pour un des com­pagnons de son exil.

Gourgaud ne reste que deux ans à Ste-Hélène, quittant l’île le 14 mars 1818. De retour en Europe, il s’établit d’abord en Angleterre. Il y publie une Relation de la bataille de Waterloo, ouvrage rédigé à Ste-Hélène. L’année suivante, il prend sur lui d’écrire à l’em­pereur de Russie et à l’empereur d’Autriche, essayant de les intéresser aux malheurs de Napo­léon. Il écrivit dans le même sens à l’archidu­chesse de Parme, Marie-Louise, mère du Roi de Rome, devenu duc de Reichstadt : on ne lui répond pas.

Il est, quel­que temps après, expulsé d’Angleterre. Il a prétendra que le gou­vernement anglais le persécutait à cause de sur Waterloo, mais c’est peu vraisemblable.

Il sollicite alors la per­mission de rentrer en France ; elle lui est refusée. Il demande alors à sa mère de s’adresser à la cham­bre des députés pour obtenir son rappel. Le ba­ron Pasquier, alors ministre des affaires étrangères, lui envoie finalement un passeport et Gourgaud rentre en France le 20 mars 1821, environ un mois avant la mort de Napoléon.

Mais son nom reste rayé des cadres de l’ar­mée. Dès 1821 il adresse une pétition à la chambre des députés, pour la prier d’inviter le gouvernement à réclamer de l’Angleterre, au nom de la France, les restes de l’empereur. Il aura, en 1827, un démêlé avec sir Walter Scott, qui, dans sa célèbre Vie de Napoléon, accuse nettement le Gourgaud d’avoir, pendant son séjour à Ste- Hélène, trahi son maître malheureux, en révé­lant au gouverneur de l’île ou à ses agents les moyens que pouvait avoir Napoléon d’échapper à leur surveillance !

Quoiqu’il en soit, Gourgaud est nommé, en 1830, général de division et pair de France, et le roi Louis-Philippe l’attache à sa personne en qualité d’aide de camp.

En 1840, Gourgaud accompagne, à la demande de Louis-Philippe, le prince de Joinville à Ste-Hélène. Après la révolution de 1848 il sera nommé représentant du peuple par le département des Deux-Sèvres, mais non aux premières élections. Il ne fera partie que de l’assemblée législative, n’y jouant qu’un rôle obscur et énigmatique, votant avec la ma­jorité, sans que l’on sache vraiment à quelle fraction de celle-ci il adhérait.

Il était colonel de la première légion de la garde nationale de Paris. Il avait épousé en 1822 une fille Roederer.

Gaspard Gourgaud décède en 1852, à l’âge de 69 ans.  Il est enterré au Cimetière du Père Lachaise (division 23), de Paris.

Sépulture de Gourgaud au cimetière du Père La Chaise
Sépulture de Gourgaud au cimetière du Père La Chaise