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Correspondance de Napoléon Ier – Avril 1811

Paris, 1er avril 1811

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, je pense qu’il faut donner ordre au général Lauriston de partir. Il faut qu’il soit parti avant dimanche. Il passera par Dresde, où il pourra s’arrêter deux ou trois jours. Il se mettra au fait de toutes les nouvelles et des intérêts de ce pays. De là il ira à Berlin, où il restera deux ou trois jours et se fera présenter à la cour. Je pense que de Berlin il devra passer par Stettin et par Danzig. Il pourra également rester deux jours à Danzig pour s’y re­poser ; de là il se rendra, par Kœnigsberg, Tilsit et Riga, à Saint-Pétersbourg. Il doit s’arrêter deux jours à Kœnigsberg; il peut aussi s’arrêter deux jours à Riga; de sorte que, sans le voyage, il aura douze jours de séjour; ce qui, avec à peu près seize jours de route, fera un mois. En partant le 3 ou 4 avril, il sera le 3 ou le 4 mai à Saint-Pétersbourg. Je pense qu’il est important qu’il parte, et néces­saire qu’il n’arrive pas trop vite, afin que toutes les nouvelles des mouvements sur Danzig aient le temps de s’éclaircir à Saint-Péters­bourg. Tout ce qu’il aura vu à Dresde et à Berlin, il vous le mandera par un courrier de M. de Saint-Marsan, qu’il expédiera de Berlin. Tout ce qu’il aura vu à Stettin, à Danzig et Kœnigsberg, il vous l’écrira par un courrier qu’il fera partir de cette dernière ville; de sorte que nous recevrons de lui deux courriers.

Remettez-moi sous les yeux les instructions à lui donner. Donnez-lui copie des articles secrets et de toutes les pièces qu’il doit connaître. Dans les instructions, expliquez-lui bien notre situation actuelle et ce qui s’est passé depuis Tilsit et Erfurt et la convention polonaise. Faites-lui bien comprendre toutes les questions sur les affaires maritimes et de commerce, qu’il doit très peu connaître, et les réponses à faire sur les prétendus neutres et les bâtiments américains, etc.

 

Paris, 1er avril 1811

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, je pense que vous devez écrire à M. de Saint-Marsan de passer une convention avec la Prusse, pour que, indépendamment de la communication directe avec Stettin, je puisse aussi communiquer du Mecklenburg, où j’ai des troupes, avec Stettin. Il ne vous échappera pas que cela serait très économique pour la Prusse, puisque, ce dernier trajet étant plus court, elle aura à nour­rir mes troupes pendant moins de jours.

 

Paris, 1er avril 1811

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, je lis votre rapport du 14 mars. Je vois avec peine son contenu. Vous ne deviez pas écrire à mes mi­nistres relativement aux girofles sans avoir pris mes ordres. Mon in­tention n’a jamais été que ces marchandises ne payassent pas les droits. Je ne suis donc plus étonné de ce qui a été dit, que nous avions l’intention d’obliger nos alliés à recevoir nos denrées franches de droits. Ainsi, par la tournure que vous lui avez donnée, une affaire assez simple a été dans le cas de me faire un tort grave en Eu­rope. J’ai voulu que les girofles arrivassent dans les principales places de consommation, et, quant aux droits d’entrée, j’ai désiré seule­ment obtenir qu’ils fussent acquittés sur le produit des ventes. C’était une demande assez simple, et vous en avez fait une affaire de tribut et de vexation. Je désire que vous me proposiez des mesures pour redresser cette fausse direction donnée à l’opération.

Les affaires des relations extérieures sont des affaires qui doivent se traiter longuement; vous devez toujours garder mes lettres trois ou quatre jours sous votre chevet avant de les faire partir.

Il est nécessaire que vous donniez des explications là-dessus au duc de Vicence; car je me souviens qu’on lui en a parlé, et je n’avais pas compris ce qu’on avait voulu lui dire. Profitez du courrier que vous expédiez aujourd’hui pour lui expliquer l’historique de cette affaire.

 

Paris, 1er avril 1811

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieurs, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, il est nécessaire que vous fassiez partir un courrier pour Pétersbourg : 1° pour envoyer au duc de Vi­cence copie de la note que vous avez remise hier; 2° pour lui faire part des nouvelles que nous avons reçues de la marche de quatre divisions de Moldavie et de celle des divisions de Finlande et de Si­bérie. Vous manderez au duc de Vicence que j’attends, pour con­naître les dispositions de l’empereur Alexandre, sa réponse à ma lettre; que je désire savoir si, de part et d’autre, ces préparatifs doivent finir; que, dans l’incertitude, je suis obligé de me mettre en garde et d’envoyer des troupes à Danzig pour tenir cette place à l’abri de toute tentative. Vous lui ferez connaître ma dernière conversation avec les députés du conseil du commerce, ce que je leur ai dit pour les détourner de se lier désormais d’intérêt avec le commerce anglais : que l’Angleterre perdrait tous ceux qui s’attacheraient à elle; qu’elle ne pouvait espérer de soutenir ses excessives dépenses qu’en usurpant la souveraineté de tout l’univers, mais que je lui avais ôté cette souveraineté en parvenant à l’exclure de la partie de l’univers qui consomme davantage; que je savais le grand convoi qu’ils expédiaient en ce moment pour la Baltique; qu’à ce sujet des lettres arrivaient de tous côtés; que dans ces lettres on faisait des propositions de com­merce, on demandait des crédits; que je les prévenais bien de ne pas s’y fier ; que ces marchandises seraient arrêtées partout, en Prusse, même en Russie, quelque chose qu’on leur dit, parce que l’empereur Alexandre avait déclaré vouloir rester en guerre contre l’Angleterre, comme seul moyen de maintenir la paix du continent ; que sans doute les contrebandiers, qui sont actifs, trouveraient moyen de passer, soit d’un côté, soit de l’autre, mais que cela ne pourrait pas être secret plus de quinze jours ; qu’on le saurait, et qu’alors je ferais arrêter la contrebande partout où je pourrais la trouver ; que sans doute les contrebandiers chercheraient de toute manière à nouer une trame avec le continent , mais que cette trame je la couperais avec mon épée si cela devenait nécessaire; que jusqu’à présent j’avais été indulgent, mais que cette année j’étais décidé à user de rigueur envers ceux qui feraient des affaires de contrebande. Vous rappellerez ce que j’ai dit à ce banquier genevois dont le fils a fait banqueroute : que son fils avait failli pour avoir escompté sur une partie du dernier con­voi anglais de la Baltique.

Dans cette dépêche, vous ne parlerez pas du comte Lauriston.

Vous ferez bien remarquer au duc de Vicence que tous ces mou­vements de troupes, c’est la Russie qui les a commencés; que nous n’en avons même fait aucun qui puisse justifier la marche de quatre divisions qui se portent de la Moldavie sur la frontière du Grand-Duché.

 

Paris, 1er avril 1811

Au comte Mollien. Ministre du trésor public, à Paris

Monsieur le Comte Mollien, je vous envoie une lettre de M. l’architrésorier. Je ne puis croire que l’année 1810 ait un si grand déficit. D’ailleurs, mandez-lui donc que je ne puis arriver à rien tant qu’il ne me présentera pas un budget de recettes et de dépenses. Je ne sais ce qu’il veut me dire avec les 4 millions qu’on pourrait trouver avec des canons. Est-ce que je peux faire de l’argent avec des canons ? Que ne me mande-t-il aussi que j’ai la valeur des digues ! Peut-on avancer de telles pauvretés ! Faites-lui comprendre que je n’ai pas d’argent à lui envoyer et qu’il faut qu’on trouve des ressources dans le pays.

 

Paris, 1er avril 1811

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Je vous envoie une lettre de trente chasseurs de la Garde pris, il y a deux ans, avec le général Desnouettes. Je vous prie d’en faire passer l’extrait au Transport-Office, de témoigner toute l’indignation qu’inspire une pareille conduite, et de demander catégoriquement que ces hommes soient traités plus humainement, en déclarant que, s’ils n’admettent pas cette demande, un pareil nombre d’Anglais sera plongé dans les cachots; qu’il y a bien de la lâcheté dans cette con­duite envers de braves gens, et que sans doute cette manière d’agir n’est pas connue du prince de Galles, car on ne saurait penser qu’il puisse tolérer une pareille bassesse, inconnue parmi les nations civilisées.

Je vous avais demandé une lettre sur le même traitement qu’on fait subir aux prisonniers sur les pontons. Vous ne me l’avez pas remise. II est temps cependant de mettre un terme aux malheurs des prisonniers français.

Expédiez toujours ce soir la lettre relative aux trente marins de la Garde, et apportez-moi demain la note à envoyer au Transport-Office.

Vous me rendrez la lettre de ces malheureux.

 

Paris, 1er avril 1811

Au général Savary, duc de Rovigo, ministre de la police générale, à Paris

Monsieur le Duc de Rovigo, qui est-ce qui a autorisé la Gazette de France à mettre l’article fort bête qu’elle contient aujourd’hui sur mon compte ? Est-ce le sieur….          ? Vraiment ce jeune homme fait trop de niaiseries; retirez-lui la direction du journal. Ne vous souve­nez-vous pas que dernièrement il m’a fait figurer dans un bal masqué : comme si j’allais dans un bal masqué ! Voilà la dixième maladresse de ce genre. Il faut la faire tourner en ridicule et la mettre à côté des bruits que les gazettes allemandes avaient fait courir, que j’étais amoureux de la pantoufle de l’Impératrice.

 

Paris, 1er avril 1811

Au baron de la Bouillerie, trésorier général du domaine extraordinaire, à Paris

J’ai lu avec attention vos rapports des 14 et 26 mars. . Mon intention est de ne faire aucune perte de négociations. J’aime tout autant avoir mes fonds à Magdeburg, à Mayence, à Strasbourg et à Munich qu’à Paris. Ainsi je désire que vous cassiez le traité que vous avez voulu faire avec la Prusse. Il serait désagréable de payer 8 pour 100 des fonds que dans trois mois je serai obligé de renvoyer à Magdeburg ou dans toute autre direction de l’Allemagne,

Vous pouvez céder au trésor les 762,000 francs que vous avez à recevoir de Danzig, également les 1,132,000 que vous avez à rece­voir par Dresde, le ministre du trésor ayant besoin d’argent à Dresde et à Danzig.

Faites encaisser à Magdeburg et à Mayence tout ce que vous y avez. Comme je n’ai plus de troupes à Munich, je désire que vous me fassiez connaître ce qu’il m’en coûterait pour renvoyer cet argent sur des points d’Allemagne où j’ai des troupes. Mais je désire que vous preniez des précautions pour que mes fonds à Mayence et à Magde­burg ne soient pas exposés. Je ne connais pour cela qu’un moyen : c’est que les fonds soient mis en dépôt sous inventaire, et qu’ils soient renfermés dans une caisse à deux clefs, dont une sera laissée au caissier et l’autre sera confiée à une personne que je désignerai à Hambourg. Alors on sera sûr d’empêcher le caissier de négocier les fonds et de courir lui-même à sa ruine, et l’on pourra compter sur cet argent quand on aura besoin de le retrouver. Faites faire de même pour la caisse de Mayence. Cependant je vous prie, dans tous les comptes que vous me rendrez, d’appeler mon attention sur les pays étrangers où j’aurai des caissiers.

Vous devez comprendre que l’argent que j’ai en réserve n’est que pour ma politique extérieure. Ainsi donc j’aime tout autant avoir cet argent à Mayence, à Magdeburg , à Strasbourg, et l’avoir en monnaie d’Allemagne, dont je pourrai me servir en Pologne et en Prusse mieux que de l’argent de France, qui y est moins connu.

 

Paris, 1er avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, j’ai reçu votre lettre du 27 mars. J’ai donné des ordres pour qu’on négociât en Prusse tout ce qui est relatif à la nou­velle route entre le Mecklenburg et Stettin. Vous pouvez en écrire à Saint-Marsan, mais en écrire sans que cela fasse nouvelle et même par la poste.

Je vois que la ville de Hambourg avait 57 compagnies de gardes bourgeoises qui étaient, l’une portant l’autre, d’environ 300 hommes par compagnie; ce qui fait donc 14,000 à peu près. Je vois que vous avez fait rentrer les fusils. Je vous prie de me faire un rapport sur la question de savoir s’il est convenable de désorganiser ces compagnies, qui faisaient la police de la ville. N’est-il pas préférable que la ville fasse elle-même sa police ? Je suppose que la garde dont il s’agit ressemble beaucoup à celle de Vienne, et vous savez que cette dernière nous a servi sans donner lieu à aucun inconvénient. Je pense qu’il est important que les bourgeois, propriétaires et autres gens domi­ciliés se chargent de la police de leur ville. Sans doute que 14,000 fu­sils sont trop, mais on pourrait leur en laisser 6,000. Avant d’en­voyer ces fusils à Stettin, faites-les ranger par calibre et faites-en faire l’inventaire aussi par calibre; vous m’enverrez cet inventaire et je vous ferai connaître mes intentions. Je vous fais la même question relativement aux gardes nationales de Bremen et de Lubeck. Qui vous répondra de la police de ces deux villes ? Je pense qu’il est également important de maintenir ce qui existe, puisque, sans donner lieu à de nouvelles organisations de gardes nationales, qu’on ne connaît pas dans le pays, et sans frais, on atteint le même but, qui est la bonne police de ces villes. Ainsi je vois qu’il faudra donc laisser 6,000 fusils à Hambourg, 3,000 à Lubeck et 3,000 à Bremen. Sur les 30,000, il ne restera plus que 15 à 18,000 fusils à transporter à Danzig.

Je vous dirai la même chose des caisses de tambour. 300 caisses peuvent être trop, mais une cinquantaine est nécessaire. J’attends donc, avant tout, votre rapport là-dessus. Rien ne presse; je ne manque pas d’armes, et, au moindre événement de guerre, j’en en­verrais 300,000 pour armer toute la Pologne.

 

Paris, 2 avril 1811

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, écrivez à M. de Saint-Marsan pour savoir s’il est vrai qu’un grand nombre de chariots russes chargés de marchandises traversent la Prusse et se rendent en Saxe. Prenez le même renseignement auprès de mon ministre à Dresde.

Paris, 2 avril 1811

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, je vous envoie un mémoire du duc de Raguse sur la demande du prince de Schwarzenberg relative aux affaires d’Illyrie. Il est convenable que vous voyiez aussi le duc, afin de rédiger la réponse et de voir s’il ne serait pas convenable de liqui­der toutes ces affaires de main morte. L’Autriche alors ferait ce qu’elle voudrait des biens du clergé qui sont de son côté, et je m’empare­rais de tous ceux qui sont de ce côté-ci. Les choses seraient égales de part et d’autre, et on leur prouverait par une note que c’est eux qui ont commencé.

Le bruit a couru que l’empereur d’Autriche avait pris le titre de roi de Dalmatie. M. Otto n’a jamais rendu compte de ce fait.

 

Paris, 2 avril 1811

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, je reçois l’ordonnance du roi de Naples, du 29 février, par laquelle il prohibe la sortie des graines de coton. Envoyez chercher son ambassadeur, et dites-lui qu’il faut que le Roi rapporte sur-le-champ son ordre, ainsi que ses dispositions précé­dentes sur les draps de France; que le Roi se trompe s’il croit régner à Naples autrement que par ma volonté et pour le bien général de l’Empire. Dites-lui positivement que, s’il ne change pas de système, je m’emparerai du royaume et le ferai gouverner par un vice-roi comme l’Italie. Il faut réclamer aussi sur la vente des nankins.

Dites au ministre de Naples que le Roi marche mal; que, lorsqu’on s’est éloigné du système continental, je n’ai pas même épargné mes propres frères et que je l’épargnerai encore moins. Ajoutez que le royaume est mal administré; qu’il ne s’y fait rien pour la marine dans un pays où il y a tant de milliers de matelots. Il est bien urgent que M. Durand arrive pour redresser la mauvaise direction qu’ont prise les affaires à Naples.

Faites informer par le préfet de Florence contre le consul de Naples à Livourne, lequel vexe mon commerce.

 

Paris, 2 avril 1811

A M. Régnier, duc de Massa, grand-duc, ministre de la justice, à Paris

Les tribunaux de justice ne sont pas organisés dans l’île de Walcheren.

 

Paris, 2 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Je vous prie de donner ordre de me faire un état général de l’ar­tillerie de campagne de l’armée d’Allemagne. Je voudrais la composer de trois corps comme celui du prince d’Eckmühl, avec une réserve de cent vingt pièces de canon pour ma Garde.

Le prince d’Eckmühl a quatre-vingts pièces d’artillerie de ligne, qui, multipliées par trois, égalent deux cent quarante, et de la Garde cent vingt; total, trois cent soixante pièces de ligne. Il y a soixante-quatre pièces de régiment; je n’en mets que soixante-quatre pour les autres régiments, qui n’en auront que deux au lieu de quatre : soixante-quatre multipliés par trois égalent cent quatre-vingt-douze. Il faudra compter ensuite soixante et douze pièces bavaroises, vingt-quatre wurtembergeoises, vingt-quatre de Bade, douze suisses et vingt-quatre de Westphalie, quarante-huit de Saxe, soixante et douze de Varso­vie, soit deux cent soixante et seize; total général, huit cent vingt-huit pièces de ligne. Si je me trompe dans les nombres, vous pouvez les rectifier, parce que j’agis de mémoire.

Cela fait donc, pour toute l’armée d’Allemagne, environ huit cent vingt-huit bouches à feu.

1° Or il faut un approvisionnement à Danzig en poudre et en boulets et de tous objets pour pouvoir rapidement, et après une grande bataille, reconfectionner les munitions. Cet approvisionnement serait pris aux dépens de celui de siège. Il suffit seulement qu’il y ait tout le nécessaire.

Ainsi cela fait cent mille coups de canon. Il faudrait qu’il y eût à Danzig les poudres, boulets, matériaux pour faire des sabots, les boites, les serges nécessaires, etc. Cela ne prendrait guère qu’un quart de l’approvisionnement de Danzig ; mais pendant qu’on confec­tionnerait ces munitions on aurait le temps de faire venir les poudres.

2° Il faut un autre approvisionnement de cent autres mille coups, un tiers à Danzig et les deux autres tiers à Stettin, Küstrin et Magdeburg. Cela devra être tout confectionné. Il devra donc y avoir trente à quarante mille coups de campagne confectionnés à Danzig, et soixante à quatre-vingt mille également confectionnés à Küstrin, Stettin et Magdeburg.

3° Il faut un troisième approvisionnement de cent mille cartouches à balles et à boulet pour l’équipage ci-dessus à Danzig, Stettin, Küstrin et Magdeburg; bien entendu qu’on prendra les approvisionnements de siège 9 puisqu’on aurait le temps de faire venir le rem­placement.

4° Enfin deux approvisionnements attelés.

On aurait donc cinq approvisionnements pour l’équipage de cam­pagne, dont deux confectionnés, attelés et non attelés Y et trois tout confectionnés. Formez-moi cet équipage sur les bases que je viens de déterminer et affectez-y les affûts, le personnel, le matériel et les attelages.

J9ai aujourd’hui neuf bataillons du train en France et deux en Italie, ce qui fait onze; en les portant à 1,400 chevaux, cela ferait 15,000 chevaux. Six bataillons sont nécessaires pour les trois armées; un est nécessaire pour le corps d’observation d’Italie; resteraient donc quatre pour l’équipage de pont, le parc général et le service de la Garde, comme auxiliaires.

La Garde, je crois, n’a de personnel que pour 2,000 chevaux; il faut voir s’il sera possible de l’augmenter. Les cent vingt pièces de la Garde et leurs caissons d’infanterie doivent avoir un bon approvision­nement, parce que dans les batailles la Garde fournit partout; c’est ce qui fait supposer que la Garde ne peut pas avoir moins de 650 voi­tures ou 3,600 chevaux.

Quant aux pontonniers, il faut aussi me présenter un projet pour organiser cette partie. Un directeur général des ponts sera nommé. H aura ses outils, ses pontons, ses bateaux, comme il a son per­sonnel. Chaque compagnie de pontonniers aura une voiture d’ou­tils, comme les sapeurs, et dans cet assortiment d’outils se trouvera compris tout ce qui est nécessaire pour réparer un pont et même pour faire des radeaux, des bateaux et un pont monté, cordages, etc.

Il faut ensuite que le parc général, indépendamment des pontons sur baquets pour jeter un pont, ait en outre trois équipages organisés qu’on puisse détacher avec différents corps d’armée selon les circonstances et particulièrement à l’avant-garde.

Tout cela dépendra de l’équipage général, parce que les équipages seront détachés selon les circonstances. Comme mon intention est de mener à la guerre deux bataillons de 800 ouvriers de marine, j’en attacherai un bataillon aux pontonniers et l’autre au parc du génie; mais il faut qu’ils trouvent aux parcs des pontonniers et du génie tous les outils nécessaires. Par ce moyen on sera organisé de manière à dévorer tous les obstacles.

 

Paris, 2 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Je vous renvoie l’état de situation de l’armée d’Allemagne. Il ne faut pas mettre les deux bataillons du 127e à la 1e brigade; ce serait une chose funeste pour l’armée. I1 faut la composer du 13e d’in­fanterie légère et du 17e de ligne.

La 2e doit l’être du 30e et du 61e ; la 3e des deux bataillons suisses et des deux bataillons du 127e. Au lieu du général Ledru, il faut mettre le général Teste.

Même observation pour la division Friant. Le 128e et les Suisses doivent faire la 3e brigade. Au lieu du général Caudras, il faut mettre le général Dufour.

Même chose pour la division du général Gudin. Le 129e et les Suisses doivent faire une brigade à part.

La division Dessaix est bien. J’approuve que vous y envoyiez le général Lacroix; vous pouvez le faire partir tout de suite.

Quant à la cavalerie légère, il faut l’organiser de la manière suivante :

1e brigade, général Pajol : le 2e de chasseurs et un régiment de lanciers du duché de Varsovie. 2e brigade, général Jacquinot; le 1er de hussards et le 30e de lanciers.

Brigade Piré : le 8e de hussards et le 16e de chasseurs.

Brigade Bordesoulle : le l9e et le 3e de chasseurs.

Toutes ces brigades seront par la suite augmentées avec d’autres régiments alliés.

Quant à la garnison des places, il faut porter, pour le mois d’avril, pour Stettin, cinq bataillons du grand-duché de Berg, formant 4,000 hommes, lesquels seront armés de deux batteries d’artillerie.

Je ne demande pas les quatre régiments de la Confédération, des petits princes de la Confédération, parce que je ne pense pas qu’ils puissent être formés en 1811 ; mais un régiment du prince Primat et un du duché de Wurzburg pourraient être assignés pour les garni­sons de Küstrin et de Glogau.

Le 5e régiment polonais, qui est à Küstrin, sera renvoyé à Thorn. Au mois d’août il doit y avoir à Danzig : 1° le 2e régiment de chas­seurs que j’y ai envoyé; il y aura de plus la légion polonaise, qu’on peut porter à 1,000 hommes; ces deux régiments formeront une bri­gade de 1,600 hommes; 2° la brigade westphalienne, 3,200 hom­mes; 3° la brigade bavaroise, 1,600 hommes; 4° la brigade wurtembergeoise, 1,000 hommes : ce qui fait 7,400 hommes d’augmentation. Cela portera la garnison de Danzig à 15,000 hommes.

A Stettin, au lieu du général Pajol, il faut mettre le général Jacquinot; au lieu du 2e mettre le 108e; mais mettre cela en encre rouge, pour faire comprendre que les troupes sont dans la place, mais n’en forment pas la garnison. J’ai ordonné aussi qu’il y eût à Stettin un autre régiment de la division Dessaix avec le général de brigade; ce qui doit être le 85e et le général Friederichs; mais la vraie garnison au mois d’août sera de cinq bataillons du grand-duché de Berg, avec six pièces d’artillerie. Quatre bataillons resteront à Stettin et un à Küstrin avec un bataillon du prince Primat.

Quant au 5e polonais, il faut le mettre, en encre rouge, à Küstrin, et tenir note qu’il doit se rendre à Thorn.

Quant aux 4e, 5e et 6e régiments proposés pour les garnisons, il faut les porter comme en congé, depuis leur arrivée jusqu’au 1er jan­vier, et leur réunion ne se fera que dans le courant de l’automne prochain.

De sorte que l’armée d’Allemagne serait au mois de juin de 86,000 hommes d’un côté, et de 15,000 à Danzig, 5,000 à Küstrin et Stettin, 2,000 à Glogau; total, 108,000 hommes, sans compter l’armée du grand-duché de Varsovie ni celle de Saxe.

Faites faire sur l’état ci-joint des changements conformes à ces observations.

 

Paris, 2 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, mon intention est qu’on n’envoie pas de prisonniers de guerre pour les travaux des fortifications au Havre. Il y a autour de cette ville un grand nombre d’hommes qui ont besoin de travailler et que le génie peut réunir et employer.

 

Paris, 2 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, j’ai vu l’officier du génie qui vient de Corfou. Je désire qu’il se rende au comité des fortifications pour y rédiger des observations sur les notes que j’ai dictées et sur le projet fait cette année au comité, et qu’on me présente ensuite le projet des instructions à donner pour le directeur des fortifications de Corfou. Je désire surtout qu’on s’occupe de fortifier la hauteur qui est à 600 toises de la place, de laquelle on voit les deux mers et qui do­mine à 2,000 toises aux environs. C’est vraiment là qu’est la défense de Corfou. C’est une espèce de pain de sucre qui domine de 20 toises tout autour. Il faudra placer là cinq rangs de feu, et sous leur pro­tection établir un camp retranché, en forme de double ou triple cou­ronne; mais cette dernière partie serait un ouvrage de campagne. De ce pain de sucre on écraserait tout ce qui voudrait cheminer dessus. Aussitôt que j’aurai approuvé ces plans, il est nécessaire que le même officier du génie retourne à Corfou ; il y portera vos ordres, tant pour ces travaux que pour les autres parties de l’administration. Il y fera connaître que mon intention est de faire un point imprenable de ce fort, auquel on donnera le nom de fort Desaix.

Quant aux approvisionnements, vous devez vous entendre avec le ministre de l’administration de la guerre pour en raisonner avec le général Donzelot. Vous ferez connaître à ce général que, la récolte arrivée, il doit s’approvisionner de maïs pour trois mois; comme au 1er mars, il était approvisionné pour dix mois, c’est-à-dire jusqu’au 1er janvier prochain, et que les expéditions faites par l’Italie lui auront déjà fourni à cette heure ou lui fourniront encore pour trois mois, s’il s’approvisionne de son côté pour trois mois, je pourrai être certain qu’il aura des vivres au moins jusqu’au mois de mai ; que mon inten­tion est, à l’exception des expéditions ordonnées, de n’envoyer plus rien; mais, le mois de septembre arrivant, je lui enverrai du blé et des farines pour deux ans, afin de n’avoir plus à penser à l’approvi­sionnement de ce point important; que, quand même il ne recevrait plus rien, je compte qu’il se procurera des blés jusqu’au mois de mai 1812.

Vous lui ferez considérer de nouveau la grande importance que j’attache à Corfou.

Vous lui ferez connaître que je vois avec peine qu’il ait mis dans l’île de Fano des hommes du 6e de ligne; quelques officiers français avec des Albanais de choix suffisent. Quant aux trois bataillons du 14e, aux deux du 6e et au bataillon italien, il doit toujours les tenir unis sans en ôter un homme. Vous me ferez un rapport sur la compagnie de 70 chevaux qu’il a. Je désire qu’on lui envoie un bon chef d’esca­dron et qu’on lui forme une compagnie de 100 chevaux. Il faudrait lui envoyer de bons cavaliers qui pussent vraiment lui être utiles. Il est important aussi qu’il ait au moins 60 chevaux d’artillerie de siège. Vous lui recommanderez de se procurer en Albanie 16 paires de bœufs, de manière à former huit attelages, qui feraient le service des charrettes à munitions, des affûts et enfin des différents transports. Cette précaution épargnera les canonniers. Quant à l’escadron de cavalerie, il ne pourra lui être envoyé que cet hiver. Il pourra partir de Toulon avec les chevaux et les selles nécessaires; mais il est indispensable de bien connaître ce qui existe à Corfou; si le général Donzelot pouvait se procurer des chevaux en Albanie, on se dispen­serait d’en envoyer. On aura le temps d’ici à septembre de recevoir des renseignements; mais il est indispensable que vous ne perdiez pas cela de vue.

 

Paris, 2 avril 1811

Au général Duroc, duc de Frioul, grand maréchal du palais, à Paris

Je n’approuve point le projet de décret que je vous renvoie. Les vélites nommés officiers ne doivent rien avoir; ils sont supposés avoir de la fortune de chez eux. Mais, comme je désire que les 128 vélites partent pour leurs corps sans aucun délai, je désire que, sur les deux caisses qui sont à votre disposition, 500 francs soient comptés et payés à chacun d’eux demain, afin qu’après-demain aucun d’eux ne soit à Paris.

 

Paris, 2 avril 1811

A Frédéric, roi de Wurtemberg, à Stuttgart

Monsieur mon Frère, je reçois la lettre de Votre Majesté du 24 mars. Votre Majesté trouvera ci-joint copie de la note que j’ai fait remettre, il y a quelques jours, à l’ambassadeur de Russie. J’ai donc annoncé que je faisais à Votre Majesté la demande d’un de ses régiments. La Saxe, la Bavière, le roi de Westphalie, ont fourni les régiments que je leur avais demandés. Je n’en ai pas demandé à Bade, ni à Hesse-Darmstadt, ni au prince Primat, parce qu’une por­tion équivalente de leur contingent se trouve déjà employée. Votre Majesté ne voudra pas être le seul qui refuse de concourir à une mesure commune de défense. Il s’agit de mettre la place importante de Danzig à l’abri de toute tentative ennemie; et cette mesure, prise soit contre les Anglais, soit contre qui que ce puisse être, est une véritable charge pour la Confédération, puisqu’elle a pour objet d’éloigner la guerre de son sein.

J’espère et je crois, comme Votre Majesté, que la Russie ne fera pas la guerre. Cependant, depuis la fin de l’année dernière, elle a fait construire vingt places de campagne. En ce moment elle crée quinze nouveaux régiments ; les divisions de Finlande et de Sibérie sont en marche pour les frontières du Grand-Duché; enfin, quatre divisions de son armée de Moldavie sont également en marche pour les fron­tières du Grand-Duché. Ce ne sont pas les paroles, mais les faits qui révèlent les intentions des gouvernements. Pourquoi retirer des divi­sions qui sont si utiles à la Russie dans sa guerre contre les Turcs ? Pourquoi créer de nouveaux régiments dans un moment de pénurie où l’on n’a pas d’argent, où l’on a une grande guerre sur les bras et où l’on ne peut subvenir aux dépenses qu’avec du papier monnaie ? Ces renseignements sont des faits. Tout ce qu’on répète à l’empereur Alexandre depuis six mois est faux. Par exemple on lui a fait accroire que j’avais demandé les troupes de la Confédération; il est entré à cet égard dans des détails qui font voir qu’il commence à prêter l’oreille à nos ennemis. L’ukase sur le commerce prouve même que ses dispositions sont changées; non qu’il ne fût le maître de prendre cette mesure, mais on y remarque je ne sais quoi de favorable à l’Angleterre et d’hostile contre la France. Or l’empereur seul en Russie tenait à l’alliance contre l’Angleterre.

Dans ces circonstances, je pense que Votre Majesté ne voudra pas me laisser de doutes sur la Confédération doutes qui culbuteraient entièrement le système où Votre Majesté a trouvé la tranquillité et le bonheur. Votre Majesté peut bien sentir le peu d’importance que je mets à deux bataillons qui ne font pas 1,200 hommes; mais c’est une mesure que j’ai crue nécessaire. J’ai réuni Hambourg et les villes hanséatiques, parce que j’ai cru ne pouvoir pas compter sur le secours de ces villes dans mon système contre l’Angleterre, et parce que l’Angleterre ne reconnaît aucune neutralité sur mer. Si les princes de la Confédération me laissent le moindre doute sur leurs disposi­tions pour la défense commune, je puis le dire franchement, ils se perdront; car je préfère avoir des ennemis à avoir des amis douteux, et cela me serait en effet plus avantageux. Dès que je croirai avoir un ennemi de plus, je lèverai 30,000 hommes de plus; tandis que, si j’ai un ami peu sûr, j’aurai fait un faux calcul en comptant sur ses engagements et les faux calculs conduisent toujours à de faux résultats.

J’ai d’ailleurs le droit de requérir les régiments que je demande, puisque je n’aurais aucune prérogative dans la Confédération el qu’elle ne me serait d’aucune utilité si, en échange de la garantie que je lui donne contre toute puissance, je n’avais le droit d’appeler son contingent dans le moment opportun; car appeler les troupes trop tard, et lorsqu’il n’est plus temps, ne serait qu’un privilège funeste; ce serait la pire des fédérations, et je ne voudrais certainement pas en être le chef.

Les relations de Votre Majesté en Russie ne signifient rien; les dispositions de la cour de l’empereur Alexandre ne signifient pas davantage : entre grandes nations, ce sont les faits qui parlent; c’est la direction de l’esprit public qui entraîne. Le roi de Prusse laissait aller à la guerre quand la guerre était loin ; il aurait voulu la retarder quand il n’en était plus le maître, et il pleurait avant Iéna avec le pressentiment de ce qui allait arriver. Il en a été de même de l’em­pereur d’Autriche; il a laissé s’armer la landwehr, et la landwehr n’a pas été plutôt armée qu’elle l’a entraîné à la guerre. Je ne suis pas loin de penser qu’il en arrivera de même à l’empereur Alexandre. Ce prince est déjà loin de l’esprit de Tilsit; toutes les idées de guerre viennent de la Russie. Si l’empereur veut la guerre, la direction de l’esprit public est conforme à ses intentions; s’il ne la veut pas et qu’il n’arrête pas promptement celte impulsion, il y sera entraîné l’année prochaine malgré lui; et ainsi la guerre aura lieu malgré moi, malgré lui, malgré les intérêts de la France et ceux de la Russie. J’ai déjà vu cela si souvent que c’est mon expérience du passé qui me dévoile cet avenir. Tout cela est une scène d’opéra, et ce sont les Anglais qui tiennent les machines. Si quelque chose peut remédier à cette situation, c’est la franchise que j’ai mise à m’en expliquer avec la Russie. Ainsi, quand j’ai ces inquiétudes, il n’est pas conforme à l’amitié que Votre Majesté m’a témoignée de ne pas les partager; et, si elle apprenait que, par une surprise possible, Danzig, Thorn, Modlin sont enlevés, que me dirait-elle ? Que j’ai mal conduit mes affaires, mais aussi celles de la Confédération.

Enfin, Votre Majesté ne peut pas supposer que, moi, je veuille la guerre. Pourquoi la ferais-je ? Serai-ce pour rétablir la Pologne ? Je le pouvais après Tilsit, après Vienne, cette année même ! Je suis trop bon tacticien pour avoir manqué des occasions si faciles; je n’ai donc pas voulu. Enfin j’ai la guerre d’Espagne et de Portugal qui, s’étendant sur un pays plus grand que la France, m’occupe assez d’hommes et de moyens; je ne puis pas vouloir d’autre guerre. Et cependant j’ai levé cette année 120,000 hommes, j’en lèverai l’année prochaine 120,000 autres, je forme de nouveaux régiments, je remonte ma cavalerie et mon artillerie, depuis que les dispositions de la Russie me sont suspectes et que je crois qu’elle se conduit de manière à faire éclater la guerre en 1812. Je dépense cent millions d’extra­ordinaire cette année; Votre Majesté croira-t-elle que c’est pour m’amuser que je fais des dépenses aussi considérables ? Mais, si je ne veux pas la guerre et surtout si je suis très loin de vouloir être le Don Quichotte de la Pologne, j’ai du moins le droit d’exiger que la Russie reste fidèle à l’alliance, et je dois être en mesure de ne pas permettre que, finissant la guerre de Turquie, ce qui probablement aura lieu cet été, elle vienne me dire : « Je quitte le système de l’alliance, et je fais ma paix avec l’Angleterre. » Ce serait, de la part de l’empereur, la même chose que me déclarer la guerre. Car, si je ne déclare pas moi-même la rupture, les Anglais, qui auront trouvé le moyen de changer l’alliance en neutralité, trouveraient bien celui de changer la neutralité en guerre.

Conserverons-nous la paix ? J’espère encore que oui; mais il est nécessaire de s’armer et de mettre à l’abri de toute tentative la place de Danzig qui est la clef de tout.

Je prie donc Votre Majesté d’envoyer son régiment et de com­prendre que, comme protecteur de la Confédération, je tiens comme chose fâcheuse qu’elle m’ait fait la difficulté qu’elle a élevée; car notre système est fondé sur des liens réciproques, et comment n’a-t-elle pas compris, avec son esprit, que sa lettre relâchait ces liens ?

 

Paris, 3 avril 1811

Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris

Monsieur le Comte de Cessac, on a vendu dans toutes mes places de l’Oder beaucoup de blé inutilement. On vous a trompé, et ces ventes ont été l’objet de scandaleuses opérations. Je désire que vous n’ordonniez rien relativement à l’administration de mes troupes en Allemagne qu’en subordonnant tout au prince d’Eckmühl et en faisant, à cet effet, passer vos ordres par son intermédiaire.

 

Paris, 4 avril 1811

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, dites au chargé d’affaires de Nassau que j’ai lu avec la plus grande surprise la lettre du nommé Gentil au prince de Nassau. Écrivez à M. le comte Defermon et à mes ministres et chargés d’affaires que les agents de mon domaine extraordinaire n’ont pas le droit de correspondre avec les cours de la Confédération ; qu’ils doivent s’adresser à mes ministres et chargés d’affaires, qui doivent seuls suivre cette correspondance avec les princes près les­quels ils résident et avec les petites cours voisines.

 

Paris, 4 avril 1811

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, il est urgent d’avoir quelqu’un à Stutt­gart. Celui qui y est comme chargé d’affaires est un homme bien médiocre et qui n’est fait pour être chargé d’affaires dans aucun pays.

 

Paris, 4 avril 1811

Au comte de Montalivet, ministre de l’intérieur, à Paris

Monsieur le Comte Montalivet, je vous renvoie votre projet sur le pont de Bordeaux. Pour cette année les fonds sont faits. Dans les conseils qui se tiendront au mois de décembre vous m’en parlerez, et on fera alors les fonds pour les années suivantes. En attendant, qu’on aille de l’avant sur les fonds faits.

 

Paris, 4 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Mon intention est que les neufs régiments de cuirassiers que j’ai en France se tiennent prêts à se mettre en campagne, ainsi que les deux régiments de carabiniers, mon intention étant de former quatre divisions de grosse cavalerie. La 1e division sera composée des deux régiments de carabiniers et du 1er de cuirassiers; la 2e division sera composée des quatre régiments qui sont en Allemagne; la 3e divi­sion, des 5e 10e, 11e et 14e de cuirassiers, et la 4e division, des 4e, 6e, 7e et 8e de cuirassiers. Ces quatre divisions auront chacune douze pièces d’artillerie à cheval, ce qui fera quarante-huit pièces de canon. La division qui est en Allemagne est déjà organisée. Proposez-moi l’état-major, l’artillerie et la formation des brigades de ces quatre divisions. Mon intention est que, tant que les régiments n’auront pas plus de 600 chevaux, il ne parte pas plus de trois escadrons, à l’ex­ception des carabiniers et du 1er de cuirassiers qui feront partir leurs quatre escadrons, et, à cet effet, le cinquième escadron de ces régi­ments sera formé sans délai.

Faites-moi connaître si les 5e escadrons dont j’ai ordonné la for­mation au 11e de chasseurs, 12e, etc. sont formés. Les quatorze régiments de cavalerie légère pourraient être réunis en brigades de la manière suivante : 1e brigade de cavalerie légère, le 11e et le 12e ; 2e brigade, le 23e et le 24e de chasseurs; 3e brigade, le 5e et le11e de hussards; 4e brigade, le 4e et le 9e de chasseurs; 5e brigade, le 19e et le 14e de chasseurs; 6e brigade, le 6e et le 8e de chasseurs; 7e brigade, le 25e de chasseurs et le 6e de hussards. J’ai en Allema­gne six régiments de cavalerie légère : cela fera donc vingt régiments, qui, à 600 hommes, font 12,000 hommes, et, à 800 hommes, feront 16,000 hommes; ce qui, avec 10,000 cuirassiers, 4,000 dragons et 4,000 hommes de la Garde, fera 34,000 hommes de cavalerie.

 

Paris, 4 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, le général Dessaix doit rester à sa division, mon intention étant qu’au 15 mai tous les généraux et colonels du corps d’armée d’Allemagne soient à leur poste. Cependant il ne faut pas faire d’éclat de cela; il faut seulement refuser les congés qu’on proposerait.

 

Paris, 4 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, écrivez au général Decous que je trouve inutile et imprudent de faire partir en masse, comme il fait, les bâtiments destinés pour Corfou ; qu’il vaut mieux les faire partir un à un; qu’il est plus facile à un seul bâtiment de s’échapper qu’à trente; qu’il faut avoir soin de bien déterminer l’heure à laquelle on doit partir ; que beaucoup de gens pensent qu’il vaut mieux partir de jour, pour passer la nuit en mer et se trouver à mi-canal à l’autre point du jour; qu’on dit que les patrons bocchais, qui, au dernier blocus, faisaient souvent le voyage d’Otrante à Corfou, avaient l’ha­bitude de sortir de jour. Écrivez au général Decous de faire débar­quer toute l’artillerie et tous les effets d’habillement dont les bâti­ments italiens sont chargés, et de faire mettre tous ces effets en dépôt, dans un lieu sûr, à Brindisi; que ces envois ne sont pas urgents, que cela ne doit partir de Brindisi qu’autant que des fré­gates viendraient s’en charger; qu’autrement on doit attendre pour le passage les saisons des longues nuits; que mon intention est donc qu’il ne passe plus rien, si ce n’est du blé, du riz et des légumes secs, parce que ce sont des denrées de première nécessité, encore doit-on attendre un temps décidé et des vents favorables, car rien n’est pressé; qu’à cette exception près on doit retenir tout le reste : vins, eaux-de-vie, vinaigres, viandes salées, etc. tout doit restera Brindisi; que mon intention est aussi qu’aucun homme ne passe; qu’il doit les retenir tous à Brindisi et en former un bataillon pour garder le port.

Vous écrirez à Naples pour qu’il soit pourvu à la nourriture de ces hommes, et vous prendrez des mesures pour assurer leur solde. Ils attendront là qu’une frégate vienne les prendre ou que les nuits d’oc­tobre puissent faciliter leur passage. Ainsi les effets d’artillerie et d’habillement, les vins, les eaux-de-vie, les vinaigres, les viandes salées, etc. doivent être mis en dépôt à Brindisi. Le blé, le riz et les légumes secs doivent seuls continuer de passer. Ajoutez que tous les bâtiments italiens qui se trouveront ainsi déchargés doivent sur-le-champ être renvoyés; ce qui fera quelque économie pour les Gnaoces de mon royaume d’Italie. On les renverra avec un reçu du dépôt de Brindisi. Par suite de ces dispositions, il s’agglomérera à Brindisi et Otrante beaucoup d’hommes du 14e régiment et du 6e, des détache­ments d’artillerie, des détachements italiens et aussi des détachements napolitains. Mais, quand j’ordonne de retenir ici tous les hommes, il est bien entendu que cela ne s’applique pas aux officiers qui seraient expédiés par vous ou par le roi de Naples ; on doit les faire passer sur les meilleures courrières. Il est même nécessaire que le général Decous envoie aussi de temps en temps de ses officiers à Corfou pour avoir des nouvelles, connaître ce qui a passé et vous rendre compte.

Vous devez lui faire adresser tous les jours, par l’estafette, trois exemplaires du Moniteur, et en faire remonter la collection au 1er janvier. Vous lui recommanderez de transmettre ces Moniteur par différentes voies au gouverneur général, afin de le tenir, autant qu’il se pourra, au courant des nouvelles. Le général Decous doit écrire par toutes les occasions, et même il serait à souhaiter qu’il eût un chiffre avec lui pour toutes les choses secrètes qu’on pourra lui donner l’ordre d’écrire. Enfin vous devez le prévenir qu’il est possible que des frégates ou bâtiments de l’État viennent à Tarante ou à Brindisi ; que dans ce cas il doit aussitôt réunir tous les hommes qu’il pourra, pour les faire passer à bord des bâtiments. Il y fera transporter aussi le plus d’approvisionnements qu’il sera possible.

Il doit vous écrire tous les jours. Recommandez-lui de faire par­courir toute la côte pour rechercher les petits bâtiments destinés pour Corfou qui se seraient réfugiés dans les ports depuis Ancône jusqu’à Tarente. Il les réunira à Brindisi, où il fera déposer leur chargement, et les renverra ensuite.

 

Paris, 4 avril 1811

Au comte Mollien, ministre du trésor public, à Paris

Monsieur le Comte Mollien, plusieurs convois d’argent sont déjà entrés en Espagne; il est nécessaire de numéroter ces convois pour désormais nous entendre.

Le convoi de 3 millions, parti de Bayonne le 16 août dernier, sous le commandement de l’adjudant commandant Gressot, s’appel­lera le premier convoi. Celui de 2,500,000 francs, parti le 2 octobre de Bayonne, sous le commandement du chef de bataillon Corozis, s’appellera le deuxième convoi. Celui de 3 millions, parti le 1er fé­vrier, sous le commandement de l’adjudant commandant Dentzel, s’appellera le troisième convoi. Enfin celui de 4 millions, qui va partir en vertu de mon ordre du 29 mars, sous le commandement de l’adjudant commandant Simonin, sera le quatrième convoi.

Par ces convois, l’armée de Portugal a reçu ou doit recevoir : 1° 2,500,000francs, qui faisaient partie du deuxième convoi et dont 500,000 francs ont été donnés au 9e corps; 2° l,500,000 francs, qui faisaient partie du troisième convoi ; 3° 2 millions, qui font partie du quatrième convoi, dont le départ doit avoir lieu en ce moment de Bayonne; total, 6 millions.

Ainsi l’armée de Portugal aura reçu, après l’arrivée de ce dernier convoi, 6 millions, dont 500,000 francs pour le 9e corps. Restent 5,500,000francs pour l’armée de Portugal; ce qui doit faire le solde de six mois au moins.

L’armée du Midi, 1° a reçu 3 millions qui composaient le premier convoi; 2° elle recevra 500,000 francs qui, en vertu de mon ordre du 29 mars, doivent faire partie du quatrième convoi; total, 3,500,000 francs.

L’armée du Centre, 1° a reçu 1,500,000 francs, qui faisaient partie du troisième convoi; 2° va recevoir 1,500,000 francs, qui partent dans le quatrième convoi; elle aura reçu 3 millions.

Comme les envois d’argent sont très difficiles à l’armée du Midi, je désire que les 500,000 francs qui devaient être envoyés à l’armée du Midi avec le quatrième convoi soient envoyés à l’armée de Portu­gal, ce qui portera à 6,500,000 francs les envois faits au Por­tugal, et qu’en remplacement le trésor envoie à l’armée du Midi 500,000 francs en traites, faisant partie du cinquième convoi.

Un cinquième convoi partira de Bayonne le 15 avril et se compo­sera de 6 millions, dont 3 en argent et 3 en traites. Ces 6 millions seront destinés, savoir :

 

En argent En traites
Pour l’armée du Portugal 2,000,000 1,000,000
Pour l’armée du Midi 1,000,000
Pour l’armée du Centre 1,000,000 1,000,000
3,000,000 3,000,000
6,000,000

Après l’arrivée du cinquième convoi, l’armée de Portugal aura donc reçu en tout 9 millions, dont 500,000 francs pour le 9e corps; l’armée du Midi aura reçu 4,500,000 francs, et l’armée du Centre 5 millions.

Dans ces cinq convois se trouvera compris pour 4 millions de traites, savoir : 1 million de traites dans le quatrième convoi et 3 mil­lions dans le cinquième. Il est nécessaire que ces traites soient divisées en séries, afin que, s’il en était volé en route, on pût, d’un seul trait de plume, les annuler.

Maintenant faites-moi un rapport qui me fasse bien connaître la portion de ces convois qui doit être attribuée sur l’exercice 1810 et celle qui appartient à l’exercice courant; enfin quelle doit être la si­tuation de la solde des armées du Centre, du Midi et du Portugal après la réception de ces cinq convois. Il faudra faire des recherches pour savoir : 1° ce que l’armée de Portugal a reçu de contributions des différentes provinces du nord de l’Espagne avant son entrée en Portugal ; 2° ce que l’armée du Centre a reçu de contributions des pays du centre, et 3° ce que l’armée du Midi a reçu des provinces du midi.

Vous recevrez un décret par lequel j’autorise le trésor à prêter 500,000 francs par mois au roi d’Espagne, et ce à dater du 1er avril. Les 500,000 francs d’avril seront payés sur les 1,500,000 francs que le quatrième convoi conduit à l’armée du Centre ; les 500,000 francs de mai seront payés sur le cinquième convoi.

Écrivez cela au ministre des finances du roi d’Espagne.

 

Paris, 4 avril 1811

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, l’armée du Portugal sera partagée en six divisions, savoir :

1e division : le 6e léger, les 39e, 76e et 69e de ligne.

2e division : le 25e léger, les 27e, 50e et 59e de ligne.

3e division : le 31e léger, les 26e, 66e et 82e de ligne, la légion du Midi.

4e division : les 15e, 47e, 70e et 86e de ligne.

5e division : le 17e d’infanterie légère, les 22e et 65e de ligne, les Hanovriens, Prussiens et Irlandais.

6e division : les 15e, 32e, 2e et 4e légers, les 36e et 130e de ligne.

Par ce moyen, le 6e corps se trouve partagé en deux divisions. Tous les régiments qui ont leur dépôt dans la 12e division militaire forment une division; tous ceux qui ont leur dépôt en Bretagne en forment une autre. Je pense que c’est là la meilleure organisation qu’on puisse donner. Vous laisserez le prince d’Essling maître d’ar­ranger les brigades. Vous lui désignerez seulement les généraux pour les divisions et pour les brigades. Vous le laisserez également maître de verser tous les hommes des 15e et 32e légers dans les 2e et 4e légers, et de renvoyer les cadres du 15e léger à Paris et du 32e à Toulon; cela aura l’avantage de supprimer deux cadres sans diminuer de beaucoup le nombre d’hommes. Cette opération me parait bonne. Quant au bataillon du 34e, le cadre rentrera en France et tous les hommes disponibles seront placés dans le 36e, ce qui augmentera le 36e de 200 hommes. Tous les hommes qui sont aux hôpitaux rejoin­dront également le 36e. Le cadre du 4e bataillon du 28e rentrera en France; tous les hommes disponibles seront placés dans le 36e, ce qui l’augmentera de 300 hommes. Le cadre du 4e bataillon du 75e rentrera en France; tous les hommes disponibles seront placés dans le 36e. Ainsi le 36e régiment recevra de ces trois cadres 700 hom­mes d’augmentation et sera porté à 2,000 hommes. Vous recom­manderez qu’on laisse les cadres entiers. Ces bataillons étant étrangers aux régiments qui composent l’armée, il est nécessaire qu’on en laisse les cadres revenir en entier en France. Le régiment des chas­seurs à cheval hanovriens sera dissous et incorporé dans le 1er de hussards; les officiers qui ne seront pas employés seront envoyés en France pour entrer dans le 30e de chasseurs, qui s’organise à Ham­bourg. Ce qui me porte à dissoudre ces bataillons du 34e, du 20e et du 75e, c’est qu’ils sont tous composés de conscrits qui n’ont jamais rejoint leurs régiments, et que d’ailleurs ils ont beaucoup de traîneurs et d’hommes aux hôpitaux, qu’il vaut mieux laisser à l’armée de Portugal.

Vous ferez connaître au maréchal prince d’Essling qu’il doit faire tous ces mouvements en temps opportun ; lui seul doit en avoir con­naissance. Il peut même y faire les changements qu’il jugera indis­pensables. Vous lui ferez connaître que mes principaux motifs pour mettre tels ou tels régiments ensemble, c’est qu’ils ont leurs dépôts dans la même division ; ce qui doit faciliter la formation des régiments de marche à envoyer pour les recruter.

 

Paris, 4 avril 1811

Au général Duroc, duc de Frioul, grand maréchal du palais, à Paris

Monsieur le Duc de Frioul, le ler régiment de voltigeurs et le 1er de tirailleurs ont encore un vieux cadre de la Garde. Je désire que vous m’en présentiez l’état avec un projet d’ordre pour faire revenir ces vieux cadres et donner à ces deux régiments des cadres pareils aux six autres. Vous enverriez l’ordre au duc d’Istrie, qui serait chargé de l’exécuter. Ces vieux cadres reviendraient à Paris, et je m’en ser­virais pour former un nouveau régiment de chasseurs de la Garde. Par ce moyen, la vieille Garde se composerait de quatre bataillons de grenadiers, de quatre bataillons de chasseurs, de deux bataillons de Hollandais; total, dix bataillons de vieille Garde ou 8,000 hom­mes; et j’aurais ensuite un bataillon de sergents, deux bataillons de caporaux et deux bataillons d’un régiment de jeune Garde que je formerais avec la conscription de cette année; en tout quinze bataillons.

 

Paris, 4 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, je vous ai déjà mandé la nécessité d’établir une garde bourgeoise à Hambourg, à Lubeck, à Bremen et à Osnabruck pour la police de ces villes. Pressez l’organisation de la gendarmerie dans tous les pays. Faites-moi connaître ce qui retarde cette organisation. Allez de l’avant et rendez-moi compte. L’Empire est si grand, que les ministres sont accablés de besogne. Je désire que cette gendar­merie puisse être organisée au 1er mai. Je désirerais aussi que les villes de Hambourg, Bremen et Lubeck eussent pour la police du pays une garde à cheval comme l’ancien guet de Paris. Le budget de ces villes doit donner moyen de pourvoir à cette dépense. Mon intention est de faire camper toutes vos divisions après la récolte. Il faudra alors que tout le service se trouve fait par le pays.

Vous me mandez que je ne dois pas compter sur les lanciers ni sur les régiments qui s’organisent à Hambourg; je ne comprends pas bien cela. Est-ce qu’ils ne seraient pas formés au 1er septembre pro­chain ? Envoyez-moi l’état de situation et faites-moi connaître ce qui s’oppose à la formation de ces régiments. Les colonels et majors sont-ils arrivés ? Quels sont les officiers du pays que vous proposez ? Enfin donnez-moi des détails là-dessus.

 

Paris, 4 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, j’avais diminué la correspondance des postes de l’armée comme inutile. Les circonstances ont changé. Je pense que le plus convenable est d’établir une estafette de Hambourg à Danzig. Cela servira aux relations extérieures qui n’envoient plus de courriers. Rapp enverra des officiers porter les dépêches en Russie. Également la correspondance de Varsovie se dirigera par Danzig. On laissera subsister les malles de l’armée pour la correspondance des soldats et pour les affaires de comptabilité. Vous trouverez ci-joint copie du décret que je viens de prendre. Allez de l’avant et faites-le exécuter.

 

Paris, 4 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Paris

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 30 mars. Je vous ai mandé que, si les circonstances l’exigeaient, il faudrait vous porter à tire-d’aile sur Danzig; mais, dans ce cas, je vous prescrirais les détails de la route et je vous enverrais le tracé de cette marche. Vous mar­cheriez par division, comme en temps de guerre, et sur trois colon­nes, selon les circonstances; une division passerait par le Mecklenburg, d’autres par la route de Magdeburg à Stettin. Mais nous n’en sommes pas encore là. Je ne puis pas abandonner la route entre Magdeburg et Stettin, et j’ai fait écrire à mon ministre à Berlin pour la communication du Mecklenburg avec Stettin.

Vous remarquez que, quand j’aurai 6,000 hommes à Stettin, la Prusse ne devra pas nourrir ce nombre. Voici ma réponse : Vous ferez le calcul de ce que j’aurai de monde à Glogau et Küstrin, et vous totaliserez cela avec les 6,000 hommes que j’aurai à Stettin. Vous verrez si cela passe ou non ce que la Prusse doit nourrir. Si cela passe le nombre convenu, je payerai l’excédant ; si cela ne passe pas, il n’est pas juste que je paye : c’est dans ce sens que vous devez en écrire à mon ministre a Berlin.

L’officier que vous avez envoyé en Suède a été trop de temps pour aller et revenir. Puisque le ministre des relations extérieures ne doit plus envoyer de courriers dans le Nord, il faut que vos officiers aillent comme des courriers. Il me parait avantageux de multiplier ainsi le nombre des officiers d’état-major, du génie et d’artillerie qui connaî­tront parfaitement les chemins.

Je pense qu’à dater du 1er mai vous devez exiger que tous les offi­ciers généraux, colonels et officiers d’état-major soient à leur poste.

Je désire qu’au 1er mai vous fassiez passer à la fois une revue dans tous les régiments, afin de reconnaître le nombre d’officiers et sous-officiers qui manquent dans tous les corps. Vous donnerez ordre que les places de sous-officiers soient remplies, et vous m’enverrez vos propositions pour les places d’officiers. S’il y avait des places de chef de bataillon ou d’escadron vacantes, vous me proposeriez des officiers de choix et sur lesquels on pût bien compter. Je suppose que, dans tous les corps, les soldats ont une paire de souliers aux pieds et deux neuves dans le sac, que l’armement est en bon état, que les soldats ont jusqu’au tire-bourre et à l’épinglette. Recommandez à votre com­mandant d’artillerie que tout ce qui est prescrit par l’ordonnance, que les outils, les rechanges, que tout dans les plus menus détails existe, que je n’entends pas qu’on s’éloigne de ce qui est dit dans l’aide-mémoire de Gassendi. J’approuve que vous fassiez venir à Magdeburg le biscuit qui est à Dresde, d’autant plus qu’on pourra le faire passer, s’il est nécessaire, de Magdeburg sur Stettin, qui est le pivot et où il est toujours besoin d’avoir 500,000 rations. On pourrait, sans ostentation, faire fabriquer 250,000 rations de biscuit à Stettin et autant à Küstrin. Vous savez que le pays entre Stettin et Danzig est pauvre, et que pour marcher en masse il faut avoir ses vivres. Certain de trouver 500,000 rations sur l’Oder, vos caissons arrive­raient là vides; on les chargerait de biscuit, et vous auriez alors les moyens de traverser en masse et avec rapidité tout cet espace.

 

Paris, 4 avril 1811

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Paris

Mon Fils, je vous envoie copie d’une lettre que j’écris au ministre de la guerre. Vous sentez l’importance que tous vos petits bâtiments viennent déposer leur chargement à Brindisi et s’en retournent; cela évitera au trésor d’Italie des frais qui sont considérables.

 

Paris, 4 avril 1811

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Paris

Mon Fils, il serait possible que j’eusse besoin d’une division ita­lienne de seize bataillons et de 1,500 chevaux. Cette division aura seize pièces de régiment et dix-huit pièces de ligne. Faites-moi un projet pour bien composer cette division. Je désire de bonnes troupes qui aient fait la guerre, non-seulement les cadres, mais la plus grande partie. Il faudrait que cela pût remplacer seize bataillons fran­çais que je laisserais en Italie.

 

Paris, 4 avril 1811

Au roi Charles d’Espagne, à Marseille.

Monsieur mon Frère, j’ai reçu la lettre que vous m’avez écrite a l’occasion de la naissance de mon fils, et je vous remercie des senti­ments que vous m’y exprimez.

 

Paris, 4 avril 1811

A la reine Louise d’Espagne, à Marseille

Madame ma Sœur, j’ai reçu la lettre que vous m’avez écrite à l’occasion de l’heureux accouchement de l’Impératrice, et je remercie Votre Majesté de la participation qu’elle témoigne à cette faveur nou­velle que la Providence m’a accordée.

 

Paris, 5 avril 1811

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, je vous renvoie le travail que vous avez fait préparer pour le comte Lauriston. Il ne faut pas appeler cela Instructions, mais Exposé de ce qui s’est passé. Quant aux instruc­tions, vous lui donnerez les suivantes.

Dans les conférences avec M. de Romanzof et avec l’empereur, leur parler toujours clair, mais ne parler ainsi qu’à eux et que là. Dans ces conférences, après avoir laissé parler longtemps, demander la permission de répondre franchement, en se servant de la formule: Voila comme on voit à Paris.

Je ne ferai pas la guerre pour la Pologne, quoique cependant je ne veuille pas souffrir qu’il soit fait aucun empiétement sur le Grand-Duché, ni qu’il lui soit fait aucun tort.

Je ne ferai pas la guerre pour le tarif des douanes, quoique le der­nier ukase soit contraire au traité de Tilsit, et que l’idée de brûler des marchandises d’une puissance amie ou alliée paraisse impliquer contradiction avec les idées d’amitié et d’alliance.

Mais, quelque graves que soient ces griefs, je ne ferai la guerre que dans le cas où la Russie voudrait autre chose que la rive gauche du Danube, ou bien dans le cas où cette puissance, déchirant le traité de Tilsit, ferait sa paix avec l’Angleterre.

Cet ultimatum ne doit jamais être prononcé; mais, si cela était important et que cela devint nécessaire, dans les conversations confidentielles avec M. de Romanzof et l’empereur, le comte Lauriston pourrait être autorisé à le leur laisser entrevoir.

Dans tous les cas, soit avec les aides de camp de l’empereur, soit avec les militaires, soit avec le prince Tolstoï, soit avec les ministres étrangers, quelque chose que le cabinet russe fasse, l’ambassadeur doit toujours rester dans les termes d’une amitié parfaite, dans les idées d’alliance, et ne pas laisser supposer qu’il existe le moindre nuage, ni le moindre sujet de discussion.

L’Empereur fait ainsi connaître ses intentions à son ambassadeur pour que celui-ci sache quels sont les points auxquels on attache de l’importance et puisse diriger sa conduite en conséquence, sans cepen­dant se compromettre en rien; car, ferait-on la paix avec l’Angle­terre, marcherait-on sur Constantinople, l’ambassadeur doit seule­ment prévenir et ne faire aucune démarche qu’il n’y soit spécialement autorisé.

La continuation de la guerre entre la Russie et la Turquie serait sans doute une chose avantageuse à la France, sans cependant qu’on la désire. Si la Russie parvenait à faire sa paix avec la Turquie et à garder la Moldavie et la Valachie, elle ne devrait rien conserver sur la rive droite, ni aucune influence sur la Servie, qui ne doit jamais être gouvernée par un prince grec. La Russie voudrait faire pour la Servie ce qu’elle a fait pour la Moldavie et la Valachie, la mettre d’abord sous la protection d’un prince grec, qui serait nommé par la Porte, pour insensiblement y étendre son influence et arriver, par les Monténégrins et par la Morée, sur la Méditerranée.

A cela l’Empereur est décide à s’opposer. Il sera nécessaire que le comte Lauriston prenne des informations pour connaître indirectement quels sont les projets de la Servie ; mais ces insinuations ne seraient nécessaires que dans le cas où il y aurait des ouvertures de paix avec la Porte. Alors il serait bon de laisser entrevoir l’intérêt que la France prend à empêcher que la Russie n’étende son influence du côté de la Dalmatie, et, s’il est question d’un prince grec en Servie, de ne pas dissimuler qu’il ne saurait convenir à la France de voir un prince grec venir s’établir ainsi sur ses frontières.

Quant à la Moldavie et à la Valachie, on peut dire que la Russie tiendra ces deux provinces de la France. Actuellement la politique de l’Empereur est de ne pas s’en mêler; mais il ne faut pas faire de déclaration, car, si les affaires continuaient à se brouiller entre les deux puissances, il serait probable que la Russie unirait par ne pas conserver ces deux provinces.

Quant à l’Angleterre, il faut, par insinuation et par tous les moyens possibles, empêcher le commerce anglais; avoir à ce sujet des correspondances suivies avec nos consuls et instruire de tout ce qui est relatif à ce point. Il est probable que la moindre apparence d’une paix avec l’Angleterre sera le signal de la guerre, à moins que des circonstances imprévues ne fassent penser à l’Empereur qu’il soit préférable de gagner du temps. Mais il est important que la Russie comprenne les conséquences de la démarche qu’elle ferait.

Quant à la Pologne, il faut présenter la question sous ce point de vue; que l’Empereur fait son possible pour ôter tout soupçon de ce côté, et empêcher que les ennemis des deux empires n’aient aucun prétexte pour troubler l’harmonie; réitérer ces assurances et employer toutes les formes pour prouver que la politique de la France n’est pas là, et a pour but unique l’Angleterre.

 

Paris, 5 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, je vous ai demandé depuis longtemps un projet pour former, dans chaque régiment de ligne, une compa­gnie de garnison de vaisseau, qui prendrait le numéro 2 dans le 5e bataillon. Donnez ordre que la garnison du Tilsit et du Friedland soit, en attendant, formée par une compagnie du 18e et par une du 56e.

 

Paris, 5 avril 1811

 Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, mon intention est de réunir à Stras­bourg une division de quatre bataillons du 10e, de quatre bataillons du 20e, de quatre bataillons du 101e et de quatre bataillons du 1er de ligne. Je viens de vous écrire pour que les huit premiers bataillons aient à se rendre d’Italie à Besançon. Je désire qu’à leur arrivée dans cette ville ils trouvent ordre de se rendre à Strasbourg. Donnez ordre aux colonels de ces quatre régiments de former leurs compagnies de canonnière, si elles ne le sont déjà, conformément à l’organisation sur le pied de deux pièces par régiment. Je vous ai envoyé ordre que le 101e et le 1er de ligne, qui se sont rendus de Naples à Rome, aient à continuer leur route sur Plaisance. Il est nécessaire que leurs quatre bataillons puissent les joindre dans cette dernière ville. Je désire également que le 62e, le 112e, le 29e et le 52e aient leur artil­lerie et leurs pièces, mon intention étant d’en former une division. Je suppose que le 9e, le 13e, le 35e, le 84e, le 106e et le 92e qui sont en Italie, ont également leurs compagnies. Faites-moi un rapport là-dessus.

 

Paris, 5 avril 1811

Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris

Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris

Monsieur le Comte de Cessac , vous recevrez le décret que je viens de prendre pour l’approvisionnement de Corfou. Vous connaissez l’importance que j’y attache. Mon intention est que Corfou ait son approvisionnement assuré jusqu’au 1er janvier 1814.

Je vois qu’avec ce qu’on envoie de Naples et d’Italie il y a dans ce moment à Corfou des vivres pour jusqu’au ler janvier 1812 au moins; le général Donzelot doit, en outre, après la récolte, s’approvisionner pour trois mois en maïs et légumes du pays : ainsi donc les vivres sont assurés jusqu’au ler avril 1812. Mon intention est que les vins, vinaigres, eaux-de-vie, huiles, viandes salées, chandelles, bois de chauffage, sel et avoines, qui seraient achetés et pas encore partis, soient mis en magasin jusqu’à l’hiver à Brindisi; que ce qui ne serait pas encore acheté ne le soit pas. Je pense que le territoire de l’île produit suffisamment de tous ces articles. Quant aux vins et aux vinaigres, vous me rendrez compte des ressources que l’île et les côtes voisines offrent pour cet approvisionnement. Si les produits du pays y étaient insuffisants, on y suppléerait en septembre. Pendant l’été, j’ai ordonné de ne laisser passer que le blé, le riz et les légumes secs. Quant à la viande, je pense que le gouverneur doit avoir 1,200 bœufs en réserve et un nombre proportionné de moutons et de chèvres; il doit avoir aussi moyen d’en tirer de l’Albanie. En cas d’événements, il renfermerait de force tout le bétail de l’île dans la place et pourrait faire son approvisionnement de viandes salées à fur et à mesure que ces animaux manqueraient de nourriture. Le sel est très-abondant à Corfou, l’huile y est également abondante, et je pense que des distributions d’huile, de riz et de sel pourraient ménager la consommation de la viande.

Prescrivez au général Donzelot de ménager la consommation du blé en mêlant du maïs dans la ration. Si je veux approvisionner Corfou pour deux ans en riz, en blé et en légumes secs, il me suffit de l’ap­provisionner pour un an en viande, à raison de dix distributions de viande par mois : je n’ai besoin par an que de cent vingt jours de viande. Je ne veux également l’approvisionner que pour un an en huiles, en vins, savoir : cent vingt jours de vin par an et le reste en eau-de-vie.

Écrivez au général Donzelot d’essayer si la culture des pommes de terre réussirait ; ce serait d’une grande ressource. Cette culture réussit dans les provinces méridionales d’Espagne.

Des moyens doivent être pris pour assurer la pêche assez abon­dante pour en donner dix fois par mois à la garnison. Il faut avoir en réserve la quantité de filets et autres engins de pêche nécessaire. Le riz, des légumes secs, avec de l’huile, seront donnés comme viande, avec des fromages, dix jours par mois. Ainsi donc il faut avoir cent vingt jours de viande, cent vingt jours de poisson, cent vingt jours de riz , huile et fromage; le gouverneur s’en procurera dans le pays, fera saler des poissons qui abondent et s’en fera une réserve pour les derniers temps du siège.

 

Paris, 6 avril 1811

Au comte de Montalivet, ministre de l’intérieur, à Paris

Monsieur le Comte Montalivet, pourquoi le droit sur le Simplon n’est-il pas encore établi ? Présentez-moi un projet pour rétablir à dater du 1er mai. On perd par ces lenteurs des sommes considéra­bles, et d’ailleurs cette lacune fait tort aux routes du Piémont et du mont Cenis. Il est nécessaire que la taxe soit également établie sur toutes les hauteurs.

 

Paris, 6 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

J’ai approuvé le projet présenté pour le Helder. Je désire qu’on trace sur les lieux les ouvrages, que le tracé soit envoyé au comité et qu’on y travaille le plus tôt possible. Je suppose que te glacis, la lunette la plus avancée, deux ou trois bastions, un fossé plein d’eau et un ouvrage sur la digue seraient la manière de mettre ce point à même de faire une défense raisonnable.

Je vous envoie une note sur l’île du Texel. Je désire que le comité trace sur le plan les idées que j’ai omises, et qu’on me fasse con­naître l’emploi des 200,000 francs que j’ai affectés aux travaux de cette année.

NOTE SUR L’ÎLE DU TEXEL. [1]Cette note se trouve au ministère de la guerre, dans la collection du Dépôt des fortifications, sous ce titre: Note dictée par Sa Majesté. Elle se trouve également transcrite sur un registre du … Continue reading

Il faut considérer l’île du Texel sous le point de vue de la défense de 1811 et 1812 et sous celui de la défense à venir.

La défense de l’île du Texel pour l’avenir dépend d’abord de la pointe du Helder. Le projet pour le Helder est adopté; on y dépen­sera 500,000 francs cette année et 700,000 francs l’année prochaine, et on compte qu’à la fin de 1812 mille ou douze cents hommes pourront s’y défendre pendant le temps nécessaire pour qu’on puisse les secourir.

Par leur défense ils protégeront la batterie de la Révolution, et par la batterie de la Révolution ils resteront maîtres de la passe. Il ne paraît donc pas probable que, tant qu’on ne sera pas maître du Helder, on fera des dépenses considérables dans l’île du Texel, quelle que soit son importance.

Considérant actuellement la défense pour 1811 et 1812 pour l’île du Texel, le fort actuel est estimé   200,000 francs; on ne peut mettre cette année que 200,000 francs pour l’île du Texel : il est donc impossible de penser à démolir ce fort pour le porter ailleurs; on n’aurait rien du tout. Un bataillon d’infanterie fort de 5 à 600 hommes est cependant destiné à la défense du Texel. Le fort actuel n’a guère que 200 toises de tour; il peut donc être considéré comme une redoute carrée de 60 toises de côté intérieur. Il a deux magasins blindés à l’abri des obus et des bombes. Une dépense nécessaire parait être de faire un chemin couvert tout autour, ce qui donnerait à ce chemin couvert 3 ou 400 toises de pourtour, avec trois places d’ar­mes, ce qui serait suffisant pour donner refuge au bataillon.

Il faut faire connaître ce que coûteraient ces ouvrages, les plus importants à faire. Cela établi, il faut donner au fort une autre pro­priété : c’est celle que dans les fossés de la place, en passant par l’écluse, on puisse toujours avoir dix chaloupes au plus et cinq au moins, capables de ramener les 500 hommes en un voyage ou en deux, lesquels se rendraient soit à bord de l’escadre, soit à bord d’une ou deux canonnières qu’on destinerait à cet effet. Or, pour que ces cinq chaloupes puissent rester dans les fossés du fort, il faut qu’elles puissent passer par l’écluse. Si cela n’est pas, que faut-il faire ? Qu’est-ce que cela coûterait ? Cet objet est le second objet de dépense.

Le troisième objet de dépense est de maintenir la communication du fort du Texel avec l’escadre et l’intérieur de la rade. Pour cela faire, il faut empêcher l’ennemi de s’en approcher.

J’ai considéré le fort comme une redoute de 60 toises de côté inté­rieur. J’ai dit qu’il faut tout autour un chemin couvert, demi-hexa­gonal, de 100 toises de côté, ce qui fera 300 toises à peu près, en établissant à droite et à gauche, près la digue, un point fort, de manière à dominer et à être bien maître de la digue.

Cela supposé fait et qu’on puisse se servir de l’écluse, on se trouvera à 300 toises de l’entrée du port. Il suffirait de faire une petite re­doute de 15 toises de côté intérieur.

A 400 toises du fort, je vois qu’il y a un canal qui est favorable à l’établissement d’une batterie de ce côté, qui empêcherait l’ennemi de s’approcher à 400 toises du fort; on en ferait autant du côté du village.

Il faut faire connaître la valeur de deux forts environnés d’eau; ce qu’ils coûteraient; si on peut couper la digue. Les deux forts de droite et de gauche resteraient en communication avec le fort central an moyen d’une inondation, qui paraît déjà exister au pied de la digue. Il faudrait la perfectionner; ce doit être peu de travail.

On environnera tous les ouvrages d’un fossé plein d’eau, et on aurait trois petites demi-lunes ou places d’armes retranchées, l’une sur la route, les deux autres sur les deux digues; ce qui donnera trois sorties, et alors le fort ne laissera pas d’être d’une résistance assez considérable.

On ne peut empêcher la communication, puisque l’ennemi serait éloigné de 400 toises ; bien entendu que cette communication se fera de préférence pendant la nuit, que la garnison aurait dans les fossés de quoi évacuer le fort en cas de nécessité, et des magasins pour recevoir des renforts. Les deux redoutes, éloignées l’une de l’autre de 8 à 900 toises, seraient couvertes par une inondation, un fossé plein d’eau et un chemin couvert.

L’ennemi cheminera-t-il sur les digues ? Il lui faudra d’abord quel­ques jours pour s’emparer des deux sorties qu’il attaquera. S’il che­mine sur la route, il y trouvera une place d’armes retranchée. Ainsi ce fort aurait un degré de résistance tel, que, suivant les circon­stances, on pourrait y jeter 2 ou 3,000 hommes de renfort pour chasser l’ennemi s’il n’était pas en force, ou se retirer si l’attaque était trop forte et qu’on ne pût avoir de secours.

Peut-être vaudrait-il mieux encore tracer le chemin couvert, indé­pendamment du fort établi, sur une grande dimension, c’est-à-dire qu’au lieu de 300 toises on donnerait 500 toises de développement, de sorte qu’on pût par la suite convertir ce chemin couvert en ligne magistrale du fort.

 

Paris, 6 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Je vous envoie une note sur le système à adopter en occupant les hauteurs en avant de Corfou. Je désire que le comité trace, autant qu’on peut l’imaginer ici, les ouvrages à établir sur les monts Supé­rieur et Viglia en fortification demi-permanente, et les lignes de contre-attaque qu’il conviendrait d’établir en supposant que l’ennemi attaquât par la droite, la gauche ou le centre.

NOTE SUR CORFOU.

Le projet qu’on propose pour Corfou consiste dans une multitude d’ouvrages détachés qui n’ont pas de système.

La garnison est supposée de 10,000 hommes; l’armée qui l’attaque, de 20 ou 25,000 hommes, bonnes ou mauvaises troupes. C’est le cas de la fortification d’une belle et grande défense : c’est une petite année contre une grande armée; ce n’est donc pas le cas d’une défense d’inertie, c’est le cas d’une défense active.

La première considération d’une défense active, c’est qu’il ne faut laisser l’ennemi s’établir sur aucun point ayant domination. Il ne faut point s’inquiéter si ce point est à 800 toises, 1,000 toises ou même 1,500 toises de la place; il faut chercher le point qui domine : c’est là qu’il faut s’établir. En effet, du moment que l’on dépasse 400 toises, quel que soit l’éloignement, on ne tire plus de défense de la place; on est réduit à ses propres forces. Et lorsqu’on ne dépasse pas 1,500 toises, il est très-facile de maintenir les communications et d’empêcher l’ennemi de s’établir entre soi et la place; c’est l’affaire de deux redoutes, qui, par leur position couverte, ne peuvent être attaquées.

En raisonnant d’après ces principes, on voit que du fort d’Abra­ham, qui est la fortification permanente, au fort Supérieur il y a 600 toises; que le mont Supérieur a 15 toises de commandement sur tout le terrain environnant à 2,000 toises. Il faut donc s’établir sur le mont Supérieur, par la seule raison qu’il a 15 toises de commandement, quand même il serait à 1,200 toises de la place au lieu d’en être à 600 toises, qui est sa distance réelle.

Il faut donc occuper le mont Supérieur. Il faut tracer sur le mont Supérieur une redoute de 30 toises de côté intérieur, de 20, ou même 15 si les localités y obligent et si, pour avoir 30 ou 40 toises de côté, ce qui serait le meilleur, il fallait trop perdre de commandement. En supposant même qu’elle n’eût que 15 toises, ce serait toujours six pièces de canon sur chaque côté. Mais l’officier qui a vu Corfou pense qu’on peut tracer une redoute de 25 toises de côté sans perdre de commandement. Les localités pourraient permettre de faire un rectangle ou trapèze ou pentagone, de manière à avoir plus de déve­loppement et à pouvoir diriger sur un point donné un plus grand nombre de pièces. Le minimum serait d’avoir six ou sept pièces qui battraient sur un point déterminé avec un grand commandement.

On profitera du commandement de 15 toises qui existe sur tous les environs pour tracer deux autres enceintes; de sorte qu’on aurait une grande masse de feux battant sur toute la campagne, et, comme les enceintes s’agrandissent à mesure qu’on s’abaisse, la deuxième aura un développement double de la première, la troisième plus du triple, c’est-à-dire qu’on aura une immense masse de feux sur le point que l’on voudra défendre.

II faudra mettre la première et la deuxième enceinte à l’abri de l’escalade par quelque revêtement en maçonnerie caché aux feux de la campagne, comme l’ingénieur Crétin l’avait pratiqué à Alexandrie; de sorte que, la troisième enceinte prise, la deuxième se défende par l’escarpement de ses murailles cachées au canon de la campagne.

J’appelle première enceinte la plus élevée, la deuxième celle du milieu, la troisième celle qui est la plus basse.

La première et la deuxième enceinte sont de véritables cavaliers ; la troisième enceinte est la vraie ligne magistrale; on la suppose au même niveau, ou n’ayant qu’un petit commandement sur les mame­lons à 100 toises et autres, cotés 70 pieds ou environ.

On suppose que l’ennemi pourra tenter de pousser ses tranchées sur les hauteurs couvertes de cette troisième enceinte magistrale, et on sent le mal qu’il éprouvera des deux enceintes supérieures.

Il est bon de donner des flancs à celle enceinte magistrale, soit qu’on en fasse un pentagone, soit qu’on en fasse un carré.

Lorsque l’ennemi aura couronné le chemin couvert, passé le fossé, rendu la brèche praticable et forcé la troisième enceinte, il n’aura rien; il faudra qu’il monte à l’assaut de la deuxième enceinte, et enfin qu’il emporte le fort qui couronne le mont Supérieur. La pre­mière enceinte du mont Supérieur ayant 40 toises à peu près de niveau, dans la direction de la place, on doit en profiter pour établir là un blockhaus qui servira de logement à la garnison, et aussi à repousser par la fusillade et par quelques canons de campagne l’en­nemi qui serait parvenu à la première enceinte.

Ainsi l’ennemi, maître de la troisième enceinte, devra s’emparer de la deuxième et arriver à la première, où il trouvera un réduit ou fort blockhaus qui lui ferait essuyer la fusillade de 200 hommes et la mitraille de trois ou quatre pièces dé campagne; enfin l’artillerie du mont Mamelus le battra à 150 toises. Il faudra que la garnison soit bien faible pour ne pas déboucher et culbuter l’ennemi, lorsqu’il sera accablé par tant de feux et qu’il aura à surmonter tant d’obstacles.

Deuxième observation. Jusqu’ici nous avons considéré le mont Supérieur offrant une défense d’inertie; il est évident que par sa position il offre, avec une médiocre fortification, plus de défense que n’en présentent sur les autres points de la place les maçonneries et les autres avantages de la fortification permanente ; mais il faut le considérer à présent sous son vrai point de vue.

Supposons le fort Supérieur achevé, et aussi bien armé qu’on peut le désirer; s’il ne présente qu’une force d’inertie, l’ennemi en viendra à bout un mois plus tôt ou un mois plus tard ; mais il n’en est pas de même dans son rôle actif. On suppose que les lunettes de la troi­sième enceinte seraient placées sur les mamelons cotés 40, 78, 76 et autres. Comment l’ennemi se présentera-t-il contre ce fort armé de cette grande quantité d’artillerie, avec tout l’avantage de son im­mense commandement, découvrant à 2,000 toises autour de lui ? Viendra-t-il placer sa première ligne ou place d’armes a 600 toises ? Cheminera-t-il ensuite jusqu’à 300 toises, et viendra-t-il s’approcher à 150 toises ? On connaît les avantages considérables que donnera l’artillerie, et le grand avantage qu’aura l’assiégeant qui marchera à la rencontre de l’ennemi, qui poussera à 2 ou 300 toises des batte­ries de flanc protégées par le mont Supérieur, et l’avantage qu’aura la garnison pour déboucher sur ces ouvrages, les raser et engager l’ennemi dans une nouvelle lutte où 10,000 hommes peuvent fort bien en battre 25,000, surtout lorsqu’on pourra la renouveler une deuxième et troisième fois, après avoir rasé les ouvrages de l’ennemi et comblé les tranchées.

Il est un point, les monts Viglia, qui pourrait être un obstacle à ce projet. L’ennemi se retranchera sur ces montagnes, qui, quoique dominées par le mont Oliveto à 300 toises, dérobent cependant leurs revers aux vues de cette hauteur. Alors l’ennemi, fortement établi à 300 toises du mont Supérieur, arrêterait la garnison et la prendrait en flanc si elle s’avança il davantage. De là la nécessité d’occuper les monts Viglia par les principes posés ci-dessus.

L’occupation doit être facile, parce que l’ouvrage du mont Oliveto est déjà établi. Le mont Oliveto a 50 pieds de commandement sur les monts Viglia; il en est éloigné de 200 toises. Le mont Supé­rieur est également éloigné de 200 toises des monts Viglia et les prend à revers. Par ce moyen un ouvrage si important dans le rôle actif de la place rend constamment l’assiégé maître de toute la position.

Si l’ennemi fait ses attaques du côté opposé, il s’établira sur un mamelon à 900 toises du mont Supérieur; mais, aussitôt que son mouvement sera démasqué, la garnison fera des ouvrages, sous la protection du mont Supérieur, dans la direction des ouvrages de l’ennemi, et, en même temps qu’il établira ses batteries, lui opposera des batteries de contre-attaque qu’il sera obligé de détruire; ce qui prolongera ce genre de défense aussi loin qu’on voudra.

Le mont Oliveto est déjà occupé, puisque l’ouvrage a été tracé en février; c’est d’ailleurs la vraie position pour le rôle défensif. Il faut occuper le mont Supérieur comme nous l’avons dit ci-dessus, occuper le mont Viglia le plus près possible du mont Supérieur, n’occuper le mont Mamelus que pour appuyer la communication, pouvoir repren­dre le mont Supérieur et repousser l’assaut qui serait donné à la première enceinte de cette position. On ne fera tous les autres ouvrages que selon le parti que prendra l’ennemi. Il faut les recon­naître d’avance, et les faire aussitôt que l’ennemi démasquera ses attaques.

Le comité fera tracer les lignes de contre-attaque dans les diverses hypothèses où l’ennemi attaquerait par la droite, la gauche ou le centre.

L’art consiste à tenir l’ennemi éloigné du mont Supérieur, à l’en­gager dans une guerre qui lui est désavantageuse, parce que nous sommes maîtres de la position supérieure et que cela est sans remède pour l’ennemi ; à le harasser, à lui tuer du monde, à le fati­guer, parce que l’avantage est pour l’assiégé, qu’il a choisi la position et qu’elle est pour lui ; enfin parce que les lignes de contre-attaque prendront des revers à 300, 400 ou 500 toises du mont Supérieur, sous la protection des batteries formidables et du fort établis sur celte montagne.

S’il arrive enfin qu’il faille céder le mont Supérieur à des forces considérables, on aura pu pendant tout le temps de cette lutte s’éta­blir solidement au mont Mamelus; ce qui obligera l’ennemi à une attaque sérieuse loin de la place. Sans doute ces attaques seront moins avantageuses pour la garnison, puisque l’ennemi aura au moins l’égalité de la position.

En résumé, il faut tracer les fortifications, autant qu’on peut l’imaginer ici, aux monts Supérieur et Viglia, en fortification demi-permanente, et tracer les lignes de contre-attaque dans toutes les hypothèses.

 

Paris, 6 avril 1811

Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris

Monsieur le Comte de Cessac, je vous ai donné ordre de faire partir au 1er avril trois compagnies du 12e bataillon d’équipages pour l’Allemagne, en passant par Wesel. Faites-moi connaître si les trois autres compagnies pourront partir au ler juin et compléter ainsi le bataillon que je destine à l’armée d’Allemagne. La compagnie d’in­firmiers qui est en Hollande y est inutile; je pense donc qu’il est nécessaire que d’ici au mois de juin elle se rende au quartier général du prince d’Eckmühl. Quant aux ambulances, l’armée d’Allemagne doit être composée de cinq divisions, ou de cent bataillons, et de dix régiments de cavalerie. Vous pouvez d’après cette base organiser les ambulances. Faites-moi un rapport sur ce qui est nécessaire, sur ce qui existe, sur ce qui manque et d’où vous pensez le tirer; mais rien de tout cela n’est pressant.

Faites-moi connaître, administration par administration, ce qui est nécessaire pour ce corps d’armée. J’ai mis cinq chirurgiens par régi­ment, espérant qu’avec ce nombre le service se ferait; mais je vois qu’il n’en est rien, parce que ces chirurgiens restent au régiment et ne sont pas convenablement employés. J’attendrai le détail de tout cela pour vous donner des ordres.

Faites-moi connaître quand le 2e bataillon des équipages sera prêt et également où en est l’exécution des ordres que j’ai donnés pour le retour de plusieurs compagnies qui sont en Espagne.

 

Paris, 6 avril 1811

A Alexandre, empereur de Russie, à Saint-Pétersbourg

Monsieur mon Frère, aussitôt que j’ai appris par le duc de Vicence que le choix du comte Lauriston était agréable à Votre Majesté Im­périale, je lui ai donné l’ordre de partir. Je n’envoie pas à Votre Ma­jesté un homme consommé dans les affaires, mais un homme vrai et droit, comme les sentiments que je lui porte; et cependant je reçois chaque jour des nouvelles de Russie qui ne sont pas pacifiques. Hier, j’ai appris de Stockholm que les divisions russes de la Finlande étaient parties pour s’approcher des frontières du Grand-Duché. Il y a peu de jours, j’ai été instruit de Bucharest que cinq divisions ont quitté les provinces de Moldavie et de Valachie pour se rendre en Pologne, et qu’il ne reste plus que quatre divisions des troupes de Votre Majesté sur le Danube. Ce qui se passe est une nouvelle preuve que la répétition est la plus puissante figure de rhétorique : on a tant répété à Votre Majesté que je lui en voulais, que sa confiance en a été ébranlée. Les Russes quittent une frontière où ils sont nécessaires, pour se rendre sur un point où Votre Majesté n’a que des amis. Cependant, j’ai dû penser aussi à mes affaires, et j’ai dû me mettre en mesure. Le contre-coup de mes préparatifs portera Votre Majesté à accroître les siens; et ce qu’elle fera, retentissant ici, me fera faire de nouvelles levées : et tout cela pour des fantômes ! Ceci est la répé­tition de ce que j’ai vu en 1807 en Prusse, et en 1809 en Autriche. Pour moi, je resterai l’ami de la personne de Votre Majesté, même quand cette fatalité qui entraîne l’Europe devrait un jour mettre les armes à la main à nos deux nations. Je ne me réglerai pas sur ce que fera Votre Majesté : je n’attaquerai jamais, et mes troupes ne s’avanceront que lorsque Votre Majesté aura déchiré le traité de Tilsit. Je serai le premier à désarmer et à tout remettre dans la situation où étaient les choses il y a un an, si Votre Majesté veut revenir à la même confiance. A-t-elle jamais eu à se plaindre de la confiance qu’elle m’a témoignée ?

Je charge bien spécialement le comte Lauriston de lui dire com­bien je lui désire de bonheur, combien je suis contrarié de m’imaginer qu’elle éprouve des embarras et de la peine par les fausses notions qu’elle s’est laissé donner de ma politique et de mes senti­ments, et combien je serai heureux de la voir replacée dans la même route qu’à Tilsit et à Erfurt. Je prie Votre Majesté d’accorder une foi entière au comte Lauriston quand il lui dira que je veux la paix, que je n’envie rien à la prospérité de son empire, et qu’au con­traire je me complaisais à penser qu’elle s’était agrandie et avait retiré des avantages de mon alliance.

 

Paris, 6 avril 1811

A Charles Jean, prince royal de Suède, à Stockholm

Mon Cousin, j’ai reçu la lettre que vous m’avez adressée pour m’informer que Sa Majesté le roi de Suède, à la suite d’une indispo­sition grave, avait pris la résolution de vous confier l’administration du royaume. Cette circonstance, pénible pour votre cœur, vous offre l’occasion de montrer à la nation sur laquelle vous êtes appelé à régner ce qu’elle doit attendre de votre dévouement à sa gloire et à son bonheur. Je désire que vos efforts soient couronnés d’un heureux succès. Je vous renouvelle avec plaisir les assurances de mon estime et de mon amitié.

Napoléon.

 

Paris, 8 avril 1811

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, il est nécessaire d’écrire à M. de Saint-Marsan qu’il doit entretenir les ouvertures qui lui ont été faites pour un lien plus étroit entre la France et la Prusse; qu’il doit commen­cer par faire connaître que la situation de l’Europe n’est pas telle qu’on le croit relativement à la possibilité d’une rupture entre la France et la Russie, sans dissimuler cependant qu’il existe quelque froid entre les deux puissances ; que Sa Majesté n’en est pas moins sensible aux ouvertures du Roi ; qu’il est chargé de cultiver ces bonnes disposi­tions, d’en connaître l’étendue, d’en causer avec M. de Hardenberg, et de voir jusqu’où elles peuvent se concilier avec les idées de Sa Ma­jesté. Vous en parlerez dans le même sens à M. de Krusemark; vous lui direz : « Le comte de Saint-Marsan a écrit ceci. L’Empereur a été très sensible à cette ouverture; non pas que nous devions avoir k guerre avec la Russie, ce sont des bruits qui n’ont aucun fondement; mais enfin cette communication n’en a pas moins été très agréable. J’en écris à M. de Saint-Marsan, et j’entre avec lui dans de plus grands détails. » Vous devez vous expliquer dans les mêmes termes avec M. Alquier, et ici avec le ministre de Suède : « Nous sommes sensibles à ces ouvertures, nous désirons savoir ce que l’on veut. » Toujours en protestant et repoussant toute idée de possibilité de guerre avec la Russie.

 

Paris, 8 avril 1811

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, je ne sais pas si, dans le traité de Tilsit, je me suis réservé de faire communiquer des troupes du grand duché de Varsovie avec Danzig; je désire que vous fassiez des re­cherches à cet égard. Toutefois il faut écrire à mon ministre à Berlin de conclure un traité pour que cette communication soit réglée tant pour mes troupes que pour celles du Grand-Duché. Ces troupes payeront tout comptant. Il faut tracer la route la plus directe entre Thorn et Danzig par la rive gauche de la Vistule. Cette affaire est importante, et je désire qu’elle soit terminée promptement pour qu’il n’y ait plus d’embarras.

 

Paris, 8 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, j’ai retiré de Naples tous mes régiments français. Je n’y ai laissé que le 22e d’infanterie légère. Mon intention est de porter ce régiment à sept bataillons et d’en laisser six dans le royaume de Naples. Ces six bataillons, complétés à 840 hommes chacun et qui seront constamment maintenus à ce complet, feront plus de 5,000 hommes; ce qui formera une bonne division toute française pour le roi de Naples.

Vous voudrez donc bien ordonner les dispositions suivantes. Le 4e bataillon du 22e léger versera tous les hommes disponibles dans le 5e bataillon, qui, par ce moyen, se trouvera au complet de 520 hommes. Le major, qui doit se trouver au 5e bataillon, où est le dépôt, aura le commandement de ce bataillon, qui sera suffisant pour la défense de Nice et forts environnants. Les 4e et 6e bataillons seront formés et complétés par des conscrits réfractaires du 1er régi­ment de la Méditerranée, en prenant des hommes de choix et capa­bles de se faire honneur. Ces deux bataillons seront employés à la garnison de l’île d’Ischia. Aussitôt que cette opération sera faite et aura parfaitement réussi, vous m’en rendrez compte, et je ferai for­mer le 7e bataillon, de sorte qu’il y aura six bataillons complets de ce régiment dans le royaume de Naples.

Mon intention est que le 6e de ligne et le 14e léger soient égale­ment portés à sept bataillons. Le décret que j’ai pris explique suffi­samment mes intentions; je n’ai rien à y ajouter. Vous verrez qu’en conséquence des dispositions de ce décret je retire du 1er régiment de la Méditerranée, pour le 22e léger, 1,650 hommes; pour le 14e léger, 1,350; et du 2e régiment de la Méditerranée, pour le 6e de ligne, 2,150 hommes. Voilà donc l’emploi de 5,500 hommes. Le 1er et le 2e régiment de la Méditerranée peuvent chacun avoir 4,000 hommes. Voilà donc l’emploi des 13,500 conscrits des régi­ments de la Méditerranée.

Il serait peut-être convenable d’envoyer en Corse des boutons des 22e et 14e légers ainsi que du 6e de ligne, pour les attacher aux habits de ces hommes avant leur départ; ce qui serait une économie pour les régiments.

Vous voyez que j’aurai ainsi à Corfou six bataillons français, à Naples six bataillons français, et six pour garder les États Romains. Présentez-moi la nomination des majors en second, des chefs de bataillon et des sous-lieutenants à tirer de l’école de Saint-Cyr, et les différentes dispositions à ordonner en conséquence de mon décret. Écrivez au ministre de la marine pour les 500 hommes qu’il doit faire transporter de l’île d’Elbe à Cività-Vecchia.

 

Paris, 8 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Quatre bataillons de 800 hommes ne peuvent pas être commandés par un colonel. Je désire donc que vous me fassiez un rapport qui me fasse connaître ce qu’il en coûterait pour avoir un major en second à chaque régiment qui a quatre bataillons à l’armée. Je ne parle pas des régiments de l’armée d’Espagne, je ne parle que de ceux de l’armée d’Allemagne. Le prince d’Eckmühl a seize régiments de quatre bataillons chacun; je voudrais que les 1er et 2e bataillons fussent commandés spécialement par le colonel et les 3e et 4e bataillons spé­cialement par le major en second. Quand le régiment formerait une brigade, le général de brigade commanderait les quatre bataillons. Cette méthode parait être avantageuse pour le service à la guerre. Je désire savoir ce que cela coûterait, avant de l’étendre à toute la ligne. Cela aurait aussi l’avantage que, le colonel blessé ou tué, le régiment serait commandé par un officier ne tenant à aucun batail­lon, jusqu’à ce que le major arrive; car il est de principe que, le colonel manquant, le major doit commander le régiment.

 

Paris, 8 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Vous pouvez donner ordre à Danzig qu’on commence à travailler à l’équipage de pont, mais qu’il faut que ce soit sans affectation et de manière que cela ne fasse pas une nouvelle. Il suffit que cet équi­page soit fait avant le 1er janvier prochain. Vous aurez soin de recom­mander que le langage soit que ces pontons sont censés tenir à la défense de la ville.

 

Paris, 8 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Témoignez mon mécontentement au général Miollis de ce que le mont Circeo n’a pas encore de batteries de côte, de sorte qu’il y arrive à chaque instant des événements qui interceptent la communi­cation entre Naples et Cività-Vecchia. Donnez ordre que, vingt-quatre heures après la réception de votre lettre, il envoie des officiers du génie et d’artillerie y construire deux batteries armées de trois à qua­tre pièces de gros calibre et fermées à la gorge. Il fera servir et garder ces batteries par les troupes qui existent, et s’il n’y en a pas suffi­samment, par des troupes qu’il y enverra, de manière que ce point soit bien défendu.

 

Paris, 8 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, je vous envoie une note sur Raguse. J’accorde 200,000 francs cette année, sur les fonds de réserve, pour le fort Impérial sur le mont San-Sergio. Il doit être terminé dans l’année. Le comité doit donner les bases pour la construction de ce fort, afin qu’il remplisse son but et n’excède pas 200,000 francs. Il faut envoyer à Raguse un officier capable de faire les projets et de diriger les travaux. Il faut au moins trois ou quatre officiers pour signer le procès-verbal. Il sera joint à la commission des officiers du génie, des officiers de marine, pour déterminer les lieux où l’on pla­cera les cales et les établissements maritimes.

NOTE SUR RAGUSE.

L’importance de Raguse vient d’abord de sa bonne habitation ; ce sont des gens civilisés au milieu d’un pays barbare. Il faut les défen­dre, même avant de penser à en tirer aucun avantage. On y trouve des églises, de beaux édifices, résultat d’une grande prospérité, une ancienne enceinte de murailles qui a une grande valeur, enfin la rade entre l’île de Lacroma et Raguse, un petit port marchand et surtout les beaux ports du Val d’Orabla et du Val de Gravosa.

Il paraît qu’il n’y a rien à faire à l’enceinte de Raguse. L’île de Lacroma paraît en bon état. La presqu’île de Lapad n’a qu’un seul point où le débarquement soit possible. Entre le port de Gravosa et le point de débarquement il y a 400 toises. Il faudrait occuper cette presqu’île par un fort qui eût action sur le val de Gravosa par une batterie basse ; alors les batteries de l’anse de Lapad et autres dépendraient de ce réduit, qui n’en serait éloigné que de 400 toises. Ainsi, au lieu de mettre le fort de Lapad où on l’a projeté, trop près de l’anse de débarquement, je voudrais le mettre à mi-chemin de la presqu’île, avec deux batteries basses battant, l’une sur le Val de Gravosa, l’autre sur l’anse de débarquement.

Il n’y a rien autre à faire cette année que des projets en grands détails pour l’année prochaine, et des plans à grande échelle, bien cotés.

L’anse de Malfi, l’île de Calamota et les 1,600 toises de côté compris entre Zaton et le point de Mokoscizza exigent une étude particulière.

Si l’ennemi peut s’établir sur un de ces points et battre l’escadre, le port ne serait pas sûr. Il faut donc trois ou quatre forts qui barrent entièrement le passage et empêchent l’ennemi de venir s’établir sur la côte.

Des plans sur grande échelle, avec des dessins bien faits et des cotes, seront soumis au comité dans le mois de décembre. Il ne sera rien fait cette année.

Il parait que l’île de Daxa est en bon état.

Tout cela établi, il faut être maître du plateau de Posanka, qui s’étend le long du Val d’Ombla jusqu’à l’aqueduc, et de là jusqu’au fort Delegorgue ; c’est une étendue de 2,400 toises.

D’abord il faut disputer l’aqueduc le plus longtemps possible; il faut rester maître de la rade de Raguse ; il faut que quatre ou cinq vaisseaux puissent y rester si l’on a perdu les autres rades. D’ailleurs, une place comme Raguse doit avoir une activité de 1,500 toises autour d’elle. La place sera étudiée dans ce sens, et les projets présen­tés pour occuper le plateau depuis le fort Delegorgue, rester maître de l’aqueduc, empêcher l’ennemi de le faire sauter et de l’abattre à coups de canon, établir à cet effet des forts en pierre, casemates s’il est nécessaire, qui empêchent l’ennemi de pénétrer sur la hauteur et défendant bien la vallée. Il faut déterminer à quelle distance les hauteurs de l’autre côté dominent le plateau de Posanka.

Tout ce qu’on vient de dire ne doit s’exécuter que lorsque, le projet étant envoyé au mois de décembre, il sera bien convenu qu’une garnison de 4,000 hommes et une dépense de 4 millions peuvent donner une défense raisonnable au port et aux établissements de Raguse.

On doit supposer que l’ennemi débarque à Stagno ou à Raguse-Vieux; qu’il cheminera lentement pour faire les chemins, et que ce sera une expédition anglaise composée de 7 à 8,000 hommes de cette nation, réunis à un pareil nombre de gens du pays ou d’Autrichiens. Ce serait donc dix à douze vaisseaux de guerre mouillés à Stagno, Raguse-Vieux, ou aux bouches de Cattaro, et 7 à 8,000 hommes de troupes régulières et autant d’auxiliaires qui marcheraient sur Raguse.

Mais, dans toutes les hypothèses, le fort Impérial doit être occupé, puisque c’est le point qui domine à pic la ville.

Si donc on abandonnait l’idée de faire des constructions considé­rables à Raguse, la seule considération des habitants et de notre garnison exigerait qu’on construisît le fort Impérial.

200,000 francs seront accordés cette année sur les fonds de ré­serve. On enverra un officier du génie capable de faire ces projets et de diriger les travaux. Il faut au moins trois ou quatre officiers du génie pour signer le procès-verbal. Le fort Impérial doit être terminé dans l’année.

A la commission des officiers du génie il sera joint des officiers de marine pour déterminer les lieux où l’on placera les cales et les éta­blissements maritimes.

 

Paris, 8 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Je vois beaucoup d’inconvénient à former un 2e régiment de Walcheren; cela multiplie mes cadres à l’infini, lorsque j’ai des cadres en plus grand nombre que je n’en puis compléter. Je pense donc qu’il est préférable de choisir quatre cadres des 4e bataillons, de ceux dont les dépôts sont dans la 16e et dans la 24e division militaire, dont trois bataillons sont à l’armée d’Espagne, et d’envoyer ces cadres dans l’île de Walcheren, où on les complétera avec des conscrits réfractaires. Par ce moyen j’aurai quatre bataillons qui me défen­draient ces îles; je n’aurais pas de nouveaux cadres, et l’administration des bataillons existant dans les 16e ou 24e divisions militaires les habillerait, sans qu’ils me donnent aucun soin.

Je vous ai mandé également que je voulais former un bataillon de canonniers de Walcheren. Cela peut avoir de l’inconvénient et me constituerait en dépense. Comme mes compagnies d’artillerie ne sont pas complètes, il serait préférable de prendre trois cadres du 8e régiment, un cadre du 9e et d’avoir ainsi quatre compagnies, qui se­raient administrées par les dépôts des 8e et 9e régiments d’artillerie. Cela ne me ferait aucune dépense, et on saurait que ces compagnies ne doivent pas sortir de Walcheren.

Je voudrais faire la même chose pour Belle-Île, en prenant le cadre des compagnies qui sont à Rennes, et pour les îles de Ré et d’Oléron, en prenant des cadres des compagnies d’artillerie qui sont à Toulouse.

Même chose en Corse, en prenant des cadres des compagnies du 4e régiment.

Sans aucune nouvelle dépense, sans faire aucune nouvelle formation, j’aurai pourvu à la défense de mes îles.

Je vous ai mandé d’ordonner au général Donzelot de recruter ses compagnies de canonniers, de sapeurs et mineurs avec les conscrits réfractaires qu’il a reçus.

Enfin je retirerai deux compagnies d’artillerie des quatre que j’ai à Naples, et je les compléterai avec des conscrits réfractaires.

Voilà le système que j’adopte et qui me parait de beaucoup préférable.

Quelque chose qui arrive, je n’augmenterai plus les cadres des régiments de conscrits réfractaires. J’aurai un régiment dans l’île de Walcheren, deux en Corse, un à Belle-Île et un dans l’île de Ré, et je pourvoirai au recrutement de ces cinq régiments par des conscrits réfractaires de la manière que je viens de déterminer.

 

Paris, 8 avril 1811

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Je désire que vous vous fassiez mettre sous les yeux les renseigne­ments et les cartes des canaux qui vont de Danzig à Elbing, et du Haff qui de Danzig va à Kœnigsberg. Vous pouvez causer avec les marins de la Garde qui ont été à Danzig et ont navigué sur le Haff, afin de réunir le plus de renseignements et vous mettre en état de me faire un rapport sur la flottille qu’il devient indispensable que j’organise à Danzig. Je désire avoir en réserve à Danzig une flottille telle, qu’elle puisse se rendre par la Vistule à Elbing lorsqu’on serait maître de cette place; que là on puisse l’armer et la faire naviguer dans le Haff; qu’elle puisse me rendre maître du Haff jusqu’à Kœ­nigsberg et servir à bloquer la forteresse de Pillau ; qu’elle puisse aussi sortir par l’embouchure du Haff sur Danzig et faire des incur­sions par mer; enfin qu’elle puisse défendre la rade de Danzig, se porter côte-côte vis-à-vis Kœnigsberg, jusqu’à Memel et même plus loin.

Ainsi le mémoire à faire est compliqué. 1° II faut d’abord con­naître quels sont les bâtiments les plus propres à la navigation de la Baltique; 2° voir quel est le tirant d’eau du Haff et l’espèce des bâti­ments qui peuvent servir. Aussitôt que vous aurez des renseignements et cartes sur les bâtiments dont se servent les Suédois et Russes sur les Sunds, je viendrai à fixer mes idées là-dessus. Pour vous mettre à même de me comprendre, voici quelles sont mes instructions : Si je venais à avoir la guerre avec la Russie, une grande partie de mes moyens serait employée, et je n’aurais plus l’espoir de faire une guerre sérieuse sur mer. Une division de vaisseaux à Brest, une à Toulon et quelques frégates seraient suffisantes. Je pourrais avoir disponibles 10 à 12,000 matelots que j’utiliserais en établissant une grande guerre sur la Baltique, en ayant une flottille qui puisse se porter jusqu’à Kœnigsberg, qui inquiète l’ennemi sur les côtes de la Finlande, sur­tout si l’on considère qu’il est probable que dans une guerre contre les Russes on aurait les Suédois pour soi, si l’on considère aussi que la Baltique est une mer si étroite que les Anglais ne peuvent s’y tenir partout, surtout au commencement et à la fin de la saison. De là l’idée d’avoir une flottille qui me rende maître du Haff, qui se transporte jusqu’au delà de Kœnigsberg et qui puisse rôder dans la Baltique.

Prenez aussi des renseignements sur le Haff qui est à l’embouchure de l’Oder, pour savoir quelle espèce de bâtiments il faudrait sur ce Haff pour communiquer.

Étant dans l’intention de ne plus me dessaisir de Danzig, qui est mon boulevard du Nord, je désire avoir, entre Lubeck, Wismar, Rostock, Stettin et Danzig f des moyens de troubler le commerce anglais, d’être plus fort que les Prussiens, d’appuyer et de seconder les Suédois, enfin, dans tout état de choses, d’armer une puissante flottille avec des bâtiments qui puissent servir de corsaires.

Le principal est que vous preniez d’abord des renseignements sur tout cela, et nous en causerons ensuite ensemble, car je puis seul décider un parti définitif à prendre là-dessus; mais il faut d’abord que vous ayez des éléments pour m’éclairer.

 

Paris, 8 avril 1811

Au général Duroc, duc de Frioul, grand-maréchal du palais, à Paris

Tout ce qu’il y a de chasseurs à Rueil, il faudrait le placer à l’École militaire, de sorte que ces chasseurs occupent l’École mili­taire et Panthemont. Il faudrait que tous les grenadiers fussent à Courbevoie et à la caserne Bonaparte, de manière à avoir 800 places vides à Rueil, 800 places à Courbevoie et 1,200 places vides à Saint-Denis; ce qui ferait 2,800 places, qui seront suffisantes pour les conscrits à recevoir.

Les vélites hollandais qui sont à Saint-Denis iront à Versailles; ce qui réunira tous les Hollandais dans cette ville.

Tout ce qu’il y a de marins à l’École militaire sera envoyé à Vincennes.

Ces changements suffiront pour les besoins du moment, et par ce moyen j’aurai entre Courbevoie, Rueil et Saint-Denis les deux régi­ments provisoires de la jeune Garde que je veux faire.

Il est nécessaire que vous me fassiez un rapport général sur le casernement de la Garde, que je vois très embarrassé. J’ai fait, cette année, augmenter la caserne Bonaparte : combien cela donne-t-il d’augmentation ? 11 faudrait aussi augmenter la caserne de l’École militaire; c’est là le véritable emplacement de la Garde. Faites-moi un projet là-dessus.

 

Paris, 9 avril 1811

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mou Cousin, je désire que vous fassiez partir ce soir le fils du sénateur Porcher, aide de camp du prince d’Essling. Il sera porteur de plusieurs exemplaires du Moniteur d’aujourd’hui, que vous adres­serez au prince d’Essling, au duc d’Istrie, et au général Caffarelli.

Vous manderez au prince d’Essling qu’une estafette ayant été prise, il est à craindre qu’elle ne portât des dépêches de lui, parce que, entre celles qu’a apportées le colonel Pelet et celle écrite le 27 de Guarda, on n’en a reçu aucune.

Vous enverrez par cet aide de camp au prince d’Essling un dupli­cata du travail d’hier. Vous lui ferez connaître que j’ai donné le commandement de la 1e division du 6e corps au général Foy; qu’ainsi il n’y a pas lieu à nommer le général Maucune général de division ; qu’il doit presser l’armement d’Almeida, puisqu’il paraît qu’il faut beaucoup de temps pour démolir cette place et en évacuer l’artillerie.

Vous lui prescrirez de presser le départ du général Drouet avec son corps pour l’Andalousie, par le plus court chemin. Cela est très important, car il est à craindre que les Anglais ne tentent tout pour faire lever le siège de Cadix. Il doit prendre des mesures pour couvrir Almeida et Ciudad Rodrigo, et d’un autre côté se mettre en com­munication avec Madrid et avec Séville, pour combiner ses opé­rations avec l’armée d’Andalousie et secourir cette armée.

Vous écrirez par le même officier au duc d’Istrie pour qu’il presse le départ de tous les régiments provisoires qui doivent se rendre en Andalousie, car il paraît que c’est de ce côté que l’ennemi tourne tous ses efforts.

Vous renouvellerez les ordres que j’ai donnés pour les estafettes.

Vous enverrez des Moniteur à Madrid et au duc de Dalmatie. Vous ferez connaître à Madrid qu’il est très nécessaire de se mettre en communication avec le prince d’Essling; qu’il était le 27 à Guarda, pro­longeant sa gauche sur Alcantara; qu’il a besoin de poudre, de munitions et de vivres, et qu’il faut tâcher de lui en procurer par Alcantara et Placencia.

Vous ferez connaître au général Belliard que nous attendons avec impatience des nouvelles d’Andalousie; que le 3e corps, sous les ordres du général Suchet, a été renforcé de 16,000 hommes, et que, dans le courant de mai, ce général compte entreprendre le siège de Tarragone, entreprise difficile à cause du manque de vivres, mais décisive, par la soumission de ces provinces, qui en sera la suite; que le général Quesnel est enlré à Pnyccrda et manœuvre pour assiéger Urgel; que Campo Verde, alliré dans un piège jusque dans les fossés de la place de Monjuich, a perdu 3,000 hommes.

Vous manderez au général Belliard qu’il est nécessaire de pousser des patrouilles sur Cordoue, aGn de se procurer des nouvelles de l’armée d’Andalousie.

Vous écrirez au duc de Dalmatie, en lui envoyant des Moniteur, pour lui faire connaître que le général Suchet, dont le corps est ren­forcé de 16,000 hommes, va entreprendre le siège de Tarragone, et que, cette place prise, cette armée, qui est très belle, deviendra dis­ponible. Vous lui ferez connaître la position du prince d’Essling, la nécessité de se mettre en communication avec cette armée, dont le principal but est de contenir lord Wellington et de combiner ses opé­rations avec l’armée du Midi. Vous lui écrirez par duplicata pour l’informer de la marche du général Drouet sur l’Andalousie. Si vous avez un chiffre avec lui, vous lui écrirez en chiffre que deux frégates françaises et une gabare de 800 tonneaux, chargées de munitions de guerre et de 600 conscrits de débarquement, sont parties de Toulon pour Malaga; que cette expédition contient des bombes et les munitions nécessaires pour le siège de Cadix ; qu’elle est partie le 4 avril de Toulon et a été prendre des troupes à Porto-Ferrajo. Si vous n’avez pas de chiffre, vous vous contenterez de dire cela de vive voix à l’officier qui le redira au duc d’Istrie, lequel le fera redire au duc de Dalmatie par un officier qu’il lui enverra. Il suffira de mettre sur un calepin : « deux frégates et une flûte de 800 tonneaux, bombes et boulets, 600 conscrits, Porto-Ferrajo, Malaga, 4 avril. » Ces indications seront suffisantes.

Vous ferez connaître au duc de Raguse que j’ai nommé le général Foy pour commander la 1e division du 6e corps. Vous donnerez ordre à ce général de se tenir prêt à partir.

Expédiez toutes ces dépêches. Quand tout cela sera expédié, vous viendrez aux Tuileries à six heures ou à six heures et demie avec l’instruction générale, que vous ferez partir demain par un autre offi­cier que vous enverrez au prince d’Essling.

Portez-moi en même temps les propositions d’avancement et de récompenses.

 

Paris, 11 avril 1811

Au comte Mollien, ministre du trésor public, à Paris

Monsieur le Comte Mollien, je reçois votre rapport du 10 avril, dans lequel vous me faites connaître qu’il y a 12 millions qui n’ont pas été dépensés sur les subsides d’Italie pour 1809 et 1810. Je pense que vous serez d’abord obligé de prendre sur ce fonds 4 mil­lions environ pour l’arriéré d’Illyrie, et vous pouvez déjà commencer par faire vos dispositions en conséquence. La caisse du domaine extraordinaire aura à payer tous les ans à l’administration des mines d’Idria 4 à 500,000 francs, dont elle sera remboursée en mercure et autres produits qui restent déposés à Trieste. Vous pourriez vous arranger à ce sujet avec le trésor du domaine extraordinaire et faire faire pour son compte les payements à la caisse d’Idria.

Enfin le budget de la marine pour Venise n’était que de 2 mil­lions; je viens de le porter à 3 millions, et j’écris au ministre de la marine qu’il peut ordonnancer largement pour ce service. C’est un troisième débouché offert aux fonds que vous avez en Italie; non seulement les dépenses de 1811 ne s’accroîtront pas dans les dépar­tements français au delà des Alpes, mais il est même présumable qu’elles diminueront. Il est vrai que le subside sera diminué de 2 mil­lions. La quantité nominale de 30 millions sera maintenue ; mais j’ai ordonné que sur ce fonds le trésor prendrait 2 millions en actions sur le Monte-Napoleone, qui sont disponibles.

Faites-moi connaître comment vous faites le service de la Corse et de l’île d’Elbe. Au lieu de Toulon, vous pourriez le faire par Livourne.

 

Paris, 11 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Il faut mander au roi de Naples que je n’entends pas qu’il permette à mes généraux de quitter l’armée sans ma permission; que c’est contraire à toutes les règles.

 

Paris, 11 avril 1811

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

J’ai porté à 3 millions le budget de la marine de Venise, qui, dans le budget général de cette année, ne figurait que pour 2 millions. Vous êtes le maître d’ordonnancer tant que vous voudrez pour ce service, et même à l’avance, vu que le trésor a une douzaine de mil­lions en stagnation en Italie, et qu’on ne peut pas retirer ces fonds sans faire des pertes de change. Cette dernière considération est telle, que je voudrais dépenser 2 millions de plus à Trieste et à Venise, si je pouvais le faire utilement. Je pense que, si je ne pouvais pas avoir trois vaisseaux à Malamocco à la fin de septembre, il faudrait au moins en avoir deux. Écrivez dans ce sens à Venise.

L’équipage du Rivoli est déjà fait. Celui de l’autre vaisseau, soit qu’on le compose de Français, soit qu’on le compose d’Italiens, sera facilement fait. Mon intention est donc que ces deux bâtiments de guerre, plus l’Uranie et la Princesse-de-Bologne, puissent être  à Malamocco au mois de septembre; cette division pourrait sur-le-champ cingler pour Ancône ou pour toute autre destination. Au mois de novembre ou au mois de décembre on mettrait le troisième bâti­ment à la mer.

 

Paris, 11 avril 1811

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

La Pallas, l’Hortense et l’Elbe devront être probablement envoyées en novembre prochain à Batavia. Il est donc convenable de les tenir dans la situation où elles sont, de sorte qu’en peu de jours elles puis­sent reprendre le même changement et se rendre à leur destination.

Soit que la sortie de ces frégates ait lieu en novembre par un coup de vent, soit qu’elle ait lieu en conséquence des dispositions qui seront faîtes pour faire sortir mes vaisseaux de Rochefort, soit enfin qu’elle ait lieu par un débloquement, les nouvelles que nous recevrons d’ici en octobre nous apprendront le parti qu’ont pris les Anglais sur Batavia.

Je pense que la Pregel doit être armée en guerre, afin d’avoir une division mobile de deux frégates, d’une corvette et d’un vaisseau dans le port de Brest. Les équipages doivent être constamment à bord, et les bâtiments appareiller fréquemment.

A Cherbourg, la corvette la Diane, la frégate l’Iphigénie et les deux vaisseaux que j’ai dans ce port doivent former le simulacre d’une expédition sur les îles de Jersey et Guernesey. Il faut que les équi­pages n’aient point de communication avec la terre, que tout le monde reste jour et nuit à bord, et que les bâtiments fassent de fréquents appareillages.

Je suppose que vous préparez les deux frégates de Nantes pour les expédier à Batavia au mois de novembre prochain.

 

Paris, 11 avril 1811

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

J’ai nommé le vice-amiral Allemand commandant de mon escadre de Lorient. Cette escadre doit être de cinq vaisseaux. Il y en a deux à Brest et deux qui vont être terminés à Lorient. Lorsque les vaisseaux de Lorient seront réunis à ceux de Brest, cela pourra faire, au mois d’octobre, un commencement d’escadre à Brest.

Je tiens toujours au projet de former des équipages pour les six vaisseaux de Rochefort, afin d’obliger l’ennemi à tenir six vaisseaux dans ces parages, ou bien d’être toujours à même de faire sortir les nôtres. Vous donnerez pour instruction au vice-amiral Allemand de faire exercer ses équipages, de les empêcher de communiquer avec la terre, et enfin de faire des sorties toutes les fois que cela sera pos­sible. Fournissez-lui des péniches et autres petits bâtiments pour que ses équipages puissent s’exercer, même quand les vaisseaux ne pourraient pas appareiller.

P.S. Je désire bien que vous puissiez aussi fournir à l’escadre de Lorient une ou deux frégates.

 

Paris, 11 avril 1811

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Il est nécessaire que la navigation des bâtiments qui portent des conscrits en Corse varie. Il faudrait qu’ils se dirigeassent tantôt sur Ajaccio, tantôt sur Sagone, tantôt sur le golfe de Valinco, tantôt sur Calvi, et qu’à cet effet ils allassent reconnaître la Corse sur différents points. La navigation naturelle paraît être de reconnaître un promon­toire rouge qui est entre Calvi et Saint-Florent. C’est le point le plus rapproché de France, et c’est là que les croisières ennemies attendent nos bâtiments. S’ils faisaient route à mi-canal en remontant vers Mahon, en longeant la Corse parallèlement et venant ensuite recon­naître les Sanguinaires pour entrer à Ajaccio, ou les points entre Ajaccio ou Bonifacio, cela déjouerait les croisières ennemies. Faites faire une instruction là-dessus par les gens du métier.

 

Paris, 11 avril 1811

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Paris

Mon Fils, je désirerais que les vaisseaux le Rivoli, le Saint-Ber­nard et le Regeneratore, et les frégates Uranie et la Princesse-de-Bologne, fussent réunis ensemble à Malamocco en juillet et août, pour sortir les uns après les autres, en mettant le moins d’intervalle possible, et ayant pour refuge les ports de Pola, de Cattaro, de Raguse, mais, sur l’observation qui m’est faite qu’il est difficile que les trois vaisseaux soient finis pour le mois d’août, et vu la nécessité de profiter de ce mois pour faire une expédition qui présente beau­coup plus de chances et d’intérêt local, si d’ailleurs il n’y a pas de vaisseaux ennemis dans l’Adriatique, je désire que tous les efforts soient portés sur le Rivoli et sur l’un des deux vaisseaux le Mont-Saint-Bernard ou le Regeneratore; que ces vaisseaux et la Princesse-de-Bologne et l’Uranie soient tous les quatre rendus le 15 août à Malamocco, avec les chameaux disposés pour franchir la passe et aller compléter leur armement soit sur Pola, soit sur Ancône, selon les événements. Celui des deux vaisseaux qui n’aura pu être prêt au 15 août le sera au 15 novembre. Je vous prie de donner des ordres dans ce sens. Vous me ferez connaître lequel des deux vaisseaux, le Mont-Saint-Bernard ou le Regeneratore, pourra être fini le premier, et sur lequel on concentrera tous les moyens. Si c’est le Mont-Saint-Bernard, qui est un vaisseau français, il est nécessaire que le ministre de la marine en soit instruit pour pourvoir à son équipage.

Faites-moi connaître si l’on a viré en quille l’Uranie et dans quelle situation se trouvent les deux frégates.

 

Paris, 12 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, il est bien important d’organiser la 34e légion de gendarmerie, qui doit se réunir à Hambourg. Je crois qu’elle doit être de 468 hommes, non compris les officiers. Au 25 mars il y avait 150 hommes présents, et en route, provenant des légions de l’intérieur, 174 hommes. Il reste à fournir de vos régiments 83 hommes. Il faut les faire fournir dans les vingt-quatre heures de la réception de cette lettre. Enfin il reste à fournir par les indigènes 78 hommes; faites-les fournir sans délai. Par ce moyen votre légion de gendar­merie sera complète. C’est le colonel Saunier qui est chargé de cette organisation. Allez donc de l’avant et pressez l’opération.

Rendez-moi compte si les trois capitaines et les lieutenants qu’on a choisis parlent allemand ; il me semble que cette condition est fort importante.

 

Paris, 12 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Paris

Mon Cousin, je réponds à votre lettre du 7 sur la marine ; il faut aller doucement avec la marine; c’est une arme très compliquée, et l’on a bientôt dépensé un million sans obtenir de résultat. Les bâti­ments que vous voulez prendre ne marcheront pas et ne seront alors d’aucune utilité. J’ai envoyé votre lettre au ministre de la marine et je lui ai prescrit de correspondre là-dessus avec le vice-amiral Ver Huell.

 

Paris, 12 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, vous m’avez fait des observations sur l’organisation de votre artillerie. 1 Vous m’avez dit qu’il fallait trois caissons pour l’approvisionnement simple d’un obusier; effectivement un obusier de 6 pouces avait trois caissons qui portaient 156 coups; mais j’ai réglé qu’un obusier de 5 pouces 6 lignes n’aurait que deux caissons, parce que deux caissons contiennent 144 coups et que la différence est peu de chose. 2° La seconde observation est relative à l’équipage de pont et à l’organisation des pontonniers ; il y sera pourvu par l’organisation de l’armée. 3° Vous allez recevoir des conscrits qui remédieront à l’incomplet de vos compagnies d’artillerie et les porteront à 140 hom­mes. 4° Vous vous plaignez du petit nombre d’officiers du bataillon du train et demandez trois bataillons du train; je vous ai déjà mandé que je ne pouvais vous en envoyer que deux ; mais l’état-major va être changé et considérablement augmenté.

 

Paris, 12 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, je reçois votre lettre du 7 avril. J’ai lu la lettre re­lative au régiment du grand-duché de Berg. Les événements ne sont pas aussi pressés que vous le supposez. Vous aurez six bataillons de Berg, avec l’artillerie et tout ce qui est nécessaire, avant le mois de juillet, et cela est suffisant. Vous aurez pour le même temps vos 4e bataillons. Je viens de prendre un décret pour former un 6e ba­taillon à tous vos régiments. Le ministre de la guerre vous transmettra ces dispositions. J’ai également attaché un major en second aux bataillons de guerre de vos régiments; le colonel commandera en ligne les deux premiers bataillons, et le major en second comman­dera les 3e et 4e bataillons. Mon intention, je vous l’ai déjà mandé, est qu’après le mois de septembre votre corps soit de six divisions, chaque division de trois régiments, chaque régiment de cinq batail­lons de guerre, formant une brigade, et de trois à quatre bataillons auxiliaires; ce qui ferait de cent dix à cent quinze bataillons. Mon intention est également d’augmenter votre corps de deux brigades de cavalerie légère. Alors je vous donnerai trois bataillons du train, au lieu de deux; mais il faudra augmenter votre artillerie en conséquence. La chose principale aujourd’hui est de garnir Danzig. Le régiment bavarois y arrivera dans les premiers jours de mai. Celui de Wurtemberg sera réuni le 16 ; il recevra vos ordres et sera arrivé à Danzig à la fin de mai. J’aurai donc complet à Danzig tout ce que j’ai désiré y avoir. Je vous envoie la composition du régiment wurtembergeois.

 

Paris, 12 avril 1811

A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel

Mon Frère, vous avez bien fait de ne pas envoyer vos deux pièces d’artillerie avec vos régiments pour aller à Danzig, puisque vous avez peu d’artillerie; mais il est nécessaire que vous formiez deux compa­gnies d’artillerie à l’instar des régiments français; vous fournirez les chevaux. J’ordonne qu’on leur donne à Danzig deux pièces avec les caissons. En général, cette méthode serait bonne à établir dans tous vos régiments. Une compagnie d’artillerie ayant ses caissons d’in­fanterie et d’artillerie, un caisson pour porter le pain et un pour la comptabilité, offre beaucoup d’avantages, car partout où va un régi­ment on a besoin d’artillerie. Quant à l’artillerie qui vous manque pour cette organisation, vous n’avez qu’à m’en faire la demande; je vous la donnerai.

 

Paris, 13 avril 1811

Au comte Montalivet, ministre de l’intérieur, à Paris

J’ai fixé au 2 juin prochain le baptême du roi de Rome, qui sera célébré dans l’église métropolitaine de Notre-Dame de Paris, à laquelle moi et l’impératrice nous nous rendrons solennellement pour y assister et pour rendre grâces à Dieu sur sa naissance. Après la cérémonie de Notre-Dame, j’irai dîner à l’hôtel de ville de ma bonne ville de Paris, et je verrai tirer un feu d’artifice. Le même jour il sera chanté un Te Deum dans tout l’Empire. Je désire que les fêtes et réjouissances aient lieu en même temps et suivant le mode que vous m’avez proposé, et que pour cela vous adressiez des instructions aux maires des communes en leur fixant les sommes qu’ils peuvent dépenser à ces fêtes. Vous me présenterez la note des mariages que chacune des principales villes pourrait faire en dotant des filles pauvres et orphelines et les unissant à des anciens militaires. Mon inten­tion est aussi que vous convoquiez pour le baptême du roi de Rome les maires des bonnes villes, qui seront accompagnés, chacun, par deux députés choisis parmi les principaux du conseil général. Vous allouerez à chacun les indemnités nécessaires pour les frais de leur voyage, de manière que pendant leur séjour à Paris ils puissent y paraître d’une manière convenable et faire porter à leurs gens la livrée des villes qu’ils représenteront.

 

Paris, 14 avril 1811

Au général Duroc, duc de Frioul, grand-maréchal du palais, à Paris

Vous remettrez l’instruction ci-jointe au sieur Mortemart. Vous lui donnerez des conseils généraux sur la manière dont il doit se conduire. Il faut qu’il ne fasse aucun embarras; sa femme même doit ignorer où il va. Il doit seulement dire qu’il est absent pour un mois.

 

AU BARON DE MORTEMART, CAPITAINE,  OFFICIER D’ORDONNANCE DE L’EMPEREUR, À PARIS.

Monsieur Mortemart, le régiment de Walcheren est composé de cinq bataillons et doit avoir en ce moment 5 à 6,000 hommes de conscrits réfractaires. Vous trouverez ci-joint l’état des effets d’habil­lement partis de Paris et de Lille pour ce régiment. Vous vous rendrez en toute diligence à Flessingue pour vérifier cet état.

Avant d’arriver à Flessingue, vous visiterez le fort Impérial, le fort Napoléon et la batterie du Centre dans l’île de Cadzand; vous me ferez connaître la situation de ces forts. Vous compterez les bou­ches à feu en batterie; vous me rendrez compte du nombre de pièces de 48 et du nombre de plates-formes qu’a chaque mortier à plaque. Vous me ferez connaître la situation des troupes qui sont dans l’île de Cadzand et l’emploi qu’on fait des différentes compagnies et détache­ments des sapeurs, des pionniers français et étrangers, des déserteurs qui s’y trouvent, et s’ils sont organisés en bataillon. Vous reconnaî­trez si les chaloupes canonnières peuvent entrer dans le port de Breskens, combien de chaloupes et de bateaux canonniers ce port peut contenir, combien il y a d’eau dans les hautes mers.

Vous passerez après cela à Flessingue. Vous verrez le général Gilly, commandant l’île de Walcheren; vous verrez le colonel du régiment de Walcheren, et vous m’enverrez un rapport qui m’in­struira, 1° si la quantité de drap qui est annoncée est arrivée; 2° si les habits confectionnés sont bons; 3° si l’on annonce l’époque à laquelle le reste des effets arrivera. Vous passerez les journées, depuis la pointe du jour, à visiter les casernes. Vous verrez faire l’exercice aux conscrits réfractaires. Vous m’enverrez un rapport sur le régiment, bataillon par bataillon; vous me manderez si les chefs de bataillon sont arrivés, si tous les officiers sont arrivés, ceux qui ont donné de leurs nouvelles et ceux dont on n’a pas entendu parler; quel est le nombre des sous-officiers arrivés, de quels corps ils sor­tent, si ce sont de bons ou de mauvais sujets; quelle est la quantité de conscrits réfractaires arrivés, quelle volonté ils ont, si ce sont de beaux hommes; combien il y a de malades, comment ils sont casernés. Vous me parlerez aussi de la quantité de fusils qui sont arrivés.

Vous me rendrez compte de ce que vous auront dit le général Gilly, le colonel, et de ce que vous aurez vu par vous-même, en me faisant connaître l’opinion du général, celle du colonel et celle que vous aurez été à même de prendre sur ce que vous aurez vu.

Vous irez successivement à Middelburg, à Veere et dans les lieux où sont cantonnés les différents bataillons. Tous les jours vous m’enverrez un rapport pour me parler de l’état de la désertion et sur les précautions qu’on prend pour l’empêcher. Vous me parlerez de l’hô­pital militaire de Middelburg que vous visiterez plusieurs fois. Vous me ferez également un rapport sur la cavalerie et sur le service de la gendarmerie. Vous donnerez un coup d’oeil sur la manière dont les douanes font leur service. Quand vous m’aurez satisfait sur toutes ces questions, vous jetterez un coup d’oeil sur les travaux de la marine. A-t-on commencé le magasin général, ou qui empêche de commencer les travaux ? A-t-on travaillé à l’écluse ? Sait-on si le radier a souffert, ou quand le saura-t-on ? Travaille-t-on au quai que les Anglais ont démoli ? Quand sera-t-il rétabli ?

Vous m’enverrez tous les jours le mouvement de la rade. Vous me ferez connaître où sont mouillés les bâtiments de l’escadre, ceux de la flottille, ce qu’on signale des croisières ennemies et les bâtiments de guerre qui mettront tous les jours à la voile.

Vous m’enverrez après cela un rapport sur les travaux du génie. Travaille-t-on au fort Montebello, au fort Saint-Hilaire ? Combien y a-t-il de tombereaux employés ? Combien d’hommes du pays, de pri­sonniers, de sapeurs, de pionniers de toute espèce ?

Vous me ferez connaître la situation des différents camps que j’ai ordonnés sur les dunes, et s’ils se sont bien conservés pendant l’hiver.

Tous les soirs vous rédigerez le rapport de ce que vous aurez vu et fait dans la journée.

Vous pourrez aller à bord de mon escadre voir l’amiral Missiessy, lui demander s’il a quelque chose à me faire dire.

Vous observerez l’esprit public du pays. Vous verrez le maire de Flessingue pour savoir si les indemnités que j’ai accordées à la ville ont été payées et si l’on rétablit les maisons, si cela se fait conformé­ment à mes décrets. Vous verrez le préfet, les sous-préfets, et vous me transmettrez ce que vous en apprendrez.

Quand vous aurez passé une quinzaine de jours dans l’île de Walcheren et que vous m’aurez envoyé une quinzaine de rapports, vous passerez dans l’île de Schouwen. Vous visiterez la place de Zierikzee, vous verrez dans quelle situation est cette place, et vous vous infor­merez de ce que le commandant aura à me dire.

Vous repasserez à Veere et vous viendrez à Goes, Tholen, Berg-op-Zoom. Vous séjournerez deux jours à Goes pour visiter l’île de Sud-Beveland, prendre des renseignements sur l’administration, la police, le militaire, et sur ce qui est relatif à la contrebande. Vous verrez dans quelle situation est la place de Tholen. Vous vous arrêterez assez de temps pour vous mettre en état de me rendre compte de l’esprit et de la manière de servir des corps qui sont dans les îles de Schouwen, de Sud et Nord-Beveland et à Berg-op-Zoom. Vous irez jusqu’à Bath, et vous m’enverrez par la poste d’Anvers les mêmes renseignements sur ce point que sur les îles que je viens de nommer. Vous rentrerez après cela dans l’île de Walcheren.

Je suppose que cette mission vous conduira au 10 ou 15 mai; à cette époque vous recevrez de nouveaux ordres de moi dans l’île de Walcheren. Vos rapports me seront adressés directement; vous les enverrez sous le couvert du duc de Frioul, auquel vous pourrez écrire sur ce qui vous sera particulier dans cette tournée.

Vous m’écrirez de Flessingue pour m’informer si les cadres des 3e et 4e compagnies du 5e bataillon des 65e, 72e, 19e, 43e, 27e et 22e sont arrivés pour prendre des conscrits réfractaires du régiment de Walcheren, et de là passer dans les îles de Schouwen et de Goeree; ou, s’ils ne sont pas arrivés, quand ils arriveront; ce qui manque d’officiers ou de sous-officiers dans les cadres, et si l’on peut y avoir confiance.

 

Paris, 14 avril 1811

Au général comte de La Riboisière, premier inspecteur général de l’artillerie, à Paris

Monsieur le Général Comte la Riboisière, je vous envoie deux rap­ports du ministre de la guerre sur l’organisation de l’artillerie, telle que je l’ai demandée. Je suppose trois corps d’armée, chacun de seize régiments, ce qui forme quarante-huit régiments, chacun à quatre bataillons. Je suppose quatre divisions de cuirassiers, ayant chacune douze pièces d’artillerie à cheval. Faites-moi vos observations sur le plan proposé tant pour les bouches à feu que pour le personnel et les attelages d’artillerie. L’expérience des deux campagnes d’Autriche et de la campagne de Pologne doit vous avoir fait connaître ce qui est nécessaire. Je crois qu’il faut avoir à Danzig et dans les autres places, confectionné et non confectionné, de quoi faire cinq approvisionnements. Ne parlez de ce travail à personne, pas même au ministre de la guerre. Aussitôt que vous l’aurez fait, venez me l’apporter, afin que j’arrête mes idées là-dessus.

Paris, 15 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

J’ai lu votre travail sur l’organisation de l’artillerie de l’armée d’Allemagne. Il faut quarante-quatre compagnies d’artillerie à pied pour l’équipage d’artillerie des trois corps d’armée, sans y compren­dre la Garde. Ces compagnies seront formées de la manière suivante : les 1e, 3e, 17e et 2e compagnies du 1er régiment d’artillerie; les 6e, 11e et 3e du 3e d’artillerie; quatre compagnies du 4e d’artillerie; les 2e, 3e 13e, 14e et 22e du 5e d’artillerie à pied, ce qui, joint aux six compagnies qui sont en Allemagne, complétera à onze les compagnies que fournit ce régiment; les 1e, 6e, 8e et 18e du 6e régiment; les 7e et 5e du 7e régiment, ainsi que les treize compagnies déjà en Alle­magne; les 3e, 8e, 12e, 13e, 14e et 22e du 8e régiment; trois des six compagnies du 9e régiment qui sont actuellement à Hambourg; les trois autres resteront pour la défense des côtes de Hambourg.

Résumé : quatre compagnies du 1er régiment, onze du 5e, trois du 3e, quatre du 4e, quatre du 6e, quinze du 7e, six du 8e et trois du 9e: total, cinquante compagnies d’artillerie. Il n’en faut que qua­rante-quatre; c’est donc six compagnies de plus. Tous les hommes disponibles dans les autres compagnies de ces régiments seront déta­chés pour compléter ces compagnies. Les conscrits qui arrivent seront chargés de compléter les cadres des compagnies qui restent.

Le service de Walcheren sera fait par une compagnie du 9e et qua­tre du 8e qui seront envoyées. Les cadres de chaque compagnie n’auront que dix canonniers ; le reste sera complété par les conscrits réfractaires les plus beaux, les plus grands et de meilleure volonté.

Le 6e régiment enverra un cadre à l’île de Ré, à l’île d’Aix et à Belle-Île. Ces trois compagnies seront complétées par les conscrits des régiments de Belle-Île et de l’île de Ré à 150 hommes. Vous me présenterez un rapport et projet de décret pour réunir ces compa­gnies d’artillerie, en les complétant, autant que possible, au moins à 80 hommes, afin que, par le défaut du personnel, l’artillerie ne soit pas retardée.

Un cadre de compagnie d’artillerie française sera envoyé dans l’île de Goeree et au Texel et recruté de même. Cette méthode aura l’avan­tage d’avoir à l’armée des canonniers de vingt et un ans, ayant déjà aun an de service.

Il sera ensuite envoyé, pour compléter ces compagnies et réparer leurs pertes, des hommes des dépôts de manière à les porter d’abord à 120 et après à 140 hommes.

Il faut vingt-trois compagnies d’artillerie à cheval. Il y en a déjà à l’armée d’Allemagne sept; il en faut donc encore seize. Le 1er régiment en fournira six nouvelles ; le 5e en fournira une ; le 6e en four­nira quatre, et le 4e en fournira trois.

Quant aux pontonniers, il y a déjà trois compagnies à l’armée d’Allemagne et quatre en France, ce qui fera sept compagnies; trois seront fournies par le 2e bataillon, ce qui fera dix; on n’en demande que sept.

Ainsi, par ce moyen, il y aura pour l’armée d’Allemagne cinquante compagnies d’artillerie à pied, vingt-quatre compagnies à cheval et dix de pontonniers. Quant aux ouvriers, ceux qui seront dans les arsenaux pourront être employés; il n’en manquera pas.

Ce premier aperçu peut être perfectionné par le ministre dans le rapport qu’il fera. Ce qu’il y a à faire consiste à prendre le plus grand nombre d’hommes à Anvers, dans les îles et sur les côtes, sauf à remplacer par des cadres de compagnies de conscrits réfractaires pour les îles, et hors des îles par des cadres de conscrits qu’on complétera à mesure de leur arrivée.

Je désire que vous rédigiez le projet de mouvement pour qu’au 1er mai le nombre d’hommes nécessaire pour compléter à 100 hommes les compagnies d’artillerie de l’armée d’Allemagne soit envoyé.

 

Paris, 15 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, je reçois vos lettres du 10. Levez toutes les diffi­cultés, mais organisez votre gendarmerie; qu’elle soit en activité partout avant le 1er juin. Je ne vois pas de difficulté que vous preniez le général d’Hastrel pour chef d’état-major. Je ne vois pas non plus de difficulté à donner une division au général Compans. Mon inten­tion étant de porter votre corps à cinq divisions, le général Morand pourra rester. Je donne, en attendant, ordre au général d’Hastrel de se rendre à Hambourg, où vous l’aurez sous la main jusqu’à ce que j’aie formé la cinquième division. II faut bien se garder de mettre le séquestre sur les propriétés du duc d’Oldenburg; il faut, au contraire, avoir toutes sortes de procédés en ce qui concerne ses intérêts particuliers. Donnez des ordres dans ce sens aux autorités du pays. Il ne faut pas faire attention à l’emprunt qu’il veut faire; cela ne doit pas paraître vous regarder. Si quelque banquier de Hambourg veut lui prêter de l’argent, il faut le laisser faire. Si l’on vous en parle, il faut dire seulement que vous ne pouvez rien faire pour cela sans mon autorisation. Soyez bien persuadé que, dans la situation des choses, le duc d’Oldenburg ne trouverait pas à emprunter, je ne dis pas 9 millions, mais 900,000 francs, surtout sans ma garantie. Il faut laisser aller les choses, sauf à observer ce qui se fait, sans avoir l’air de le savoir.

 

Paris, 15 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, j’ai donné l’ordre qu’au 1er mai tout ce qui est néces­saire pour compléter votre infanterie, votre artillerie, votre génie, vos administrations, tant en personnel qu’en matériel, soit dirigé sur Wesel, pour de là se rendre à votre armée. Les deux bataillons des tirailleurs corses et du Pô partent de Boulogne le 20 avril et se diri­gent par Wesel. Envoyez-moi un état de situation qui me fasse connaître l’effectif, les présents sous les armes de chaque corps, de l’artillerie, enfin de toute votre armée, afin que je comprenne parfaitement sa situation. Faites-moi connaître quand les semestriers auront rejoint. Je suppose que le 33e léger à ses quatre pièces de canon: s’il ne les avait pas, faites-les-lui fournir sur-le-champ avec les caissons.

 

Paris, 16 avril 1811.

Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris

Monsieur le Comte de Cessac, je reçois la lettre par laquelle vous me rendez compte que vous avez 1,500 voitures; ainsi il n’y a pas d’inquiétude à avoir sur ce point.

J’approuve que les dépôts des 3e, 6e et 7e bataillons des équipages militaires soient à Nancy, Metz et Mézières. Il est possible que je donne l’ordre de réorganiser à la fois ces trois bataillons; les 1,800 hommes nécessaires seront produits par l’appel de la réserve, et les 3,600 chevaux seront achetés. Ces bataillons ne seront pas rendus avant la mi-avril à Bayonne, et avant la mi-mai à leurs dépôts. On ne peut donc pas compter sur eux avant la fin de juillet, époque où les conscrits arriveront. Il est nécessaire de faire fournir sur-le-champ les harnais et voitures pour que vers le 15 août ces bataillons puissent partir en tout ou en partie. L’achat des chevaux ne peut pas retarder la formation des bataillons en hommes. Je vais bientôt faire l’appel de la réserve. Je ne pense pas qu’elle soit arrivée avant le 15 juin. Il sera temps de passer des marchés pour l’achat des che­vaux, puisqu’ils s’achètent dans la Franche-Comté et dans les cantons où sont ces bataillons. Le principal est d’avoir les harnais prêts et que les cadres ne s’arrêtent pas à Bayonne. Ces six bataillons me suffisent. Je n’ai pas besoin d’en former de nouveaux. 1,500 voitures sont ce qui m’est nécessaire; d’ailleurs, s’il en fallait d’autres, je ferais venir d’autres cadres d’Espagne.

Trois compagnies du 12e bataillon doivent être parties ; j’ai besoin de trois autres au plus tard au 15 mai.

Quant au 9e bataillon, j’en ai également besoin dans le plus court délai possible ; je vois qu’il a 305 soldats et 300 chevaux ; ainsi cela fait au moins de quoi atteler deux compagnies. Il faut rappeler de chez les cultivateurs les 173 chevaux qui y sont. Il est indispensable qu’au 15 mai j’aie au moins 60 voitures de ce bataillon prêtes à partir.

Quant au 2e bataillon, que j’organise à Commercy, j’en ai besoin le plus tôt possible. Votre rapport du 10 avril ne me présente pas la situation de ce bataillon. Vous sentez bien que je n’aurais pas eu l’idée de faire venir le 9e bataillon à Lyon si le 2e pouvait me servir.

Remettez-moi la situation des trois compagnies du 12e bataillon qui sont parties, en hommes, chevaux, harnais et voitures, et la situation des trois autres compagnies, compagnie par compagnie, et faites-moi connaître quand elles pourront partir. Mon intention est qu’elles partent à mesure qu’une compagnie sera en état de partir.

Vous me ferez connaître quand le 2e bataillon sera prêt, compa­gnie par compagnie. Mon intention est qu’à mesure qu’une compagnie sera prête elle parte.

Enfin, je désire savoir quand le 9e bataillon sera prêt à partir de Plaisance, compagnie par compagnie. Je vois que les compagnies de ce bataillon feront le fond des transports pour le mois de juillet, et que les trois autres ne seront prêtes qu’après juillet, c’est-à-dire pour une campagne d’automne.

Je pense qu’il faut réunir dans le 10e bataillon, qui est à l’armée du Portugal, tout ce qu’il y a de disponible des 1e, 4e, 12e et 13e bataillons, et faire revenir les cadres de ces derniers en France. Ce sera une ressource qui pourra être utile pour la campagne d’automne. Je suppose que le 10e pourra avoir 300 chevaux et 75 à 80 voitures. J’ai souvent donné et fait donner l’ordre de rappeler de l’armée de Portugal tous les hommes à pied des bataillons des équipages. Je suppose que ces ordres s’exécuteront. Écrivez au prince de Neuchâtel, et réitérez les ordres les plus positifs pour qu’on ne garde à l’armée de Portugal que le 10e bataillon. Ce bataillon pourra être composé d’un tiers de voitures et le reste de mulets de bât.

Je vous renvoie votre projet de décret pour que vous le rédigiez en conséquence de la présente lettre.

Il suffit que le 10e bataillon d’équipages ait deux compagnies de voitures et qu’il ait quatre compagnies de mulets de bât. Les hommes disponibles des autres bataillons seront employés à compléter ce ba­taillon. Les chevaux et les mulets, l’armée se les procurera en Portugal ; les hommes à pied des autres bataillons reviendront en France. Il serait convenable d’étendre cette mesure à l’armée d’Espagne, qui pourrait n’avoir dans ses bataillons d’équipages qu’une ou deux com­pagnies avec des voitures, et le reste avec des mulets de bât. On peut se procurer des mulets de bât en Espagne.

 

Paris, l6 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, je vous envoie deux beaux bataillons espagnols, formant 2,000 hommes, avec un général. Les soldats sont bons; ils ont été engagés de bonne volonté, et voilà deux ans qu’ils sont sous les armes. Je pense qu’ils se battront comme les Portugais et qu’ils auront peu de déserteurs, en ayant soin de ne pas les mettre aux avant-postes ni dans des places fortes de premier ordre. Il est probable qu’ils seront entourés d’embaucheurs ; il sera donc bon d’établir une sur­veillance secrète sur ces bataillons. La police doit avoir les yeux sur eux; elle prendra beaucoup d’agents anglais.

 

Paris, 16 avril 1811

A Frédéric-Auguste, roi de Saxe, à Dresde

Monsieur mon Frère, je suis fort dans l’obscur sur les dispositions des Russes. Leur langage est tranquillisant, mais les mouvements qu’ils font faire à leurs divisions de Moldavie portent à penser qu’ils en veulent au Grand-Duché. Dans cette circonstance, Votre Majesté peut avoir besoin de direction, et c’est l’objet de cette lettre.

PLACES FORTES.

Je ne connais pas la place de Zamosc. Si elle peut se défendre, il faut l’armer, rapprovisionner pour six mois et y mettre la garnison la plus faible possible ; mais, si elle n’est pas en état de se défendre assez longtemps pour qu’on puisse venir à son secours, il paraît convenable d’en évacuer l’artillerie sur Varsovie et de la faire sauter. Cette place est hors de la ligne d’opération. Le pays étant pour nous, une petite forteresse y est assez inutile; une grande forteresse ou place de dépôt peut seule être importante dans le Grand-Duché, et c’est Modlin. Il faut donc que Votre Majesté charge le prince Poniatowski et les généraux de voir combien de mois de siège Zamosc peut soutenir. Je suppose qu’il faudra que cette place se défende au moins trois mois à partir du premier mois de l’invasion. Il est à présumer que dans ce premier mois le siège n’aura pas commencé. C’est donc à peu près pendant deux mois de siège que la place doit résister.

Praga, Sierock et Modlin ne sont que des têtes de pont d’un camp retranché; ils ne peuvent donc servir qu’à appuyer les mouvements d’une armée; et, si Modlin est, comme je le suppose, hors d’état de se défendre, on ne doit pas exposer une garnison pour garder ce point. D’ailleurs ce sont des places de campagne. On décidera au dernier moment ce qu’on devra en faire. Les approvisionnements qu’on y réunira seront pour la garnison et, dans le cas contraire, pour l’armée.

ARTILLERIE.

Dans le cas où on garderait Zamosc, il faut n’y laisser que l’artil­lerie nécessaire. Il suffit pour la défense de cette place de pièces de 12 et de 16. On doit garder les pièces en fer pour l’armement et Praga, de Modlin et de la Vistule aux environs de Varsovie. On peut même garder huit pièces de 24 pour protéger Praga de la rive gau­che, du côté de Varsovie. Enfin il faut garder les poudres et les bou­lets nécessaires pour cette défense. On gardera à Varsovie toute l’artil­lerie de campagne et les caissons qu’on peut atteler et qui doivent servir aux mouvements de l’armée, et, à mesure qu’on croira qu’on est davantage menacé, on évacuera une partie de ces munitions par échelons entre Varsovie et l’Oder ; de manière qu’à mesure que l’armée se retirera elle puisse rencontrer des munitions suffisantes. Il sera donc nécessaire de former ainsi sur la route des magasins pour les munitions. On pourra prendre des églises, etc., et il faudra me faire connaître l’emplacement de ces magasins. On laissera une partie de l’artillerie nécessaire à Thorn, tout le reste de l’artillerie quelconque, à l’exception des fusils, sera embarqué sur la Vistule, sous prétexte d’une destination pour l’armement de Thorn. Ces bateaux partiront ensemble; ils pourront être expédiés peu de jours après l’ordre qui en sera donné, et de Thorn on pourra ensuite les diriger sur Danzig, où ils seront en dépôt dans une place forte. Cette mesure est d’autant plus importante que l’appât de prendre cette artillerie pourrait porter les Russes à tenter un coup de main sur Varsovie. Ils n’en auront plus l’idée lorsque l’artillerie n’y sera plus. Quant aux huit pièces en bronze qui seront laissées à Varsovie et à celles en fer qui seront à Modlin , on les évacuera à mesure que les choses se prononceront, ou, au dernier moment, on brûlera les affûts et on mettra les pièces hors de service, si on n’a pu les transporter.

ARMES A FEU.

Les armes que j’ai envoyées dernièrement de France doivent être retenues à Dresde, à Glogau et à Küstrin, selon l’endroit où elles se trouvent. Quant aux armes qui sont dans le Duché, on peut en gar­der 4,000 à Varsovie, soit pour les gardes nationales, soit pour l’armée, soit pour les recrues. Le reste devra être dirigé, comme les munitions, en échelons sur la route de Posen. Au moment d’une attaque sérieuse, on évacuerait ces armes sur Glogau et Küstrin. On peut même en évacuer 5 à 6,000 sur Danzig.

ARMÉE.

Les semestriers doivent être rappelés et les corps réunis sous pré­texte d’en faire la revue. Tout doit être rassemblé du côté de Pultusk et de Varsovie. La cavalerie doit rester sur les avant-postes et être placée en échelons, de manière à retarder la marche de l’ennemi et à préserver Varsovie d’une invasion. Des chevaux doivent être levés de tous côtés pour remonter la cavalerie et pour atteler les soixante et douze pièces de campagne nécessaires à l’armée polonaise. Des pièces de régiment doivent être données à chaque corps. Des magasins de biscuit et de vivres doivent être formés sur la ligne d’opéra­tion entre l’Oder et Varsovie. L’armée doit être chargée de défendre aussi longtemps qu’elle pourra la Vistule, et, lorsque cela ne sera plus possible, de manœuvrer toujours lentement sur l’Oder. Les hôpi­taux doivent, en général, être évacués du côté de Kalisz. Il est pro­bable que, si l’on en venait à cette extrémité, l’armée serait rencon­trée sur l’Oder par l’armée française. Ce n’est pas le moment où Votre Majesté doit regarder à un million. Je pense que Votre Majesté doit donner des ordres pour que tous les chevaux d’artillerie soient levés, pour que son artillerie soit attelée, les semestriers rappelés, et enfin son corps d’armée mis dans le meilleur état possible. Si la Russie n’avait affaire qu’au Grand-Duché, je suppose qu’elle pourrait se divertir d’un coup de main; mais, dans l’état actuel des choses, elle doit voir cette entreprise sous un point de vue plus sérieux, et je doute encore qu’elle en ait le projet. Cependant les faits parlent; ses divisions quittent le Danube et se portent sur les frontières du Grand-Duché. Les bruits de Varsovie à cet égard ne sont plus des bruits isolés; ils sont confirmés par tous les avis qu’on reçoit de Stockholm et de Bucharest. Il faut donc se mettre en mesure, et c’est le but de la présente instruction. Le Grand-Duché n’a sans doute pas à crain­dre une invasion; mais enfin tout doit être prévu, et dans ce cas l’art consiste à ne perdre ni canons, ni munitions, ni armes, ni maga­sins. C’est ce que la Bavière a fait constamment dans les dernières invasions qu’elle a éprouvées. Toute son artillerie, tous ses magasins avaient été évacués sur Lindau, sur Augsbourg et sur Ulm. Or la place de Danzig est ici d’un grand avantage pour le Duché, puisqu’on peut tout charger sur des bateaux qui, en huit ou dix jours, seront en sûreté dans cette place et pourront remonter ensuite, quand le danger sera passé. Ces dispositions pour le Grand-Duché font assez connaître à Votre Majesté ce qu’elle doit faire pour la Saxe, puisque, le cas arrivant, il serait assez convenable que l’armée saxonne pût aller au-devant de celle du Grand-Duché. Je pense donc qu’il faut donner dos pièces aux régiments, et, sous prétexte de revues, ras­sembler les divisions, remonter la cavalerie et mettre tout en état. On ne peut pas parler ici de ce que les Prussiens feront en cas de guerre. Comme les protestations de la Russie sont très pacifiques, quoique en contradiction avec les mouvements de troupes, qui peut-être sont le résultat de la peur, on n’a pu que pressentir que la Prusse désirait un rapprochement, sans cependant avoir encore une idée diplomatique à cet égard.

 

Paru, 17 avril 1811

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, par le courrier que vous enverrez à Dresde, écrivez à mes ministres à Dresde et à Varsovie pour qu’ils tiennent la main à ce que, vingt-quatre heures après la réception de ma lettre, des ordres soient donnés pour la réunion de l’armée varsovienne; qu’ils se pénètrent bien du principe de ma lettre, qui est que tout est bien, pourvu qu’on ne perde rien, quand même les Russes viendraient à Varsovie; que les Autrichiens ont toujours été à Munich; mais qu’il ne faut pas que l’armée soit rassemblée en détail; qu’il faut qu’elle soit toute réunie à Varsovie; qu’il faut que la Saxe rappelle ses semestriers, achète des chevaux et organise son artillerie.

 

Palais des Tuileries, 17 avril 1811

A M. de Champagny, duc de Cadore, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Cadore, je n’ai eu qu’à me louer des services que vous m’avez rendus dans les différents ministères que je vous ai confiés; mais les affaires extérieures sont dans une telle circonstance que j’ai cru nécessaire au bien de mon service de vous employer ailleurs. J’ai voulu cependant, en vous faisant demander votre porte­feuille, vous donner moi-même ce témoignage, afin d’empêcher qu’il reste aucun doute dans votre esprit sur l’opinion que j’ai du zèle et de rattachement que vous m’avez montrés dans le cours de votre ministère.

 

Paris, 17 avril 1811

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Bassano, je vous envoie deux projets de traité avec la Westphalie. Je ne puis pas mettre dans un traité avec la Westphalie que je retirerai le nombre de troupes au-dessus de 12,500 hommes, puisque cela dépend des circonstances.

 

Paris, 17 avril 1811

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Bassano, le petit traité à faire avec la Prusse pour la route militaire de Stettin à Danzig consiste à obtenir un embranchement qui irait de Konitz à Nackel. Konitz est sur le territoire prussien ; Nackel est sur le territoire polonais. De Nackel on irait à Posen, à Varsovie, à Thorn, comme on voudrait. Ainsi, de Danzig on viendrait à Konitz pour entrer dans le Grand-Duché, et de Stettin, pour entrer dans le Duché, on viendrait également à Konitz et on descendrait de là à Nackel.

 

Paris, 17 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, les régiments de cuirassiers formeront quatre divisions. La 1e division sera telle qu’elle est aujourd’hui en Allemagne. La 2e sera composée des quatre régiments qui formaient la division d’Hautpoul. La 3e sera composée des quatre régiments qui formaient la division du duc de Padoue dans la dernière campagne. La division de réserve sera composée des deux régiments de carabi­niers et du 1er régiment de cuirassiers. Le 14e de cuirassiers rempla­cera le 1er régiment de cuirassiers dans la division où ce régiment servait. Ainsi la réserve ne sera que de trois régiments, mais il sera créé sans délai un 5e escadron à ces trois régiments, afin qu’ils puissent avoir un plus grand nombre d’hommes à cheval.

Proposez-moi pour ces divisions quatre généraux de division, huit généraux de brigade, quatre adjudants commandants et l’artillerie nécessaire, qui doit être de douze pièces d’artillerie à cheval par division, c’est-à-dire de quarante-huit pièces pour les cuirassiers.

Donnez à ces régiments l’ordre de se tenir prêts à entrer en cam­pagne. Présentez-m’en l’état en détail, et qu’au 1er mai ils puissent se mettre en marche pour se diriger vers la frontière.

Recommandez bien aux colonels de n’acheter que des chevaux qui puissent faire la campagne, car des chevaux qui ne pourraient être employés tout de suite ne serviraient à rien.

Le 5e régiment de hussards et le 11e formeront une brigade; le 23e et le 24e de chasseurs en formeront une seconde; le 11e et le 12e de chasseurs en formeront une troisième. Présentez-moi trois généraux de brigade pour commander ces trois brigades, et donnez des ordres aux régiments pour qu’ils se mettent en état. Faites-moi connaître ce que chacune de ces brigades pourra avoir de prêt à partir au 1er mai.

Par ce moyen j’aurai : 1° trois brigades de cavalerie légère, déjà existantes à l’armée d’Allemagne, formant six régiments; 2° six régiments que j’envoie, formant trois brigades ; total, six brigades de cavalerie légère et quinze régiments de cuirassiers, formant quatre divisions.

Faites-moi connaître combien au 1er mai ces régiments auront d’hommes à cheval, et combien ils en auront au 1er juin et au 1er juillet.

 

Paris, 17 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Donnez ordre à la demi-brigade portugaise qui est à Bourges de se rendre à Orléans. Envoyez-lui un ordre de route pour qu’elle marche bataillon par bataillon et à deux jours de distance. Faîtes-moi connaître ce que c’est que le 1er et le 2e régiment de chasseurs portugais et le bataillon de marche qui est à Châteauroux. Mais, en attendant, éloignez cette demi-brigade. Je trouve qu’il y a trop de Portugais dans cette division, et je pense qu’il faudrait la diriger sur l’Allemagne. Je vois que j’ai 3,500 hommes de ces Portugais que je ne veux pas laisser à Grenoble et à Lyon ; je préfère les avoir à l’armée, et il faut les organiser pour ce service. Je pense qu’en incorporant les deux bataillons provisoires qui sont à Lyon et Genève, ainsi que la demi-brigade d’élite, on pourrait avoir 1,000 hommes pour chaque bataillon; ce qui ferait une demi-brigade utile. Mais je pense qu’il est assez important de les ôter de France. Vous pouvez faire appeler le général portugais qui est à Paris, lui expliquer le parti qu’on veut en tirer et l’avantage que cela leur présente, puisqu’ils ne pourraient qu’être très malheureux en Portugal. Faites-moi connaître les géné­raux portugais auxquels on pourrait se fier pour les attacher à chacun de ces régiments. Ce serait toujours une plus grande garantie.

 

Paris, 17 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Il y a à Hambourg un entrepreneur de transports pour les douanes qui va transporter par jour 250 milliers pesant à Cologne. Je crois que l’artillerie pourrait profiter du retour de ces transports pour en­voyer des munitions. Cela épargnerait vos chevaux d’artillerie.

 

Paris, 17 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

J’ai pris un décret pour former un 6e bataillon aux régiments du prince d’Eckmühl. Je désirerais que ces bataillons se formassent en Allemagne et que les cadres ne revinssent pas en France. On les for­merait avec des dépôts des régiments de l’armée d’Espagne qui sont situés entre la Loire et le Nord. Je crois qu’on pourrait toujours bien tirer près de 10,000 hommes de ces dépôts, soit de conscrits qui vont arriver, soit de vieux soldats qui y sont. Par ce moyen les 6e batail­lons se trouveraient formés eu même temps que les 4e.

Je pense aussi que les régiments de Walcheren, de Belle-Île et de l’île de Ré pourraient fournir quelques hommes; mais il faudrait que ce fût des hommes sûrs et sur lesquels on pût compter. Les régiments d’Italie ont beaucoup de places vacantes, parce qu’ils ont envoyé des officiers aux régiments hollandais. Il est nécessaire qu’il soit nommé à ces places. Toutes ces mesures sont pressantes. Présentez-moi demain un projet de décret pour que tous les régiments, en Italie et en France, qui n’ont pas leurs compagnies d’artillerie, les forment sans délai, et pour qu’il leur soit fourni des caissons, s’ils les ont mis en dépôt, et des moyens pour avoir des pièces, des chevaux et des harnais, s’ils s’en sont défaits. Vous vous concerterez à cet effet avec le ministre de l’administration de la guerre.

Les Russes menacent le grand-duché de Varsovie. Ils ont laissé peu de monde sur le Danube et ont rapproché leurs divisions des confins du Grand-Duché. Il est donc instant de presser toutes ces mesures.

Tous ces régiments devant avoir leur direction sur Wesel et Mayence, il sera nécessaire que les conseils d’administration reçoi­vent l’ordre d’acheter les caissons et harnais dans ces pays-là.

 

Paris, 17 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, je vous envoie copie d’une lettre que j’écris au roi de Saxe. Vous sentez qu’elle n’est que pour vous. Cette lettre vous fera connaître mes dispositions. En cas de violation du territoire, le prince Poniatowski doit sur-le-champ vous prévenir ainsi que le gouverneur de Danzig. Vous feriez alors toutes vos dispositions pour réunir votre armée sur l’Oder; mais avant que vos mouvements fussent faits, vous recevriez mes ordres. Les Polonais et les Saxons, qui, au nombre de 50,000 hommes, appuieront votre mouvement sur Glogau, vous feront déjà une armée de 120,000 hommes. La garnison de Danzig pourra, dans ce cas, avoir un corps d’observation de 6,000 hommes, infanterie et cavalerie, lequel se tiendrait près de Dirschau et assure­rait les communications avec Thorn ; ce qui aiderait le prince Poniatowski à garder la Vistule. Le principal est que la garnison de Danzig soit complétée et approvisionnée. Il me semble qu’il doit y avoir au 1er mai 12,000 hommes, quatre ou cinq généraux français, beau­coup d’artillerie et de génie. Il me semble également que l’artillerie se trouve approvisionnée. Il est bien urgent cependant que les pou­dres arrivent; je suppose que le convoi est déjà parti et que les 150 milliers de poudre, qui sont le plus important, y seront arrivés avant que la première quinzaine de mai soit terminée. Quant aux approvisionnements en blé et en avoine, en viande et en bois, cette ville abonde ordinairement de tout cela; d’ailleurs le général Rapp ne manquera pas de prendre dans le temps tout ce que le territoire pourra lui fournir, et surtout les bœufs.

Faites-moi connaître, je vous prie, quelle sera, au 1er mai, la force des 10e et 11e régiments polonais qui sont à Danzig et du 5e qui est à Küstrin. Donnez ordre que tous les soldats à pied du régi­ment des chevau-légers polonais qui est à Danzig soient remontés à mes frais; de sorte que, si ce régiment peut fournir 200 hommes, on achète sur-le-champ 200 chevaux. Donnez ordre également qu’aux trois régiments polonais qui sont à mon service on attache des com­pagnies d’artillerie et du train, et qu’il leur soit acheté des chevaux. En cas d’événements imprévus, vous auriez soin de prévenir le roi de Westphalie. Vous voyez que mon intention est que, dans le cas où l’ennemi attaquerait inopinément, mon armée ne passe pas l’Oder que tous les corps ne soient formés et que mes troupes qui se réunissent dans le Tyrol, la division qui se forme en Hollande et ma Garde, ne soient arrivées; ce qui n’empêchera pas que vous n’ayez une avant-garde qui se maintiendra le plus longtemps qu’elle pourra avec Danzig. Raisonnez sur vos cartes dans toutes ces suppositions et faites-moi vos objections.

Cela vous fait sentir assez combien il est important que le blé qui doit exister à Stettin et à Küstrin y existe, et qu’on fasse confectionner le biscuit qui est ordonné. On se servirait des 500,000 rations de Magdeburg, qu’on ferait venir par le canal de Küstrin; ce qui nous ferait sur-le-champ un million de rations.

Je vous ai déjà demandé quelle serait la situation de votre année avant le 1er mai.

Vous ne pouvez pas vous trouver en présence de l’ennemi avant le 1er juin; faites-moi connaître quelle sera votre armée alors, y compris les Saxons, les Polonais, la garnison de Danzig et les Westphaliens. Je suppose qu’au 1er juin une division composée de vos 4e bataillons se réunira à Wesel ; elle pourrait vous rejoindre si cela était nécessaire, mais seulement comme corps de réserve à laisser à Magdeburg ; car ces conscrits seraient encore bien jeunes, n’ayant que deux mois de service, et il me semble qu’on ne peut pas espérer s’en servir avant le mois de juillet; mêlés alors avec d’autres, ils pourraient entrer en ligne. Je pense donc qu’au 1er juillet vous pou­vez vous présenter avec 75,000 hommes, infanterie, cavalerie, artillerie, tout compris; ce qui, avec la garnison de Danzig, les 60,000 Polonais, Saxons et Hessois de Darmstadt, vous fera sur-le-champ 150,000 hommes, assis sur les places de Küstrin, Glogau et Danzig. D’ailleurs il est bien possible que dans peu de jours je prenne la résolution de vous envoyer de nouvelles divisions de cuirassiers et de cavalerie légère, de manière à porter votre cavalerie à 20,000 hommes, y compris ce que vous avez, et à 32,000 hommes, y compris 4,000 Saxons et 8,000 Polonais.

Ayez un chiffre avec le gouverneur de Danzig, et prévenez-le de toutes ces dispositions générales. Il faut qu’il soit très alerte, qu’il monte une police secrète et sache ce qui se passe du côté de Tilsit, Riga, sur les frontières, et vous tienne informé de tout. Il faut surtout qu’il fasse faire le service de sa place avec rigueur, pour éviter toute surprise. Actuellement qu’il a de la cavalerie, il peut la distri­buer dans tous les points du territoire.

 

Paris, 17 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, arrêtez à Küstrin et à Glogau les armes qui se ren­dent à Varsovie. Mettez beaucoup d’officiers d’état-major dans les places de Glogau et Stettin ; ce sont des officiers que vous retrouverez toujours et qui seront placés là pour surveiller. Recommandez-leur la plus grande vigilance ; ils doivent dormir le jour et rester debout toute la nuit, ils doivent avoir l’œil sur tout et vous rendre compte.

 

Paris, 17 avril 1811

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Paris

Mon Fils, vous donnerez des ordres pour réunir sans délai, et sans attendre les ordres de mon ministre de la guerre, un corps d’armée entre Vérone, Trente et Bolzano; ce corps sera composé de quatre divisions.

La le division sera formée de deux bataillons du 8e d’infanterie légère, de deux bataillons de Croates, de trois bataillons du 84e, de trois bataillons du 92e; total, dix bataillons, tous portés au grand complet, ce qui fera 8,400 hommes. Le 8e, le 84e et le 92e auront leur compagnie d’artillerie avec leurs caissons et leurs pièces; on donnera également aux bataillons croates deux pièces qu’on organisera en Illyrie; ce qui fera huit pièces de canon. Il y aura en outre douze pièces d’artillerie de ligne attachées à cette division ; on y attachera également une compagnie de sapeurs avec ses outils. Cette division sera partagée en deux brigades, chacune de cinq bataillons.

La 2e division sera composée de sept régiments d’élite. Chaque régi­ment d’élite sera formé de deux bataillons : le 1er bataillon sera com­posé de quatre compagnies de voltigeurs, et le 2e bataillon de quatre compagnies de grenadiers. Chaque régiment aura les caissons, la compagnie d’artillerie et les moyens de transport attachés au régi­ment, hormis qu’il n’y aura que deux caissons d’infanterie, et deux de transport au lieu de quatre. Ces régiments seront ainsi composés, savoir : 1er régiment d’élite : 1er bataillon, quatre compagnies de voltigeurs complétées à 150 hommes; 2e bataillon, quatre compa­gnies de grenadiers complétées à 150 hommes; total, 1,200 hom­mes, du 9e de ligne; 2e régiment d’élite : deux bataillons du 13e, 1,200 hommes; 3e régiment d’élite : deux bataillons du 29e, 1,200 hommes; 4e régiment d’élite : deux bataillons du 35e, 1,200 hom­mes; 5e régiment d’élite : deux bataillons du 53e, 1,200 hommes; 6e régiment d’élite : deux bataillons du 106e, 1,200 hommes; 7e ré­giment d’élite : deux bataillons du 112e, 1,200 hommes; total, 8,400 hommes et quatorze pièces de canon. Il y sera en outre atta­ché douze pièces d’artillerie de ligne.

La 3e division sera composée de quatre bataillons du 1er de ligne, de trois bataillons du 62e, de quatre bataillons du 101e et des deux bataillons espagnols qui sont à Palmanova et à Alexandrie; total, treize bataillons et près de 9,000 hommes. Le 1er, le 62e et le 101e auront chacun leurs pièces de régiment qu’ils formeront à Plaisance.

La 4e division sera composée de seize régiments d’élite italiens, formés par les soixante-quatre compagnies d’élite des différents bataillons de l’armée italienne qui sont en Italie; ce qui fera 9,600 hom­mes. Il y sera attaché huit pièces de canon de régiment et douze pièces de canon de ligne.

Total des divisions de l’infanterie : 36,000 hommes, trente-six pièces de canon de régiment, quarante-huit pièces de canon de ligne. Il y sera de plus attaché deux compagnies d’artillerie, deux compa­gnies de pontonniers et deux compagnies de sapeurs, indépendam­ment de la compagnie de sapeurs par division.

Chaque division formera trois brigades, à l’exception de la pre­mière qui n’en formera que deux.

La garde italienne se préparera à marcher avec ce corps d’armée; elle sera composée de tous les hommes à pied et à cheval disponibles et d’une réserve d’artillerie telle qu’elle pourra être formée.

Le 9e bataillon d’équipages militaires français et deux compagnies d’équipages militaires italiens seront attachés à ce corps d’armée.

Donnez sans délai des ordres pour que tous ces régiments se tien­nent prêts et que les compagnies d’élite soient complétées. Vous laisserez accroire aux colonels qu’ils doivent eux-mêmes commander ces régiments d’élite, afin que la composition en soit bien faite; mais, en réalité, vous ne ferez marcher que quatre colonels et trois majors. Chaque bataillon d’élite sera commandé par un chef de bataillon : ainsi, sur les quatre chefs de bataillon, deux marcheront; vous choi­sirez les meilleurs officiers. Présentez-moi l’organisation après que vous aurez donné les ordres préparatoires pour ce qui vous regarde, afin de ne pas perdre un moment et qu’au 1er mai tout cela se puisse mettre en marche pour Vérone; étudiez cette organisation ; présentez-moi les généraux de division, les généraux de brigade, les états-majors, les administrations, les commissaires de guerre, les officiers du génie et d’artillerie, et tout ce qui est nécessaire pour compléter cette organisation en détail et telle que je puisse ainsi l’envoyer toute faite au ministre de la guerre. Je désire l’avoir demain soir. Faites transporter 200,000 rations de biscuit à Vérone afin de pouvoir rem­plir les caissons; ces biscuits serviront à l’armée. Donnez tous les ordres pour que l’artillerie puisse également se diriger sur Vérone et être prête au 1er mai, de sorte qu’au 15 mai le corps d’armée puisse déboucher sur Trente.

Quant aux bataillons croates et aux deux bataillons du 8e d’infan­terie légère, vous écrirez d’office au général qui commande en Illyrie, pour lui signifier ces dispositions, lui mander qu’il recevra à cet égard les ordres du ministre; mais que, comme ces troupes doivent faire partie du corps d’armée que vous êtes chargé d’organiser, vous croyez devoir l’en prévenir pour qu’il fasse d’avance ses dispositions. Vous lui direz confidentiellement qu’il est possible que ces corps sor­tent d’Illyrie pour entrer en Allemagne, mais que ceci est très secret et pour lui seul. Qu’il commence donc à lever sans délai les deux bataillons croates et à préparer les deux bataillons d’infanterie légère. Ces deux bataillons seront remplacés dans le pays par deux batail­lons croates qui feront le service. Écrivez également d’office à la grande-duchesse, en lui disant qu’il est convenable qu’elle donne des ordres pour l’organisation des voltigeurs et des grenadiers de ses deux régiments; qu’elle va recevoir à cet égard les ordres du ministre de la guerre, mais que vous lui écrivez pour lui en faire parvenir l’avis deux jours d’avance, parce que je désire que ces deux régiments puissent partir le 1er mai; qu’en attendant, et sans rien dire, elle doit donner des ordres pour faire compléter les compagnies et les faire venir à Florence pour en passer la revue.

Quant aux troupes qui composent la division des trois régiments qui viennent de Naples, elles doivent être parties de Rome. Vous pouvez prendre des renseignements sur leur marche dans les bureaux de la guerre et en faire mention dans le travail que vous me présen­terez. J’ai à suivre tant de détails, que je désire que vous vous occu­piez de ce qui est relatif à ce corps d’armée.

Quant à la cavalerie, toute la cavalerie légère de l’armée italienne et française doit se tenir prête à marcher. Je composerai chaque brigade de deux régiments. Faites-moi connaître les généraux de brigade qu’on peut faire marcher, et présentez-moi la composition de ces brigades. Le 49 régiment de chasseurs qui arrive de Rome en fera partie, ainsi que le 9e. Je laisserai en Italie les dragons italiens et deux ou trois régiments de dragons français. A cet effet, le 6e et le 8e de chasseurs formeront une brigade; le 4e et le 9e de chasseurs en formeront une autre ; le 6e de hussards et le 25e de chasseurs forme­ront une 3e brigade ; deux régiments de dragons composeront une 4e brigade ; la 5e brigade sera une brigade italienne. Les régiments de dragons français et italiens et le 19e de chasseurs resteront en Italie; voyez cela en détail. Ainsi le corps d’armée sera donc com­posé de 34,000 hommes d’infanterie, de 6,000 hommes de cavalerie et de près de quatre-vingts pièces de canon, indépendamment de la garde royale; ce qui le portera de 40 à 50,000. Il faut que tout cela puisse se mettre en marche et, s’il est nécessaire, entrer en Allema­gne le 15 mai. La brigade qui partira d’Illyrie se rendra à Laibach, et de là sera dirigée par Villach sur Landshut; elle arrivera en même temps que les autres troupes à Ratisbonne.

Vous me ferez aussi un rapport sur ce qui restera en Italie, en y comprenant toute la conscription de cette année, tant française qu’italienne, qui aura le temps nécessaire pour se former. Il me semble qu’il restera suffisamment de forces pour parer à une insurrection, à un débarquement et protéger les places; en effet, en y comprenant la Toscane, il restera neuf régiments, qui présenteront à peu près la même force que l’armée présente aujourd’hui, puisqu’ils recevront de la conscription l’équivalent de ce que j’en retire, et que, dans la répartition de la réserve, je fournirai à ces régiments un plus grand nombre d’hommes pour les compléter.

 

Paris, 18 avril 1811

Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris

Vous avez dix compagnies formant 900 infirmiers. La compagne de 120 hommes, qui est dans les provinces illyriennes, est inutile; faites-la marcher avec le corps de l’armée d’Italie qui se réunit à Lay­bach. Celle qui est en Portugal est nécessaire. La compagnie qui est à Metz et à Strasbourg, envoyez-là à l’armée d’Allemagne,

Pour celle de Catalogne et pour celles qui sont en Espagne, je n’ai rien à dire.

La 9e compagnie, qui a 69 hommes en Italie et 41 en Illyrie, peut se diriger sur Besançon. La 10e d’Italie peut se retirer à Besançon.

Vous avez ainsi quatre compagnies de 120 infirmiers disponibles.

La Hollande, l’Italie, les provinces Illyriennes, la France ne doi­vent pas avoir de ces compagnies; cela doit être pour l’armée.

Je ne puis comprendre pourquoi il y a deux compagnies d’infirmiers dans les provinces illyriennes, où je n’ai que quatre régiments. Les compagnies qui sont en Italie y sont d’une inutilité absolue, en Italie où le peuple est si charitable, où il y a de superbes établissements.

Envoyez au corps d’armée qui est en Allemagne et au corps qui va se former à Laybach les compagnies qui sont en Illyrie, en Italie, en France, en Hollande. Quatre compagnies d’infirmiers peuvent servir 10 à 15,000 malades. En Allemagne même on n’a besoin d’infirmiers que sur la première ligne.

 

Paris, 18 avril 1811

Au général Lacuée, duc de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris

J’ai lu votre rapport du 13 avril. Vous me demandez beaucoup trop de monde pour l’administration, ce serait une deuxième armée. Je vous envoie la note de ce que demande le prince d’Eckmühl ; vous verrez que c’est bien loin de votre proposition. Je vous envoie également un rapport que j’avais demandé au comte Daru ; vous verrez qu’au lieu de 4,000 employés il n’en demande que 2,000; et cepen­dant il a fait son travail sur les mêmes rapports que vous. Je ne puis lever une armée d’employés.

Présentez-moi un projet d’organisation divisé en autant de titres qu’il y aura de corps d’armée.

État-major général : cette organisation ne sera envoyée que lors­qu’il sera question de former l’armée d’Allemagne en grande armée.

Autant que je puis prévoir, l’armée d’Allemagne sera composée de trois corps ; le corps du prince d’Eckmühl aura cinq divisions au lieu de quatre; un autre corps partira de Wesel ou de Mayence; il sera composé de quatre divisions; enfin un troisième corps, qui se formera à Vérone et à Trente, et qui sera composé de trois divisions françaises et d’une italienne; total, treize divisions. Il y aura de plus quatre divisions de cuirassiers (une qui est en Allemagne et trois qui se forment sur Mayence et Wesel), une division de réserve de dragons, qui se forme à Vérone, et dix brigades de cavalerie légère, chacune de deux régiments. Il faut d’abord composer le corps du
prince d’Eckmühl comme il était dans la dernière campagne; ensuite, à mesure que les deux autres corps seront formés, on en formera  également l’administration. Il est donc nécessaire que vous me fassiez connaître ce qui est nécessaire au corps du prince d’Eckmühl, ce qui existe et ce qui manque; que ce qui manque parte sans délai; et, pour n’y pas revenir à deux fois, que dans votre travail, au lieu de quatre divisions, vous en compreniez cinq. Je pense qu’un corps de boulangers doit être attaché à cette armée; le maréchal en fera la divi­sion suivant les circonstances. Je pense qu’une compagnie de con­structeurs de fours doit y être attachée également.

Les six compagnies du 129e bataillon des équipages sont destinées pour ce corps. L’ordonnateur Chambon restera commissaire ordonnateur. Il est d’usage, je crois, de mettre un médecin, ou un chi­rurgien et un pharmacien en chef à la tête du service de santé. La compagnie d’infirmiers doit aussi être attachée au corps d’armée d’Allemagne.

Le corps qui se réunira à Wesel sera composé de quatre divisions; il aura pour son service le 2e bataillon des transports militaires. Le corps qui se réunit en Italie aura pour son service le 9e bataillon d’équipages et deux compagnies d’équipages italiens. Ce corps, qui sera de 40,000 hommes environ, aura une administration moins considérable que le prince d’Eckmühl. Faites-moi connaître si vous avez en Italie des employés qui puissent marcher avec cette organisation.

Les divisions de cuirassiers n’ont pas besoin de transports mili­taires; mais il leur faut des ordonnateurs, des commissaires des guerres, des chirurgiens, etc. Je désire que vous organisiez l’administration de ces divisions comme elle l’était dans la dernière campagne.

Quant au quartier général, il faut suivre l’exemple de la campagne de Pologne, et dès lors le comte Daru et Villemanzy peuvent vous faire connaître ce qui est nécessaire. On est dans l’usage d’avoir au quartier général une espèce de service léger ; je crois qu’on le compose d’une cinquantaine de caissons. Il serait bon d’avoir quelques-uns des ordonnateurs et commissaires des guerres qui ont servi le plus activement en Pologne et qui connaissent mieux le pays. Les 3e, 6e et 7e bataillons des équipages militaires seront attachés au quartier général. Je suppose que vous avez donné ordre aux cadres de ces bataillons de se rendre à Commercy. Les cadres des 6e et 7e bataillons ont dû arriver le 15 avril à Bayonne.

 

Paris, 18 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, vous trouverez ci-joint le rapport du ministre de l’ad­ministration de la guerre sur l’approvisionnement de siège de Danzig. Vous y verrez que cet approvisionnement est évalué à 3 millions; qu’en ôtant le bois de chauffage évalué 340,000 francs, le vin évalué 900,000 francs et qu’on ne peut pas se procurer, la paille pour le couchage, le foin, qu’on pourra prendre dans le pays à vingt lieues aux environs quand les circonstances l’exigeraient, il ne resterait plus que 1,400,000 francs; encore je crois que les prix sont portés trop haut. Le quintal métrique de blé, par exemple, ne doit pas coûter 18 francs. Je ne parle point de la viande : vous en savez la raison. Cette somme de 1,400,000 francs n’est pas une dépense énorme. Le principal est que le général Rapp aille de l’avant et que l’approvision­nement existe en magasin à Danzig, afin que je sois sans aucune espèce d’inquiétude sur cette place importante. Moyennant cet état, il doit y avoir dans la place 60,000 quintaux de blé. Je vous ai mandé qu’il fallait être assuré d’avoir 100,000 autres quintaux sur lesquels on pût mettre la main en cas d’événement, tant pour les habitants que pour l’armée. Envoyez un commissaire des guerres de confiance pour arranger cela à Danzig. Si la ville ne peut être chargée que de l’approvisionnement journalier, autorisez le général Rapp à faire l’approvisionnement de siège à mes frais jusqu’à concurrence d’un million.

Je vous envoie également un rapport do ministre de l’administra­tion de la guerre sur l’approvisionnement de siège des trois places de l’Oder. Le ministre demande 200,000 francs; il croit pouvoir faire ces approvisionnements avec 100,000 francs. Je pense que vous pourriez y pourvoir avec le produit des denrées coloniales. Je vois que la place de Stettin aura un approvisionnement pour 4,000 hommes pendant un an, Küstrin un approvisionnement pour 3,000 hom­mes pendant un an, et Glogau un approvisionnement pour 3 à 4,000 hommes pendant un an. La facilité que vous avez à Hambourg d’avoir une caisse à votre disposition simplifie et rend le service plus rapide, puisque vous pouvez ouvrir des crédits, non sur les fonds du trésor, ce qui occasionnerait des irrégularités et de la confusion, mais sur la caisse des denrées coloniales. Vous me rendrez compte des crédits que vous aurez donnés, et je donnerai des ordres pour vous couvrir; par ce moyen tout marchera rapidement. L’essentiel est que les places soient approvisionnées pendant un an, surtout Danzig, qui doit l’être pour 15,000 hommes et 1,000 chevaux. Organisez tout cela en règle. Il faut des gardes-magasins pour la approvisionnements de siège autres que les gardes-magasins ordi­naires. Il faut qu’il y ait plusieurs chefs des magasins; que le gouverneur en fasse la revue tous les mois ; qu’il ne se fasse aucun mou­vement sans qu’il en ait l’état journalier, et que l’on ne touche qu’à l’approvisionnement journalier. J’ai établi beaucoup de mesures pour les approvisionnements de siège des places, afin qu’il n’arrive plus ce qui est arrivé, qu’au moment d’un siège la moitié des approvision­nements était mangée. Faites un ordre du jour et annoncez la peine de mort contre tout garde-magasin ou commissaire des guerres qui distrairait ou délivrerait la moindre chose de l’approvisionnement de siège sans l’autorisation du gouverneur; que rien ne peut sortir des magasins, pour cause d’avaries ou toute autre cause, sans que le remplacement précède l’extraction. Organisez l’hôpital de Danzig; je suppose qu’il y a des commissaires des guerres. Il est important que l’approvisionnement de siège soit dans les mains d’agents français. Je ne m’oppose pas à ce que l’approvisionnement journalier soit dans les mains de gens du pays. Tâchez de n’employer que des hommes probes.

 

Paris. 18 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, j’ai reçu votre lettre du 13 avril. J’ai lu avec intérêt ce que vous écrit le colonel Charrière, et je me suis sur-le-champ fait rendre compte de la situation des régiments. Il est convenable que vous me préveniez de la correspondance des colonels avec les majors, toutes les fois qu’elle contiendra des renseignements de quelque importance.

 

Paris,  18  avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, il ne faut pas que le 3e bataillon bis soit employé aux convois de Magdeburg à Küstrin. Faites faire ces transports par des entrepreneurs du pays, qui rapporteront du sucre à Magdeburg. Tenez vos quatre bataillons entre l’Elbe et le Rhin, afin d’en dispo­ser suivant les circonstances.

J’ai donné des ordres pour que les dépôts du 5e et du 7e régiment d’artillerie envoient, le premier 50 hommes, et le second 150, pour compléter, de 70 à 80 hommes, les compagnies qui ont envoyé des renforts à Danzig.

 

Paris, 19 avril 1811

Au comte Mollien, ministre du trésor public, à Paris

Monsieur le Comte Mollien, je lis votre rapport du 17 avril, par lequel vous me faites connaître que vous avez 10 millions d’assurés à Hambourg. A cela il faut ajouter ce que les douanes rendront dans le courant d’avril, et j’estime cette rentrée de 5 à 6 millions. Cela vous fera donc 15 millions au moins. Je crois, d’après cela, que l’envoi de Mayence est inutile. Si cela peut se faire, contremandez-le et gardez ces fonds. Je vois dans votre rapport que vous avez une réserve de 2 millions à Danzig ; mais vous y comprenez des obligations que la ville ne pourra peut-être pas payer. Je désire avoir à Danzig 3 millions en argent. Faites-les diriger de Hambourg. En résumé, il ne faut rien faire partir de Mayence, ne pas tenir à Hambourg plus de 3 millions, avoir 3 millions à Magdeburg et 3 à Danzig; total, 9 millions, en réserve et hors du service ordinaire. Il n’y aurait pas de mal d’avoir une réserve de 3 à 6 millions à Mayence. Indépendamment de ce, il faut assurer le service des 100,000 francs par mois pour Danzig et des 250,000 francs par mois pour la solde de l’armée d’Allemagne; ce qui, pour les six premiers mois, fait donc environ 2,100,000 francs qu’il faut avoir.

Tout me porte à penser que j’aurai bientôt besoin à Danzig de 2 millions pour un approvisionnement extraordinaire. Ces 2 millions, je les prendrai sur les 3 que je vous demande, et ensuite je les rempla­cerai. Je désire que vous me remettiez un bordereau en règle de tous ces fonds, afin que j’en puisse diriger moi-même tous les mouvements.

 

Paris, 19 ami 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le duc de Feltre, l’armée d’Allemagne sera composée des trois corps :

1° Le corps d’observation de l’Elbe; 2° Le corps d’observation du Rhin ; 3° Le corps d’observation d’Italie.

CORPS D’OBSERVATION DE L’ELBE

Le corps d’observation de l’Elbe sera commandé par le prince d’Eckmühl. Il sera composé de cinq divisions d’infanterie et formé de la manière suivante :

1e Division : 13° léger, cinq bataillons; 17e de ligne, cinq; 30e cinq; 127e deux; total, 17 bataillons.

Le général Morand commandera cette 1e division. Chaque régiment formera une brigade.

2e Division : 15e léger, cinq bataillons; 33e de ligne, cinq; 48e, cinq; 128e deux; total, 17 bataillons.

Le général F riant commandera cette 2e division.

3e Division :   7e  léger,  cinq bataillons;   12e de ligne,  cinq; 21e, cinq; 121e deux; total : 17 bataillons.

Le général Gudin commandera la 3e division.

4e Division : 33e de ligne, quatre bataillons; 57e cinq; 85e cinq; Portugais, trois, total, 17 bataillons.

Cette 4e division sera commandée par le général …

5e Division : 25e de ligne, cinq bataillons; 61e cinq; 108e cinq; 111e cinq; total, 20 bataillons.

Cette 5e division sera commandée par le général Compans.

Le total des cinq divisions est donc de 88 bataillons, lesquels, au complet, feront environ 70,000 hommes.

Le général Hastrel sera chef d’état-major du corps d’observation de l’Elbe. Il y aura cinq adjudants commandants pour les cinq divisions, deux adjudants commandants pour l’état-major général, trente adjoints pour l’état-major général et les divisions, et vingt généraux de brigade pour commander l’infanterie.

Ce corps sera ainsi organisé aussitôt que les 4e et 5e bataillons seront arrivés, c’est-à-dire dans le courant de juin.

La cavalerie sera commandée par le général Bruyère. Elle sera de six régiments français, qui, avec deux régiments polonais de cava­lerie légère, feront huit régiments répartis en quatre brigades.

Il n’est pas question ici de cuirassiers, qui seront portes à la ré­serve générale de l’armée.

Artillerie. — Chaque régiment aura quatre pièces de régiment, ce qui fera douze pièces par division, à l’exception de la 5e, qui en aura seize.

Chaque division aura une batterie d’artillerie à cheval, composée de deux obusiers et de quatre pièces de 6 (cette batterie sera servie par une compagnie), et une batterie d’artillerie à pied, composée de deux obusiers et de six pièces de 8; ce qui fait pour les cinq divisions cinq compagnies d’artillerie à cheval, avec trente bouches à feu, savoir : dix obusiers et vingt pièces de 6 , et cinq compagnies d’artil­lerie à pied servant quarante bouches à feu, savoir : dix obusiers et trente pièces de 8.

Il y aura, en outre, une réserve d’artillerie de deux batteries à pied, chacune de deux obusiers prussiens a longue portée et de six pièces de 12; ce qui fera seize pièces en réserve, et ce qui portera l’artillerie du corps d’armée à vingt-quatre obusiers, cinquante pièces de 6 et de 8 et douze pièces de 12; en tout quatre-vingt-six bouches à feu, qui, jointes aux soixante-quatre pièces des régiments, feront cent cinquante pièces d’artillerie, sans y comprendre les batteries attachées aux divisions de cuirassiers.

 

CORPS D’OBSERVATION DU RHIN.

Ce corps se réunira de Mayence à Wesel. Il sera composé de qua­tre divisions d’infanterie.

1e Division. — 1e brigade : 5e léger, deux bataillons; 24e, qua­tre; 2e brigade : 10e régiment de ligne, quatre; Espagnols qui sont à Nimègue, deux; 3e brigade : 20e régiment de ligne, quatre; Por­tugais, deux; total, 18 bataillons.

Il y aura deux pièces d’artillerie de régiment au 24e régiment d’in­fanterie légère, aux 10e et 20e de ligne.

2e Division. — 1e brigade : 23e léger, deux bataillons; 26e, qua­tre; 2e brigade : deux bataillons d’élite du 46e de ligne; deux du 125e; régiment suisse, deux bataillons; 3e brigade : deux bataillons d’élite du 72e; deux du 126e; deux bataillons portugais; total, 18 bataillons.

3e Division. — 1e brigade : tirailleurs corses, un bataillon; tirail­leurs du Pô, un; 10e léger, quatre; 2e brigade : deux bataillons d’élite du 56e; deux du 124e; deux bataillons portugais ; 3e brigade : deux bataillons d’élite du 2e de ligne; deux régiments suisses, qua­tre; total, 18 bataillons.

4e Division. — 1e brigade : deux bataillons d’élite du 3e de ligne; deux du 4e; deux du 105e; 2e brigade : deux bataillons d’élite du 37e; deux du 93e; deux du 123e; 3e brigade : deux bataillons délite du 18e de ligne; deux du 19e; trois bataillons portugais; total, 19 bataillons.

Ce qui porte la force totale de l’infanterie de ce corps d’armée à 73 bataillons faisant environ 45,000 hommes.

La 1e division aura six pièces de régiment, la 2e en aura dix, la 3e huit et la 4e seize, ce qui fera en tout, pour les quatre divisions, quarante pièces d’artillerie de régiment.

Les régiments d’élite seront formés comme il sera dit ci-après.

Cavalerie. — La cavalerie sera composée des régiments suivants: 5e de hussards, quatre escadrons; 9e, deux; 11e, quatre; 11e de chasseurs à cheval, quatre; 12e, quatre; 23e, quatre; 24e, quatre; 7e, deux; 13e, deux; 20e, deux; total, 32 escadrons.

Ces trente-deux escadrons formeront quatre brigades.

Artillerie. — Chacune des quatre divisions d’infanterie aura une batterie d’artillerie à cheval, composée de six pièces, et une batterie d’artillerie à pied de huit pièces; ce qui fait pour les quatre divisions vingt-quatre pièces d’artillerie à cheval et trente-deux pièces d’artillerie à pied.

Il y aura, en outre, une réserve d’artillerie de deux batteries à pied, chacune de deux obusiers prussiens et de six pièces de 12; ce qui fait seize pièces en réserve.

En sorte que le total de l’artillerie du corps d’observation du Rhin sera de cent douze bouches à feu, savoir : quarante pièces de régiment , vingt-quatre pièces d’artillerie à cheval et quarante-huit pièces d’artillerie à pied; ce qui donne vingt obusiers, trente pièces de 6 et de 8, et douze pièces de 12, sans compter les pièces de régiment.

 

Paris, 19 avril 1811

Au général Lacuée, comte de Cessac,  ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris

J’ai lu avec attention votre rapport sur la remonte des corps qui sont en Allemagne, en Italie et en France.

Je comprends très bien que les dix régiments de cavalerie qui sont en Allemagne aient traité pour leur remonte en Allemagne et non à leurs dépôts, parce qu’ils ont préféré prendre leurs chevaux en Alle­magne, comme mesure plus économique et plus expéditive; les selles et les hommes disponibles des dépôts leur auront été envoyés. Mais je ne comprends pas comment le dépôt du 23e de chasseurs, qui est en Hollande, achète ses chevaux en Allemagne; c’est à son dépôt qu’il doit traiter, puisqu’il y a ses hommes, ses artistes vétérinaires, ses effets de harnachement et d’équipement : or ce dépôt est, je crois, du côté de Besançon.

Les douze régiments dont les escadrons de guerre sont en Italie et dont les dépôts sont dans la 6e division militaire doivent acheter leurs chevaux dans la 6e division militaire ; c’est là où se rendent les conscrits et l’habillement.

Je suppose que, dans les marchés faits pour les régiments qui sont en Italie, les chevaux ne doivent pas être payés si cher, puisqu’ils doivent être livrés à Besançon.

En général, je vois que les livraisons de cette première partie sont très – tardives ; cependant j’avais espéré que tout serait livré avant le 10       mai, puisque mon décret est du 8 février.

Faites-moi connaître quand la deuxième commande de chevaux pourra être faite. Je voudrais qu’elle fût faite pour tous les corps le plus tôt possible, mais surtout pour ceux de l’armée d’Allemagne, pour lesquels cette deuxième commande est de 1,600 chevaux.

Je vois par votre rapport qu’il manque 848 chevaux pour compléter l’effectif de mes régiments de cavalerie.

Je vois par les états de l’armée d’Allemagne qu’il manque 138 che­vaux; présentez-moi un projet de décret pour en autoriser l’achat.

Il est vrai qu’il manque 900 hommes; mais, outre qu’il y a des enga­gements volontaires, les régiments étant au nombre de dix et la différence étant de cent entre le complet des hommes et celui des chevaux, on peut acheter ces 138 chevaux.

Les régiments de cavalerie de l’intérieur ont besoin de 480 che­vaux. Il leur faut aussi 900 hommes; mais comme leur complet en hommes est de 100 supérieur au complet en chevaux, je crois qu’on peut ordonner cet achat.

Enfin il faut pour les régiments de l’armée d’Italie 200 chevaux.

Remettez-moi un projet de décret pour ordonner une troisième commande, qui n’aura lieu qu’en juin et sur de nouveaux ordres que vous me demanderez en juin.

Mais cela ne parait pas suffisant ; il faut préparer une quatrième commande. Elle ne peut pas regarder l’armée d’Allemagne, puisque les corps de cette armée sont au complet de 1,100 hommes et de 1,000 chevaux ; mais il faut porter à 1,100 chevaux les régiments de grosse cavalerie de l’intérieur; ce qui fera 1,100 chevaux à acheter.

Il faut porter les régiments de dragons qui sont en Italie à 900 che­vaux, ce qui fera 500 chevaux ; les régiments de cavalerie d’Italie à 900 chevaux, ce qui fera 800 chevaux; les 11e, 12e et 24e de chas­seurs et le 5e de hussards à 900 chevaux ; les 7e, 13e et 20e de chas­seurs et le 9e de hussards à 600 chevaux. Bien entendu que la qua­trième commande n’aura lieu qu’après l’appel de la réserve.

Mon intention est de faire une cinquième commande, qui aura lieu au mois de septembre, et qui aurait pour but de porter tons les régiments à 1,100 hommes et à 1,000 chevaux.

Il résulte de cela qu’en comprenant les première et deuxième com­mandes j’aurai un effectif de 10,000 chevaux à l’armée d’Allemagne; que j’aurai 16,000 chevaux dans l’intérieur, et 10,000 chevaux en Italie; total, 36,000 chevaux.

En y comprenant la quatrième commande, je ne changerais rien ou peu de chose en Allemagne; j’augmenterais de 1,100 chevaux en France, de 1,300 chevaux en Italie; ce qui me ferait près de 40,000 chevaux.

 

Paris, 19 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, le 123e régiment (hollandais), qui est arrivé au camp de Boulogne, était mal armé; il y avait beaucoup de galeux; il manquait beaucoup d’officiers, et les sous-officiers étaient peu intelligents.

Faites passer une revue de rigueur du 33e régiment léger, et faîtes-moi connaître ce que je puis en espérer. Faites mettre en état son armement, son habillement; faites-lui fournir des souliers. Le 123e n’avait qu’une paire de souliers aux pieds. Faites remplir les places d’officier et de sous-officier vacantes. Portez une grande attention sur ce régiment, et chargez un général de brigade de sa surveillance particulière. Veillez à ce que ce régiment ait sans délai tout ce qui pour­rait lui manquer.

 

Paris, 19 avril 1811

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Paris

Mon Fils, je n’approuve pas l’organisation que vous m’avez présentée, je vous en envoie une nouvelle. Vous ne fournissez pas assez d’Italiens; je veux avoir 12,000 hommes, formant quatre brigades et une seule division. Pour cela faire, il est nécessaire de mettre deux régiments entiers, comme j’ai mis le 84e et le 92e.

Je pense aussi qu’il faut emmener tout ce qu’on pourra de Dalmatie; ce ne sont pas des troupes assez sûres pour les laisser sur les derrières. En envoyant les huit bataillons de deux régiments, vous devez compléter ces bataillons en prenant dans les autres, s’il est nécessaire; rien que ces huit bataillons doivent vous faire 6,000 hommes.

Par cette nouvelle organisation vous verrez que votre corps d’armée se trouvera composé de plus de 40,000 hommes d’infanterie, y compris la garde, de 8,000 hommes de cavalerie et de plus de 140 pièces de canon. Je vous ai déjà mandé de faire faire du biscuit à Mantoue, afin de remplir tous les caissons, qu’on n’ouvrira plus que devant l’ennemi. Il est important que chaque homme ait deux paires de souliers neuves dans le sac et une aux pieds, et qu’on puisse délivrer à Vérone, Trente et Bolzano, au moment du départ, trente cartouches par homme. Ces cartouches doivent être réunies dans les dépôts d’artillerie de ces places et n’être données qu’au départ.

 

Paris, 20 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, je vous envoie l’organisation de l’armée d’Allemagne; je la compose de trois corps.

 

CORPS D’OBSERVATION DE L’ELBE.

Ce corps aura cinq divisions et quatre-vingts bataillons; chaque régiment aura cinq bataillons et formera une brigade. Il y aura quatre brigades par division, vingt généraux de brigade d’infanterie et cinq de division. Les cinq généraux de division existent; classez dans votre travail les vingt généraux de brigade.

Cette organisation ne doit être que projetée, puisqu’elle ne peut exécutée qu’en juin, temps auquel je suppose que les 5e bataillons pourront rejoindre.

Dans le travail que vous me remettrez, vous mettrez l’organisation définitive de juin en rouge, en portant pour mai l’organisation à quatre bataillons, comme elle est aujourd’hui.

Vous verrez que je compte les batteries à cheval de six pièces et les batteries à pied de huit pièces. Les compagnies d’artillerie peuvent bien servir huit pièces, puisqu’il ne faut que 70 hommes pour les huit pièces et qu’il y a 90 hommes. Ensuite je trouve que deux obusiers sont trop pour six pièces d’artillerie à pied ; les obusiers coûtent trop cher ; au lieu que deux obusiers sur huit pièces sont dans une proportion plus avantageuse.

Je désire que l’artillerie soit organisée comme elle l’est dans l’état, le plus tôt possible, sauf à porter à la réserve ce qui doit servira la 5e division.

 

CORPS D’OBSERVATION DU RHIN.

Le corps d’observation du Rhin, qui se réunit à Mayence, Wesel, Metz et Maastricht, est composé de quatre divisions; il faut me présenter la nomination des généraux de division et de brigade.

Vous voyez qu’en réunissant ces 45,000 hommes je suppose que les régiments ne doivent passer le Rhin que vers le 1er juin; mais vous porterez dans une colonne ce que je pourrai faire marcher de plus en ne passant le Rhin qu’en juillet. Vous me ferez connaître dans cette hypothèse ce que j’aurais.

Il me semble qu’indépendamment des bataillons d’élite je pourrais avoir en juillet les 1er et 2e bataillons; on laisserait sur les côtes les 3e bataillons, et l’on y enverrait les 4e. Il y aurait ainsi huit com­pagnies d’élite à l’armée, le 1er et le 2e bataillon de huit compagnies également à l’armée, ce qui ferait seize compagnies; deux bataillons de huit compagnies sur les côtes pour la défense de la France; le 5e bataillon au dépôt, recevant des conscrits pour réparer les pertes.

Il est possible que des régiments puissent fournir en juillet trois bataillons au lieu de deux; ce qui ferait vingt compagnies au lieu de seize.

Le tableau que vous ferez dresser me fera connaître la situation des choses, 1° pour passer le Rhin au 1er juillet, c’est-à-dire après avoir reçu et habillé la conscription ; 2° au 1er septembre, après avoir reçu la réserve. Je connaîtrai ainsi quelle est la force du corps d’observation du Rhin aujourd’hui, ce qu’elle sera au 1er juillet, ce qu’elle sera au 1er septembre.

Vous ne devez donner aucun ordre de mouvement; vous devez vous borner à donner des ordres pour préparer la formation des bataillons d’élite, des compagnies d’artillerie, des pièces, des caissons; mais je n’ai pas besoin de vous dire qu’il faut, sans perdre un moment, organiser l’artillerie et le génie. Faites organiser l’artillerie à Wesel et à Mayence, tant le matériel et les attelages que le personnel, afin que l’artillerie ne donne aucun retard.

Je mets dix régiments de cavalerie légère au corps d’observation du Rhin. Vous me ferez connaître combien ces régiments peuvent mettre d’escadrons et d’hommes sur pied pour le 1er juin, combien le 1er juillet, combien pour le 1er septembre, après l’appel de la réserve.

Ainsi, si l’armée d’Allemagne est aujourd’hui de 230,000 hommes, combien sera-t-elle en juillet ? De combien sera-t-elle au 1er septembre ?

Actuellement que l’armée d’Allemagne est organisée, vous devez partir de cette organisation pour régler celle de l’artillerie, du génie, des administrations et du service.

Vous sentez l’importance de tenir très secret l’ensemble de cette organisation.

 

Paris, 20 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, je vous envoie le plan d’organisation du corps d’observation d’Italie. Rédigez cette organisation convenablement. Mon intention est de ne rien envoyer de France. La 1e division sera fournie par l’Illyrie, la 2e et la 3° par les régiments français qui sont en Italie, et la 4e par l’armée italienne. Le 2e régiment d’artillerie à pied qui est en Italie, le régiment d’artillerie à cheval qui est en Italie, les pontonniers, les ouvriers, etc., qui sont en Italie, ceux qui sont en Illyrie, fourniront à tout ce corps. Il faut compléter le 84e et le 92e, en me proposant d’envoyer des hommes de tous les dépôts qui sont dans les 27e et 28e divisions militaires. L’artillerie fera partie de l’artillerie générale du parc de l’armée. Les pontonniers qui sont nécessaires pour le parc général de l’armée marcheront avec ce corps. Mon intention est de le diriger en cas d’événement par Innsbruck sur Dresde, pour se réunir avec le corps d’observation du Rhin, qui, par Wesel et Mayence, se dirigerait sur Magdeburg. Je suppose que je n’ai rien oublié. Vous me ferez connaître après cela ce qui restera en Italie aux régiments.

 

CORPS D’OBSERVATION DE L’ITALIE.

1e Division. — Cette division sera composée de deux bataillons du 8e d’infanterie légère, deux bataillons croates, trois bataillons du 84e, trois bataillons du 92e.

Le général Delzons commandera cette division. Il aura sous ses ordres les généraux de brigade Huard et (à choisir parmi ceux qui sont en Illyrie), deux commissaires des guerres et adjoints, un officier supérieur d’artillerie, deux officiers du génie, un inspecteur aux revues, un adjudant commandant (le prendre en Illyrie), et plu­sieurs officiers d’état-major pris dans le grand nombre d’officiers employés à l’état-major ou comme commandants de place ou à d’autres titres, en Illyrie.

On prendra du 2e régiment d’artillerie à pied, en Illyrie, deux compagnies d’artillerie, avec deux batteries, chacune composée et deux obusiers et de six pièces de 6, ce qui fera seize pièces de canon.

Il prendra également : un détachement d’ouvriers, une compagnie de sapeurs et un détachement du train qui sont en Illyrie; enfin tout ce qui est nécessaire pour bien former sa division, il le prendra en Illyrie.

Les deux bataillons du 8e d’infanterie légère auront leur compa­gnie d’artillerie avec leurs caissons.

Les deux bataillons croates auront également leur artillerie; les attelages et le matériel du 18e d’infanterie légère leur seront cédés pour éviter tous délais ; il suffira donc de créer la compagnie de canonniers croates.

Tout ce qui est relatif à l’état-major de cette division, aux deux bataillons du 8* et aux deux bataillons croates, sera réuni à Laybach.

Ces deux bataillons croates seront levés. On leur fera connaître que c’est pour aller sur l’Elbe. On les composera de la manière qui pourra être la plus avantageuse.

Les trois bataillons du 84e et du 92e auront chacun leur compagnie d’artillerie et leurs chevaux. S’ils avaient licencié les chevaux, ils devraient en acheter sur-le-champ en Italie, et partir le ler mai pour se rendre à Trente sous les ordres du général de brigade Huard, qui enverra les états de situation au général Delzons.

Cette division aura deux compagnies d’artillerie à pied, seize bou­ches à feu de ligne, huit pièces régimentaires; total, vingt-quatre pièces de canon. Elle aura en outre, comme il a été dit plus haut, une compagnie de sapeurs avec ses outils attelés, le tout fourni par l’Illyrie.

Le 92e et le 84e n’ont pas de quoi compléter leurs trois bataillons à 2,500 hommes. Je n’ai pas l’intention d’employer les conscrits de cette année : ces jeunes gens me feraient de mauvais soldats et périraient sur les routes d’Allemagne. Mon intention est donc que ces six  bataillons  soient complétés moyennant une  incorporation de 1,200 hommes tirés de tous les dépôts qui sont dans les 27e et 28e divisions militaires. Le ministre de la guerre me présentera à ce sujet un travail et un projet de décret. Par ce moyen, ces bataillons seront portés à leur grand complet et formeront, y compris l’artillerie et les sapeurs, une division de plus de 9,000 hommes.

Il sera tiré des provinces illyriennes : 1° une compagnie d’infirmiers qui s’y trouve; 2° une brigade de maçons constructeurs de fours; 3° des brigades de quarante boulangers.

2e Division. — La 2e division se réunira à Vérone; elle sera com­mandée par le général Broussier.

Elle sera composée de quatre brigades. Les quatre généraux de brigade seront les généraux Almeiras, Roussel, Mallet et Digonnet ; l’adjudant commandant Blanquet sera chef de l’état-major; deux adjoints d’état-major, un commissaire des guerres, un chef de batail­lon d’artillerie, un officier du génie, un sous-inspecteur aux revues seront fournis par l’armée d’Italie.

La 1e brigade sera composée de deux régiments d’élite tirés du 9e régiment et du 13e de ligne; la 2e, de deux régiments d’élite tirés du 29e et du 112e régiment; la 3e, de deux régiments d’élite tirés du 52e et du 53e de ligne, et la 4e brigade, de deux régiments d’élite tirés du 35e et du 106e.

Chaque régiment d’élite sera composé de deux bataillons d’élite : le 1er bataillon sera formé de quatre compagnies de grenadiers et le second de quatre compagnies de voltigeurs.

Les compagnies seront complétées à 150 hommes; ce qui portera chaque bataillon à 600 hommes, le régiment à 1,200 hommes, la brigade à 2,400 hommes et la division à 9,600 hommes.

Le régiment d’élite du 9e sera commandé par un colonel, celui du 13e par un major, celui du 29e par un major, celui du 112e par un colonel, celui du 52e par un major, celui du 53e par un colonel, celui du 35e par un major, celui du 106e par un colonel.

Les huit compagnies de canonniers de ces régiments marcheront avec les régiments d’élite, et, comme de raison, n’emmèneront avec elles que deux caissons de cartouches et deux caissons de transport ; elles mènent deux pièces, ce qui fera seize pièces de régiment. Il y aura, en outre, une batterie de ligne tirée de l’artillerie que j’ai en Italie et composée de deux divisions d’artillerie : savoir, une d’artillerie à cheval, composée de deux obusiers et de quatre pièces de canon, et une d’artillerie à pied, composée de deux obusiers et de six pièces de canon. Total de l’artillerie de la division, trente pièces de canon.

Une compagnie de sapeurs avec son caisson d’outils attelé sert également attachée à cette division.

Les deux régiments d’élite seront fournis sans délai et complétés de vieux soldats. Pour commander les deux bataillons du régiment d’élite, le colonel désignera les deux meilleurs des quatre chefs de bataillon du régiment.

Les bataillons d’élite du 29e et du 112e se réuniront sans délai à Florence, seront prêts à partir le 1er mai et se dirigeront sur Vérone.

3e Division. — La 3e division se réunira à Mantoue : elle sera com­posée de trois bataillons du 1er de ligne, deux bataillons du 62e, trois bataillons du 101e, deux bataillons espagnols.

Cette division sera commandée par le général Partouneaux ; elle sera composée de trois brigades. Les généraux de brigade seront les généraux Pastol, Poujet, Dufour et Heyligers. L’adjudant commandant Mariotti sera chef d’état-major.

Le 4e bataillon du 1er régiment de ligne, le 3e du 62e et le 4e du 101e de ligne, qui sont en France, iront rejoindre leurs régiments par un autre chemin; de sorte que cette 3e division, qui d’abord ne sera forte que de dix bataillons, y compris les Espagnols, le sera de treize après l’arrivée de ces renforts.

Le ministre de la guerre me fera connaître où sont les trois batail­lons qui devront rejoindre, quand ils pourront marcher et par où on devra les diriger pour les réunir.

On aura soin de placer les Espagnols hors de Mantoue en les can­tonnant à Villafranca, Borghetto, Roverbella, etc. En conséquence, le ministre de la guerre détournera la marche des 1er, 62e et 101e régi­ments, qui viennent de Rome, et, au lieu de les laisser continuer leur route sur Plaisance, les dirigera de Bologne sur Mantoue.

Cette division aura une batterie à cheval de six pièces et une à pied de huit pièces; ce qui, joint aux six pièces de régiment, fera vingt pièces de canon.

Les commissaires des guerres, l’artillerie, les officiers du génie, les sapeurs, les attelages de pièces, tout sera fourni par ce qui est en Italie.

4e Division. — La 4e division sera composée de régiments italiens; le général Fontanelli la commandera. L’artillerie, le génie, le train, les transports, les attelages seront également fournis par l’armée italienne.

Cette division aura six officiers du génie italiens, une batterie d’artillerie à cheval de six pièces et une à pied de huit pièces; total, quatorze pièces de ligne. Chaque régiment d’élite aura deux pièces de canon, et, comme il y a cinq régiments d’élite, cela fera dix pièces régimentaires. Total de l’artillerie, vingt-quatre pièces.

La 4e division aura, en outre, deux compagnies de sapeurs, deux compagnies de pontonniers, deux compagnies de transports italiens.

Cette division se formera à Brescia et sera organisée en trois brigades.

Garde royale. — La garde royale formera une division comman­dée par le général de division Pino ; elle se composera de deux bataillons d’élite, de deux d’infanterie légère et de deux bataillons de conscrits de la garde.

Total, 6,000 hommes environ et 600 chevaux.

L’artillerie de cette division se composera d’une batterie d’artillerie à cheval, de douze pièces et d’une réserve de douze pièces de 12, servies par l’artillerie à pied italienne.

La garde se tiendra à Milan prête à partir. Chaque bataillon de la garde aura un caisson d’infanterie et un pour le transport des vivres, ce qui fera 12 caissons, et en outre 3 caissons pour porter les objets divers; en tout 15 caissons.

Cavalerie. — Le général Grouchy commandera la cavalerie de ce corps d’armée.

Cavalerie légère. — La cavalerie légère formera une division composée de quatre brigades.

La le brigade, commandée par le général Gauthrin, aura le 6e de hussards et le 8e de chasseurs. La 2e brigade, commandée par le général Gérard, aura le 6e et le 25e de chasseurs. La 3e brigade, commandée par le général Thiry, aura le 4e et le 9e de chasseurs. La 4e brigade, commandée par un général italien, sera composée de deux régiments de chasseurs italiens.

Réserve de dragons. — Trois régiments de dragons français et un régiment de dragons italiens formeront une réserve de cavalerie.

Deux batteries d’artillerie à cheval seront attachées à cette division.

Les dépôts de ces régiments de cavalerie, qui sont dans la 6e divi­sion militaire, aussitôt qu’ils auront reçu leurs conscrits et leurs remontes, formeront un régiment de marche qui viendra renforcer les escadrons de guerre.

Artillerie. — Le général d’Anthouard commandera l’artillerie du corps d’armée ; cette artillerie sera composée ainsi qu’il suit :

Artillerie de régiment Artillerie de ligne Artillerie à cheval
1e Division    8 8 6
2e Division 16 8 6
3e Division 6 8 6
4e Division 10 8 6
Garde royale 12 6
Dragons 12
Réserve 16
Totaux 40 60 42
Total général 142

La réserve sera composée de deux obusiers et six pièces de 12 ita­liens et de deux obusiers et six pièces de 12 français.

Indépendamment de ce, le ministre de la guerre me fera un détail du double approvisionnement nécessaire; cela doit entrer dans la composition du parc de l’armée d’Allemagne. L’Italie fournira tout ce qu’elle pourra fournir; ce qui sera l’objet d’un travail particulier.

Équipages militaires. — Le 9e bataillon d’équipages militaires, qui est à Plaisance, doit faire partir au 1er mai pour Vérone une première compagnie; il en fera ensuite partir une seconde, et toutes les fois qu’il aura ainsi une compagnie prête il la mettra en marche pour Vérone.

État-major général et dispositions diverses. — Le vice-roi commandera.

Le général Porson sera chef d’état-major et se rendra à Vérone ; quatre adjudants commandants lui seront attachés, ainsi que les officiers d’état-major nécessaires.

Le général Franceschi sera attaché à l’état-major pour servir dans le besoin.

Un général pour commander le génie sera proposé.

On proposera également un directeur du parc pour l’artillerie.

L’ordonnateur Joubert sera l’ordonnateur en chef.

Le ministre de l’administration de la guerre présentera tout et qui est nécessaire pour l’organisation administrative de ce corps d’armée, médecins, chirurgiens, boulangers, administrateurs, etc.

Le royaume d’Italie formera une compagnie d’infirmiers italiens, une brigade de maçons constructeurs de fours et une brigade de 160 boulangers italiens, de sorte que ce corps aura 200 boulangers, y compris les 40 tirés d’Illyrie.

Le corps d’armée doit se réunir sur l’Adige, l’Oglio et le Mincio.

 

Paris, 20 Avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, je vous renvoie les renseignements que vous me donnez sur les Portugais; ces renseignements ne sont pas suffisants. Il faut me faire connaître leur organisation, régiment par régiment, bataillon par bataillon, compagnie par compagnie. J’ai besoin de prendre une mesure à l’égard de ces troupes. Mon inten­tion est de les employer à l’armée. Bien nourries, bien payées et mêlées à d’autres, elles seront utiles; mais il est nécessaire de les faire sortir de France, je ne puis pas laisser des troupes suspectes sur mes derrières. Je ne puis pas non plus les désarmer, puisqu’ils sont venus volontairement et que je n’ai pas à m’en plaindre. Par l’organisation que vous recevrez, vous verrez que j’en emploie plu­sieurs bataillons à l’armée. Les trois bataillons d’élite seront employés à l’armée d’Allemagne; je me servirai des autres comme ils sont, en les mêlant avec des Espagnols. Présentez-moi demain un projet pour tirer parti de ces hommes, dissoudre les dépôts, et pour faire mar­cher ces hommes d’une manière utile pour mon service.

 

Paris, 20 avril 1811

Au comte Mollien, ministre du trésor public, à Paris

Monsieur le Comte Mollien, je reçois votre lettre du 19 sur l’em­prunt de la Saxe. Je vous autorise à voir la maison Laffitte et à lui faire connaître que je protège cet emprunt, enfin à faire tout ce qui vous sera possible pour le faire réussir. Il me semble que, sans rien démasquer, il serait convenable de verser sans délai un million; vous en feriez l’avance, et vous vous concerteriez avec Laffitte pour faire croire que c’est lui qui a déjà rempli ce million. Ce qui est pressant, c’est que ce million soit remis sans délai à la Saxe pour l’aider dans les dépenses qu’elle fait pour les armements des Polonais. Je désire donc que le programme de cet emprunt soit sur-le-champ publié, et que Laffitte dise qu’il a assez de demandes pour pouvoir assurer un million. Il est probable que, quand Laffitte aura instruit le ministre de Saxe, celui-ci enverra un courrier. Laffitte peut de cela se faire du crédit, se donner de l’importance et en donner à la place.

 

Paris, 20 avril 1811

A Caroline Napoléon, reine des Deux-Siciles, à Naples

Ma Sœur, j’aime à vous associer à tous les événements heureux pour moi, et je désire que vous soyez la marraine du fils dont la naissance m’a comblé de joie. J’espère que la santé de Votre Majesté lui permettra de se rendre bientôt a Paris pour les cérémonies du baptême, que j’ai fixé au 2 du mois de juin prochain; et, si cette espérance devait être trompée, je l’engage à transmettre sa procura­tion à la personne à qui elle voudra l’accorder. Il me sera très agréable que ces nouveaux liens qui se formeront entre mon fils et ma sœur soient pour le roi de Rome un titre de plus à votre affec­tion. Recevez les assurances de la tendre affection et de la haute estime avec lesquelles je suis,

De Votre Majesté, le bon frère.

 

Paris, 20 avril 1811

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Paris

Mon Fils, je vous prie de me rapporter demain ce budget; relisez-le avec attention, pour voir s’il n’y a rien qui puisse indisposer le pays: ce n’est pas le moment de rien faire qui puisse donner lieu à causer.

 

Paris, 21 avril 1811

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Je vous envoie une lettre de l’amiral Ver Huell qui mérite la plus sérieuse considération; car, s’il était vrai qu’on pût construire des vaisseaux à Cuxhaven, ce serait une vraie découverte, puisque les bois qui viendraient à Cuxhaven ne peuvent venir à Anvers. Prenez les mesures nécessaires pour faire sonder cette rivière, et envoyés

 

Paris, 11 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Il faut mander au roi de Naples que je n’entends pas qu’il permette à mes généraux de quitter l’armée sans ma permission; que c’est contraire à toutes les règles.

Envoyez des ingénieurs pour reconnaître le port de Cuxhaven. Pas un seul de vos agents employés dans la marine de Hambourg n’est arrivé; faites-moi connaître quand ils arriveront.

Instruisez-moi de l’individu que vous chargerez de sonder et de prendre en détail connaissance de l’Elbe.

Les dessins pour les corvettes n’ont pas encore été envoyés.

 

Paris, 22 avril 1811

Au comte de Montalivet, ministre de l’intérieur, à Paris

Il faut achever l’organisation des deux départements de Rome et du Trasimène. Les collèges ne sont pas formés. Faites-moi un rap­port sur les sieurs Spada et Passaglia, sous-préfets de Viterbe et Perugia. A-t-on fait la délimitation du territoire des arrondissements communaux ? Le dépôt de mendicité de Rome n’est pas créé. Il avait été décrété une prime pour l’augmentation des oliviers. Où cela en est-il ? Le port de Cività-Vecchia a besoin d’urgentes réparations; faites-moi un rapport sur ce port.

 

Paris, 22 avril 1811

A M. Gaudin, duc de Gaète, ministre des finances, à Paris

Je désire que vous fassiez connaître à chaque ministre que, dans la première semaine de mai, je tiendrai un conseil pour revoir tous les budgets des exercices arriérés, et surtout ceux de 1810 et 1811,  et arriver aux résultats nécessaires pour bien arrêter le budget de 1811, qui ne l’a été jusqu’à présent que provisoirement. Vous en préviendrez les ministres pour qu’ils vous envoient avant le mois de mai leurs états, dont vous devez me présenter le résumé. Le princi­pal but qu’il s’agit de se proposer est de savoir si les fonds accordés pour les exercices antérieurs sont suffisants. Je suis porté à penser qu’ils le sont pour 1808 et 1809, moyennant les fonds de réserve qui existent pour ces exercices; mais il est nécessaire que le trésor éclairasse ce qu’il a à payer à la guerre en sus du budget.

Quant à 1810, vous évaluez les recettes à huit cent cinq millions, au lieu de sept cent quatre-vingt-sept.

Dans les deux cent vingt-cinq millions de la guerre, dix millions sont portés pour l’extraordinaire de la solde de l’armée d’Espagne. Il faut savoir si cela sera suffisant. La solde n’est portée en totalité que pour cent trente et un millions, sans compter la solde des re­traites; cette somme sera-t-elle suffisante ? Voilà la question.

Si trente millions étaient inutiles au fonds de réserve, je voudrais les ôter à cet exercice, mais après que vous vous serez bien assuré par les états des ministres qu’ils n’ont pas besoin de ce fonds. Cette diminution, vous la feriez d’un trait de plume, en ôtant les vingt millions des produits extraordinaires de la régie des douanes, et des recettes diverses et accidentelles jusqu’à la concurrence de dix mil­lions, et en reportant ces produits sur l’exercice de 1811. Par ce moyen, le budget des recettes de 1811, au lieu de neuf cent cinq millions, serait de neuf cent trente-cinq millions. Mon intention est même d’y ajouter dix millions de domaines situés en France et au Piémont; ce qui porterait les recettes à neuf cent quarante-cinq millions.

Enfin je vous prie de voir si l’évaluation des recettes ne pourrait pas être augmentée. Il me semble que les sels et les tabacs au delà des Alpes peuvent rapporter plus de huit millions depuis la réunion de Rome; que les droits réunis peuvent rapporter plus de cent vingt millions, et que, si l’enregistrement a rendu cent quatre-vingt-treize millions en 1810, il doit rendre davantage en 1811, puisqu’il profite de l’augmentation de territoire provenant des départements romains, des Bouches-de-1’Escaut et du Rhin.

Enfin il faudrait mettre un article de recette pour le département de la Lippe, qui rendra bien deux à trois millions; par ces moyens réunis, je voudrais faire monter le budget des recettes à neuf cent cinquante millions. Vous verrez, par les budgets de la guerre et de l’administration de la guerre, que je ne suis pas loin d’avoir besoin de cette somme. Le ministre de la guerre n’a que deux cent cinquante-deux millions; je suis porté a croire qu’il aura besoin de deux cent quatre-vingts millions : augmentation, vingt-huit millions. Le mi­nistre de l’administration de la guerre n’a que cent quarante-deux millions; il aura besoin de cent soixante et dix millions : augmenta­tion, vingt-huit millions. Ainsi vingt-huit millions de supplément à la guerre et vingt-huit millions à l’administration de la guerre feraient un supplément de cinquante-six millions. Il faut calculer sur une augmentation totale de soixante millions.

Vous porterez dans votre compte le budget des dépenses à neuf cent un millions, mais vous y comprendrez trente-huit millions et recette : restent huit cent soixante-trois millions; avec l’augmentation de soixante millions, cela fera neuf cent vingt-trois millions.

Vous voyez que neuf cent trente millions de recette sont de rigueur; neuf cent cinquante millions feront voir à l’Europe une immense prospérité.

 

Paris, 22 avril 1811

A M. Gaudin, duc de Gaète, ministre des finances, à Paris

On m’assure que les biens des évêques, chapitres et corporations religieuses, confisqués à Rome, ne sont pas encore dans les mains du domaine à Rome.

 

Saint-Cloud, 23 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

L’arrivée de la division de la Cerdagne et de la division du général Plauzonne, qui sont composées de troupes d’élite, donnera au général Baraguey d’Hilliers un renfort de plus de 14,000 hommes, et le mettra à même d’assiéger vigoureusement Figuières et de contenir toute la province. S’il n’y a qu’un millier de miquelets dans la forteresse, il est probable que le siège peut en être brusqué; ordonnez qu’on en fasse les préparatifs à Girone.

Je suis étonné que le général Baraguey d’Hilliers mette dans la place de Girone des gendarmes catalans, après ce qui lui est arrivé à Figuières par la trahison des Catalans.

 

Saint-Cloud, 23 avril 1811

Au général Duroc, duc de Frioul, grand-maréchal du palais, à Paris

Pourquoi ne laisse-t-on pas au public la jouissance de la terrasse de l’eau ? Donnez ordre qu’on lève les consignes et que le public puisse s’y promener comme à l’ordinaire.

 

Saint-Cloud, 24 avril 1811

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Bassano, je vous envoie une lettre du ministre du trésor sur l’emprunt de la Saxe. Faites sentir au ministre de Saxe l’importance de lever tous les obstacles pour avoir de l’argent pour les dépenses des Polonais, acheter des chevaux pour remonter la cavalerie et compléter l’artillerie. Mais il n’y a pas un moment à perdre.

Écrivez dans le même sens au baron Bourgoing, pour qu’on lève tous les obstacles.

 

Saint-Cloud, 24 avril 1811.

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures

Monsieur le Duc de Bassano, remettez-moi un projet de circulaire à mes ministres près les princes de la Confédération, pour demander que des dispositions soient faites pour tenir les contingents prêts à marcher, puisque les Russes ont abandonné la Finlande et la Mol­davie et menacent le Grand-Duché. Apportez-moi cette circulaire pour que je la corrige avec vous.

 

Saint-Cloud, 24 avril 1811

Au comte Mollien, duc de Gaète, ministre du trésor public, à Paris

Monsieur le Comte Mollien, j’ai lu avec attention vos états et votre rapport sur la solde de 1810. Tout cela est loin d’être clair. J’ai peine à croire que  l’armée d’Allemagne ait coûté 7,550,000 francs pour 1810, quand elle était en partie payée par la Westphalie et les villes hanséatiques. Je n’aurai des idées claires que quand vos états seront ainsi conçus : 1° solde évaluée en 1810 ; 2° payé par la Westphalie ; 3° par les villes hanséatiques ; 4° par le trésor de France. Total. Alors il ne restera aucun doute.

Je désire que vous me fassiez le même calcul pour l’armée d’Espa­gne : solde évaluée en 1810.. . payé par l’Espagne sur les contri­butions. . . par le trésor de France. . . Reste dû. . .

Même état pour l’armée de Portugal.

Les états que vous m’avez remis ne me paraissent pas clairs; je crains qu’il ne se glisse des doubles emplois qui donnent lieu à bien des abus.

Je désire que vous me fassiez un aperçu de la solde en 1811 sur le même plan : solde évaluée en 1811. .. payé par la Westphalie à raison de 12,500 hommes. .. payé sur les fonds des trois nouveaux départements qui n’entrent pas au budget. . . .

Vous ferez le même travail pour les armées d’Espagne, en distin­guant l’armée du Nord, celle du Midi, du Centre, de l’Aragon, de la Catalogne, et notant ce qui est payé par le trésor, ce qui est payé sur les contributions du pays. Même chose pour l’armée de Portugal.

Je vois que j’ai envoyé à l’armée de Portugal, en cinq envois dif­férents, 9 millions. Faites-moi connaître jusqu’à quel mois ces neuf millions solderont cette armée. Je vois par l’un de vos états que 6,780,000 francs sont pour 1810 et 2,220,000 francs pour 1811.

Faites-moi un rapport sur la disposition que vous voulez faire d’une partie du fonds de 10 millions pour les armées d’Espagne et de Por­tugal. Cela doit être en sus du fonds de 2 millions que j’ai accordé.

 

Saint-Cloud, 24 avril 1811

Au comte Bigot de Préameneu, ministre des cultes, à Paris

Monsieur le Comte Bigot Préameneu, vous trouverez ci-joint une circulaire aux évêques. Vous ne la publierez pas; mais vous réunirez chez vous le conseil ecclésiastique, et vous lui communiquerez cette lettre comme étant définitivement arrêtée. Vous recueillerez les obser­vations auxquelles elle donnera lieu, et vous me ferez connaître, à l’insu de tous, l’effet qu’elle aura fait sur le comité et ce que vous eu aurez conclu qu’il y aurait à y changer. Vous ferez connaître à l’archevêque de Tours et aux évêques de Nantes et de Trêves que je les ai choisis pour être chargés d’une mission auprès du Pape. Il est néces­saire qu’ils partent vendredi prochain. Mon intention est que leur mission soit tenue très secrète. Ils se rendront à Savone, en passant par Turin. Vous les munirez des autorisations nécessaires auprès du préfet et de l’officier qui commande le palais du Pape, pour qu’ils soient considérés pour ce qu’ils sont. Je vous envoie leurs instruc­tions. Vous leur ferez remettre par la chancellerie les pleins pouvoirs nécessaires pour conclure une convention avec le Pape ou ses ayants cause. Demain jeudi, à midi, vous m’amènerez ces trois évêques. Ils auront connaissance de la circulaire. Il sera nécessaire, à cet effet, que le conseil ecclésiastique soit réuni chez vous demain à neuf heures du matin, afin que vous lui en donniez communication. Je ferai connaître aux trois députés mes intentions,  qui sont les mêmes que celles exprimées dans l’instruction que vous rédigerez règle et que vous m’apporterez demain à signer.

 

Saint-Cloud, 24 avril 1811

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin , il est convenable que vous envoyiez un officier au général Suchet pour lui faire connaître que, par l’infidélité de deux gardes-magasins qui étaient Catalans, une porte d’un des magasins de Figuières, qui donnait sur le fossé, a été ouverte à deux heures de nuit, et que 800 miquelets se sont introduits par cette porte dans la place et ont pris dans leurs lits 500 Napolitains et Italiens et 150 Français qui étaient dans le fort ; que cet événement désagréable a obligé le général Baraguey d Milliers à concentrer ses forces autour de Figuières; qu’il est donc nécessaire qu’il se porte sur Tarragone; qu’il tienne en respect Campo Verde et l’empêche de faire aucune diversion; que la saison est favorable, et que ce serait un grand malheur si la belle armée qu’il a restait inactive.

 

Saint-Cloud, 24 avril 1811

Au général Duroc, duc de Frioul, grand-maréchal du palais, à Paris

Je vous envoie la copie d’un décret sur le recrutement extraordi­naire de la Garde. Vous verrez que tous les bataillons d’infanterie légère et de ligne fournissent chacun deux hommes, savoir : un homme pour les chasseurs et un pour les grenadiers. Je ne comprends pas les 5e bataillons. Cela produira environ 500 hommes pour chaque arme de chasseurs et grenadiers; 200 hommes leur seront fournis par les fusiliers, ce qui fera 700 hommes, qui porteront à 2,400 hommes les deux régiments des grenadiers et des chasseurs.

J’ai ordonné que les quatre régiments de tirailleurs fourniraient 300 hommes pour les fusiliers, et les quatre régiments de volti­geurs autant. Les régiments de fusiliers, au lieu de perdre, gagne­ront 100 hommes.

Quant au 2e régiment de grenadiers, il suffit de le tenir au complet; les 80 hommes qui lui manquent lui seront fournis par les quatre régiments hollandais, à raison de 20 hommes chacun.

Par ce moyen, la Vieille Garde, au lieu de 4,800 hommes, aura plus de 6,000 hommes.

Je vois, par l’état de situation de la Garde au 15 avril, que les fusiliers-chasseurs avaient en Espagne 1,600 hommes; ce qui fait plus de 200 hommes par compagnie. Ils doivent fournir 200 hommes ; il leur en restera 1,400; ils recevront 300 hommes; ils seront donc au delà du complet.

Les fusiliers-grenadiers ont 1,500 hommes en Espagne. Les quatre régiments de voltigeurs ont 5,500 hommes; ils fourniront 300 hommes ; il leur restera plus de 5,000 hommes, ou 160 hommes par compagnie.

Même observation pour les tirailleurs.

J’ai à Paris 300 fusiliers ou voltigeurs et 300 fusiliers ou ti­railleurs; ce qui peut faire un bataillon de 600 hommes. Ils reçoi­vent 2,000 conscrits, ce qui fera 2,600 hommes. Je compte donner ces 2,600 hommes aux cadres des ler régiments de voltigeurs et de tirailleurs qui viennent d’Espagne; ce qui fera un beau régiment et permettra à la Garde de faire marcher 8,000 hommes d’infanterie. Les trois bataillons de sergents et de caporaux sont de 2,400 hom­mes. Je pourrai donc disposer de 10,000 hommes d’infanterie de la Garde pour aller à l’ennemi. Il faudra tenir la main à ce que les trois bataillons soient complétés par la partie de la Garde qui est en Espagne.

Voilà pour le moment présent. Mais, si la Garde ne part qu’en juillet, je la composerai ainsi, savoir : 1er régiment de grenadiers, 1,600 hommes; 2e régiment de grenadiers, en me servant du cadre du 1er régiment de tirailleurs qui vient d’Espagne, 1,600 hommes; 1er régiment de chasseurs, 1,600 hommes; 2e régiment de chas­seurs, en me servant du cadre du 1er régiment de voltigeurs, l,600 hommes; 2e régiment de grenadiers hollandais, 1,600 hom­mes; deux bataillons de fusiliers-sergents, 1,600 hommes; deux bataillons de tirailleurs et de voltigeurs-caporaux, 1,600 hommes; un 5e régiment de tirailleurs, 1,600 hommes; un 5e régiment de voltigeurs, 1,600 hommes. Total, dix bataillons de la Vieille Garde et huit de la Jeune : dix-huit bataillons ou 15,000 hommes; ce qui, avec 3,000 Italiens, me ferait 18,000 hommes, ou trois belles divi­sions de la Garde à pied.

 

Saint-Cloud, 24 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, vous trouverez ci-joint le travail du ministre pour l’organisation et l’administration de votre corps d’armée. J’ai décidé qu’on n’enverra que les trois quarts de ce qui est proposé dans ces états. Ainsi, au lieu de 611 employés et de 650 sous-employés pro­posés, vous pouvez compter sur 450 employés et environ 500 sous-employés. Cela sera suffisant. Quelques employés sont utiles et trop d’employés gênent.

 

Saint-Cloud, 24 avril 1811

Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant l’armée d’Allemagne, à Hambourg

Mon Cousin, vous trouverez ci-jointes les bases pour l’approvi­sionnement de Magdeburg. Il est nécessaire que vous fassiez des instances auprès de la Westphalie pour que cette puissance complète cet approvisionnement. Comme la base de 15,000 hommes pour un an est considérable, il faudrait demander que le premier tiers existât au 1er juin, le deuxième au 1er août et le troisième au 1er septembre; à moins que des circonstances imprévues n’obligent d’accélérer la mesure. Cette manière de procéder la rendrait plus supportable pour le gouvernement westphalien; mais l’important, c’est que le premier tiers existe. Ce sera donc pour 15,000 hommes pendant quatre mois, ou pour 10,000 hommes pendant six mois.

 

Saint-Cloud, 24 avril 1811

A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel

J’ai reçu votre lettre du 17 avril. Le prince d’Eckmühl n’a jamais songé à prendre votre 1er de cuirassiers.

Je vois avec plaisir que vous pouvez avoir deux divisions formant 20,000 hommes, dont 2,500 de cavalerie. Les 4,000 hommes que vous avez à Danzig y sont-ils compris ? Je vous prie de m’envoyer l’état de situation de ces troupes et l’organisation que vous voulez leur donner. Combien tout cela aura-t-il de pièces d’artillerie, de caissons et de transports militaires ? Il vous faudrait l’artillerie suivante : au moins une compagnie d’artillerie légère pour la cavalerie; il serait bon d’en avoir une par division, mais à la rigueur une peut suffire; il vous faudrait quatre divisions d’artillerie à pied. L’artillerie légère servirait deux obusiers et quatre pièces de 6; l’artillerie à pied ser­virait par division deux obusiers et six pièces de 6 ; ce qui ferait huit obusiers et vingt-quatre pièces de 6 pour l’artillerie. De plus il vous faudrait en réserve, pour la garde, deux compagnies d’artillerie à pied, chaque compagnie servant deux obusiers et six pièces de 12 ; ce qui ferait pour la réserve quatre obusiers et douze pièces de 12. Total de l’artillerie qui vous est nécessaire : artillerie à cheval, deux obusiers, quatre pièces de 6; artillerie à pied, huit obusiers, vingt-quatre pièces de 6 de réserve, quatre obusiers et douze pièces de 12; total, quatorze obusiers et quarante pièces. Total général, cin­quante-quatre bouches à feu.

Or, pour cinquante-quatre bouches à feu, y compris les caissons d’infanterie, il faut au moins 300 voitures; ce qui fait 1,500 chevaux. Indépendamment de cette artillerie de ligne, il faut former votre artillerie de régiment. Chaque régiment peut avoir sa compagnie, qui servira deux pièces de 3 ; en supposant que vous ayez dix régi­ments, cela vous fera encore vingt pièces de canon. Ce qui portera de cinquante-deux à soixante et quatorze le nombre de pièces de canon de votre armée.

Du moment que vous avez les attelages, les harnais, les hommes du train, les canonniers et les officiers nécessaires pour servir cette artillerie, je ne verrai point de difficulté à vous fournir la plus grande partie du matériel.

Il faudrait aussi avoir quatre compagnies de sapeurs avec dix caissons attelés chargés d’outils.

Alors vous formeriez un petit corps d’armée, auquel on pourrait joindre les troupes du grand-duché de Berg et peut-être quelques autres troupes de la Confédération ; vous auriez ainsi sous vos ordres un corps d’armée qui pourrait se porter partout. Faites-moi un projet là-dessus, en y mettant le nombre d’officiers d’artillerie et du génie que vous avez. Si vous réunissez le personnel que je viens de vous indiquer, je ne verrai pas de difficulté à compléter votre corps d’armée avec les petits contingents de la Confédération à 30,000 hommes, qui vous formeraient alors trois belles divisions.

 

Saint-Cloud, 25 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Je vous ai fait connaître mes intentions sur Flessingue. Je ne suis point d’opinion que les 200,000 francs qu’on avait destinés aux ou­vrages du plateau soient employés aux fronts de Flessingue du côté de Rammekens. Il est possible que ce point se trouve le plus faible de la place; mais les travaux faits au plateau ont un grand avantage, en ce qu’ils ont une action immédiate pour prolonger la défense do fort Montebello, et qu’au fort Montebello est attachée une des grandes propriétés de Flessingue. Ainsi je désire qu’on travaille, comme il a été déterminé, aux ouvrages pour occuper le plateau.

 

Saint-Cloud, 26 avril 1811

Au comte Bigot de Préameneu, ministre des cultes, à Paris

Monsieur le Comte Bigot Préameneu, je vous envoie la circulaire que j’ai signée. Expédiez-la sans délai à tous les évêques. Je vous renvoie également l’instruction pour les trois évêques qui se rendent à Savone [2]MM. de Barrai, Duvoisin et Maonay . Faites-moi connaître les instructions que vous leur don­nerez. Il est nécessaire que vous leur fassiez connaître qu’ils ne doi­vent avouer leurs pouvoirs qu’au moment où ils verraient le Pape disposé à traiter; qu’ils sont autorisés à appeler le cardinal Spina si le Pape le désirait; qu’ils peuvent s’ouvrir au préfet [3]M. Chabrol de Volvic, préfet du département de Montenotte , qui est un homme sûr et intelligent; qu’ils peuvent négocier et amener la négo­ciation à fin; mais qu’ils doivent, avant de rien signer, vous envoyer la minute de la convention qu’ils pourraient faire, afin d’être bien assurés qu’elle aura mon approbation, avant de la signer; que le jour de leur arrivée à Savone une estafette partira pour Turin, où elle rencontrera l’estafette de Paris, et tous les jours pendant leur séjour à Savone ; qu’ainsi on pourra avoir des nouvelles en quatre jours; qu’également l’estafette qui part tous les jours de Paris por­tera des lettres pour eux; qu’arrivées à Turin ces lettres leur seront envoyées par une estafette particulière; que, s’ils voulaient trans­mettre quelque chose par le télégraphe de Turin, ils pourraient adres­ser leur dépêche télégraphique au chef d’état-major du prince Borghese, qui la fera passer par le télégraphe et leur enverra la réponse par une estafette spéciale; que vous donnerez ordre de préparer leur logement à Savone de manière qu’ils soient ensemble et d’une manière conve­nable; qu’ils doivent tâcher d’être arrivés avant le 6 mai.

Vous aurez soin d’écrire par l’estafette de ce soir à l’officier de gen­darmerie qui commande le palais du Pape, pour le prévenir de l’arri­vée des évêques. Vous lui prescrirez de leur laisser la communication libre et entière avec le Pape, et de se conformer à tout ce qu’ils feront. Vous écrirez en même temps au préfet pour qu’il fasse préparer leur logement et pour qu’il organise l’estafette de Savone à Turin, et au prince Borghèse pour le télégraphe.

Vous pourrez prendre les fonds nécessaires pour les dépenses sur l’extraordinaire des cultes, qui est à votre disposition particulière; tout cela se régularisera après.

 

Saint-Cloud, 25 avril 1811.

CIRCULAIRE POUR LA CONVOCATION DU CONCILE NATIONAL.

Monsieur l’évêque de…..     les églises les plus illustres et les plus populeuses de l’Empire sont vacantes; une des parties contractantes du Concordat l’a méconnu. La conduite que l’on a tenue en Allema­gne depuis dix ans a presque détruit l’épiscopat dans cette partie de la chrétienté. Il n’y a aujourd’hui que huit évêques ; grand nombre de diocèses sont gouvernés par des vicaires apostoliques. On a troublé les chapitres dans le droit qu’ils ont de pourvoir, pendant la vacance du siège, à l’administration du diocèse, et Ton a ourdi des manœu­vres ténébreuses tendant à exciter la discorde et la sédition parmi nos sujets. Les chapitres ont rejeté des brefs contraires à leurs droits et aux saints canons.

Cependant les années s’écoulent; de nouveaux évêchés viennent à vaquer tous les jours; s’il n’y était pourvu promptement, l’épiscopat s’éteindrait en France et en Italie comme en Allemagne. Voulant pré­venir un état de choses si contraire au bien de la religion, aux prin­cipes de l’Église gallicane et aux intérêts de l’État, nous avons résolu de réunir, au 9 juin prochain, dans l’église de Notre-Dame de Paris, tout les évêques de France et d’Italie en concile national.

Nous désirons donc qu’aussitôt que vous aurez reçu la présente vous ayez à vous mettre en route, afin d’être arrivé dans notre bonne ville de Paris dans la première semaine du mois de juin.

 

Saint-Cloud, 26 avril 1811

INSTRUCTIONS POUR M. L’ARCHEVÊQUE DE TOURS ET MM. LES ÉVÈQUES DE NANTES ET DE TRÊVES.

Nous avons convoqué un concile qui s’assemblera le 9 juin pro­chain pour mettre un terme aux circonstances fâcheuses de l’Église. Nous considérons le Concordat comme n’existant plus, puisqu’une des parties contractantes l’a violé. Et nous entendons que nos évêques soient institués comme ils l’étaient avant le concordat de Fran­çois 1er, que nous avions renouvelé, et de la manière qui sera établie par le concile et qui aura reçu notre approbation.

Cependant nous avons résolu de vous envoyer près du Pape, pour lui exposer l’état affligeant de la chrétienté et les malheurs que pro­duisent et peuvent produire l’ignorance et l’obstination de ses conseils. Nous avons ordonné à notre chancellerie de vous expédier des pou­voirs en forme pour vous autoriser à négocier, conclure et signer une convention; mais notre intention est que vous ne vous serviez de ces pouvoirs que toutes les fois que vous trouveriez le Pape dans une disposition d’esprit raisonnable, et qu’éclairé par vos conseils et vos avis il abandonnerait l’esprit de vertige qui le conduit depuis plu­sieurs années.

Nous avons voulu vous faire connaître nous-même les conditions des conventions que vous êtes autorisé à conclure avec le Pape, et dont l’une aurait pour objet les affaires particulières à la circonstance de l’institution des évêchés, et l’autre les affaires générales en tout ce qui concerne le Pape. Chacune de ces conventions est absolument indépendante de l’autre : elle doit être par acte séparé.

Pour ce qui regarde l’institution des évêques, nous consentons et nous nous engagerons à revenir au Concordat, aux deux conditions suivantes :

1° Que le Pape instituerait tous les évêques que nous avons nommés ;

2° Qu’a l’avenir notre nomination serait communiquée au Pape dans la forme ordinaire; qu’elle serait en même temps notifiée au métropolitain; que, si trois mois après la cour de Rome n’avait pas institué, l’institution devrait être donnée par le métropolitain à l’égard de ses suffragants et par le plus ancien des suffragants à défaut de métropolitain, ou lorsqu’il s’agirait de son siège; le tout, sans qu’on puisse alléguer aucune raison de non communications, d’empêche­ment de territoire, d’interception de courriers.

Une autre convention peut se faire, si telle est l’intention du Pape.

Son but serait de régler les affaires générales; elle pourrait reposer sur les bases suivantes :

Nous accorderons au Pape le retour dans la métropole de Rome, pourvu qu’il nous prête le serment que prescrit le Concordat et que les papes ont toujours prêté aux empereurs.

Dans le cas où il refuserait de prêter ce serment, nous ne pour­rons consentir à ce qu’il demeure à Rome ; mais nous consentirons à ce qu’il aille résider à Avignon ; que là il ait l’administration de tout le spirituel avec la chrétienté; que les puissances chrétiennes qui voudront avoir auprès de lui des chargés d’affaires ou des résidents en soient maîtresses, et que ces chargés d’affaires, résidents ou mi­nistres aient les immunités accordées par le droit public aux agents diplomatiques ; qu’il ait les honneurs souverains et la liberté de com­muniquer avec les églises étrangères; que, quant à son temporel, deux millions seront affectés à son entretien ; ces deux millions, payés soit par nous, soit par tous les princes chrétiens, seront pris sur les bénéfices de la chrétienté, selon que cela s’accordera le mieux avec la manière de voir du Pape.

Quant à l’exercice du pouvoir spirituel du Pape dans l’intérieur de notre Empire, si le Pape va à Rome et prête serment, nous n’exi­geons rien autre chose; s’il ne croit pas devoir prêter ce serment et qu’il aille à Avignon, nous exigerons de lui la promesse qu’il ne fera rien dans notre Empire de contraire aux quatre propositions de l’Église gallicane.

Nous ne pouvons que répéter que ces deux objets sont distincts et ne peuvent jamais être confondus dans une même convention ; car l’institution canonique n’est pas une faveur que nous fait le Pape, c’est, au contraire, une marque de déférence et de considération accordée en France aux papes. Cela ne doit donc rien avoir de com­mun avec la seconde convention.

Nous devons vous dire que nous n’admettons aucun délai ni pré­texte quels qu’ils soient : les affaires de l’Église languissent depuis trois ans; elles ne peuvent traîner plus longtemps. Il est indispensa­ble que votre mission soit terminée et que vous soyez de retour à Paris avant le 1er juin.

Si ces premiers articles parviennent à être réglés, vous pourrez assurer le Pape de notre désir de nous entendre pour arranger et aplanir toutes les questions subséquentes, telles que les diocèses à établir à Bois-le-Duc, Amsterdam, Rotterdam, Hambourg, Montauban, Bremen, etc., les divers objets relatifs à la gloire et à la pro­spérité du christianisme, ce qui sera relatif à la protection à accorder aux religieux de la terre sainte, à la reconstruction du Saint-Sépulcre, aux missions, au rétablissement de la Daterie, des archives pontifi­cales et de ce qui est nécessaire et convenable à un pape pour le libre exercice de ses fonctions spirituelles.

Vous correspondrez avec notre ministre des cultes, auquel il est convenable que vous écriviez tous les jours.

Si vous connaissiez moins bien la situation des choses, nous vous parlerions de la bulle d’excommunication, des pratiques mises en usage pour exciter du désordre dans l’Empire, anéantir la juridic­tion épiscopale, accréditer des vicaires apostoliques sans en donner connaissance ni à nous ni à nos évêques; mais nous désirons oublier le passé et tout arranger.

Faites bien connaître que, dans aucun cas, le Pape ne peut ret­irer dans la souveraineté de Rome, parce que cela serait contraire aux lois de l’Empire, et parce que la France ne reconnaîtra jamais aucune influence spirituelle de la part d’un pontife qui serait souverain étranger.

Vous ne manquerez pas de prévenir le Pape de la réunion du concile et de ce que fera l’Église de France, conduite par l’exemple des temps antérieurs et par la nécessité du salut et du bien de la religion.

 

Saint-Cloud, 27 avril 1811

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Bassano, M. de Saint-Marsan n’envoie pas assez de renseignements sur ce que fait la Prusse. Est-il vrai que les troupes qui étaient en Silésie évacuent cette province pour se rendre sur les côtes ? Et à quoi doit aboutir le pont qu’on veut construire entre Stettin et Küstrin ? Au lieu d’exciter, il faudrait que M. de Saint-Marsan ralentit ces armements, fit connaître d’ailleurs que ces me­sures ne peuvent donner que de la méfiance, empêchât enfin qu’on ne rappelât les semestriers, qu’on n’augmentât les cadres et qu’on ne fit des mouvements qui pourraient être mal interprétés.

Je crois qu’il serait convenable d’envoyer à Berlin et en Prusse plusieurs agents secrets, hommes intelligents et sûrs, qui s’y ren­draient sous prétexte de commerce et verraient ce qui se fait. Ces agents devraient être envoyés : un dans la Silésie, un à Berlin et dans les provinces entre Berlin et l’Elbe, et le troisième du côté de Kolberg, de Kœnigsberg et dans le nord.

Je crois aussi que l’envoi à Berlin d’un bon secrétaire de légation serait utile. M. de Saint-Marsan ne voit pas assez. Il est bien clair qu’on arme du côté de la mer, et que le pont qu’on va faire auprès de Schwedt a pour objet de pouvoir promptement se porter au delà de l’Oder. On assure qu’on lève les semestriers et qu’on fait beaucoup de recrues en Prusse. Il faudrait écrire aussi à mes ministres en Saxe et en Westphalie pour qu’ils éveillent l’attention de ces cours et fas­sent bien connaître tout ce qui se fait.

 

Saint-Cloud, 27 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

J’ai lieu de croire qu’il se commet des infidélités dans les bureaux de la conscription. Les étrangers savent sur-le-champ tout le travail qu’on y fait. Il serait nécessaire que le conseiller d’État Dumas prit quelques mesures pour découvrir les coupables.

 

Saint-Cloud, 27 avril 1811

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, recommandez bien au général Thouvenot de prendre un soin particulier de Saint-Sébastien et de surveiller le service de manière que cette place ne puisse pas être surprise.

 

Saint-Cloud, 27 avril 1811

Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major-général de l’armée d’Espagne, à Paris

Mon Cousin, écrivez au duc de Raguse, sous l’adresse du duc d’Istrie, pour lui faire connaître qu’il est nécessaire qu’il prenne toutes les mesures convenables pour organiser son armée; que je le laisse maître de l’organiser en six divisions, sans faire de corps d’armée ; qu’il peut renvoyer en France les généraux et officiers qui ne lui con­viendront pas. Il aura soin de les diriger d’abord sur Valladolid, où ils attendront des ordres.

Mandez-lui qu’aussitôt que le général Brenier, qui commande à Almeida, sera rentré dans la ligne, il le fasse reconnaître et remploie comme général de division, avancement qu’il est inutile de lui donner tant qu’il restera dans la place; que c’est un très bon officier, qu’on peut employer utilement.

 

Saint-Cloud, 27 avril 1811

Au général Duroc, duc de Frioul, grand-maréchal du palais, à Paris

Je vous envoie le travail du général Sorbier sur l’artillerie. Voici les bases que j’adopte :

L’artillerie restera comme elle est, de quatre compagnies à cheval. Chaque compagnie servira six bouches à feu. Mais j’ai en Espagne deux compagnies qu’il n’en faut pas retirer; il ne faut donc plus y compter; restent deux.

J’ai six compagnies d’artillerie à pied de la Garde en France. J’ap­prouve que vous les portiez à 120 hommes. Elles serviront chacune une batterie de huit pièces de canon, savoir : quatre batteries de deux obusiers et six pièces de 6, et deux batteries de deux obusiers à grande portée et six pièces de 12.

Trois compagnies de conscrits serviront chacune huit pièces, qui restent en Espagne. Ainsi, à la prochaine campagne en Allemagne, la Garde aura deux compagnies d’artillerie à cheval ou douze bouches à feu et six compagnies à pied ou quarante-huit bouches à feu; total, soixante. La ligne fournirait quatre compagnies d’artillerie à cheval, soit vingt-quatre bouches à feu, et six compagnies d’artillerie à pied ou quarante-huit bouches à feu. Total général, cent trente-deux.

La Garde aurait donc en Allemagne cent trente-deux pièces de canon, formant la grande réserve de l’armée.

Ainsi ce projet n’exige d’autre augmentation que de porter à 120 hommes les compagnies qui sont à 100. Il faut le faire par un appel sur tous les régiments de la ligne.

Quant aux ouvriers, il ne faut pas les augmenter. S’il est néces­saire, on prendra une compagnie auxiliaire dans la ligne; une pour les pontonniers, une pour les sapeurs.

Quant au train, celui de la ligne ayant été augmenté, celui delà Garde recevra la même organisation que la compagnie de la ligne, afin d’éviter la confusion et d’avoir une organisation uniforme, mais il suffira de porter le train de la Garde à six compagnies; ce qui fera l,400 chevaux ou 2,800 pour les deux bataillons. En déduisant les compagnies qui sont en Espagne, il faudra voir ce qui reste. Si ce n’est pas suffisant pour atteler les cent trente-deux bouches à feu, on prendrait quelques compagnies auxiliaires dans la ligne.

 

Saint-Cloud, 27 avril 1811

Au prince Lebrun, lieutenant-général de l’empereur, en Hollande, à Amsterdam

Je reçois votre lettre du 24 avril ; je ne la comprends point. Vous m’écrivez toujours comme si je n’avais à penser qu’à la Hollande. Donnez-moi plus d’explications dans vos lettres. Je ne connais pas ce que c’est que le sieur Lemosys, ce que c’est que le capitaine Tavernier, et je ne sais pas ce qui s’est passé.

 

Saint-CloUd, 27 avril 1811

A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, à Paris

Mon Fils, je donne le titre de bonne ville à Milan, Venise, Bolo­gne, Brescia, Vérone et Mantoue.

 

Saint-Cloud, 28 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Pour tout ce qui est relatif aux corps d’observation de l’Elbe, de l’Italie et du Rhin, je vous ai ordonné de faire faire les mouvements préparatoires, c’est-à-dire les achats de chevaux, la formation des compagnies d’élite, mais aucun mouvement. J’attends que vous m’ayez rendu compte de la formation du corps d’observation du Rhin pour vous donner des ordres.

Ne faites aucun mouvement que je ne l’aie approuvé.

 

Saint-Cloud, 28 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Aussitôt que les nouveaux renforts seront arrivés en Catalogne, il faudra rouvrir les communications avec Barcelone et écrire au duc de Tarente de venir prendre le commandement de la haute Cata­logne, car il parait que Baraguey d’Hilliers ne sait ce qu’il fait et a bien peu la confiance du soldat et de l’armée. On me rend compte que, dans l’attaque sur Figuières, un bataillon du 3e d’infanterie légère a été forcé et écrasé, tandis que deux bataillons et un régi­ment de cavalerie qui pouvaient aller à son secours n’en ont pas reçu l’ordre, quoique les soldats eux-mêmes le demandassent à grands cris. Demandez un rapport à ce sujet au général Baraguey d’Hilliers. Comment ne s’y est-il pas lui-même porté au premier bruit ?

 

Saint-Cloud, 28 avril 1811

Au baron de La Bouillerie, trésorier du domaine extraordinaire, à Paris

J’ai lu avec attention le compte du domaine extraordinaire arrêté au 31 décembre 1810, que vous m’avez remis. Ce compte doit être la base d’où il faut partir pour tous les comptes à régler à l’avenir pour le domaine extraordinaire : il doit donc être appuyé de pièces justificatives.

L’état n° 1 commence par établir la recette de la manière conve­nable, puisqu’elle part des recettes des 3e, 4e et 5e coalitions. Vous devez avoir justifié des comptes de ces trois coalitions, et avoir des décrets de moi qui apurent ces comptes, tant en recettes qu’en dé­penses. Mais je remarque qu’en 1810 vous avez reçu sur la 3e coalitio….néant, et dès ce moment elle parait terminée; que pour la 4e coalition vous avez reçu 1,700,000 francs ; que pour la 5e vous avez, en 1810, reçu 31 millions et 11 millions pour l’Espagne. Je désirerais donc savoir ce que les mêmes raisons de recettes en 1810 rendront en 1811 et 1812, c’est-à-dire ce qu’il faudrait ajouter sur chacune de ces coalitions, indépendamment de ce que vous avez reçu, et ce que cela devrait rendre.

Par exemple, vous portez à l’article Provinces conquises, contribu­tions de toute nature, 110 millions reçus en 1800 et 558,000 francs reçus en 1810. Je désire savoir ce que cela rendra en 1811 ; et pour cela il faut que votre état contienne une colonne indiquant ce que vous avez dû recevoir; car qu’est-ce qui me prouve que vous avez porté tout ce que vous avez reçu, que vos receveurs ont porté tout ce qu’ils ont reçu ? Ainsi j’ai la certitude que le trésor justifie de tout ce qu’il a reçu, parce que le ministre des finances m’en remet le contrôle, par l’état de ce que toutes les régies ont dû rendre. Si vos comptes peuvent s’établir comme je le demande, j’aurai le compte non seulement de ce que vous avez reçu, mais de ce que vous avez dû recevoir, et dès lors de ce que vous recevrez. Faites-moi connaître s’il est possible de faire ce travail.

Vous portez en recette 28 millions de bénéfice, et vous affectez 23 millions de dépenses sur ces bénéfices; mais qu’est-ce qui me prouve que ces bénéfices n’ont pas été plus considérables ?

Cela me conduit à l’état n° 2. J’y vois ce que vous avez reçu en 1809 et en 1810, mais je ne vois pas ce que vous deviez recevoir. Or il y a une portion de ce compte qu’il vous appartient entièrement d’établir, ce sont les fonds que vous faites valoir : ainsi sur 1810 il reste k recouvrer les intérêts de 1809; il en reste beaucoup de 1810.

Je vous prie de me faire un tableau qui me fasse connaître com­bien, indépendamment des 13 millions que vous avez reçus, vous deviez recevoir. Faites-moi connaître aussi ce que rendra le Domaine comme intérêts en 1813.

Par ce moyen, je verrai quels sont les chapitres qui doivent encore.

avril 1811 (Cette pièce ne porte pas de date de jour; elle se trouve placée parmi les pièces de la correspondance de Napoléon Ier entre deux pièces du 28 avril).

NOTE.

Cuxhaven offre l’avantage de pouvoir contenir les chantiers de construction, car il parait qu’on pourra construire des vaisseaux de guerre sur l’Elbe; il aurait encore l’avantage de contenir la flottille; enfin il aurait celui d’être le point de réunion et de rendez-vous des Français qui sont dans les trois départements et qui s’y trouveraient à l’abri de toute incursion. Il y aura toujours à Hambourg, Brème et Lübeck 8 à 10,000 Français, soit employés, soit gendarmerie, douanes ou dépôts; ces hommes , au lieu d’errer dans l’Allemagne, auraient là un point d’appui dans des circonstances où l’armée serait en avant. Cuxhaven aurait donc tous les avantages, excepté celui de donner un point sur l’Elbe.

Hambourg aurait tous ces avantages ; la flottille pourrait s’y reti­rer; les vaisseaux de ligne, il est vrai, ne pourraient y arriver; mais il est difficile, d’ici à quelques années, de se résoudre à faire des chantiers de construction dans une partie de l’Empire aussi éloi­gnée et si peu affectionnée. Les ponts et chaussées paraissent avoir le projet d’y établir un port. Il sera facile d’être maître de ce port et des îles qui couvrent l’Elbe vis-à-vis Hambourg. Dès lors 8 à 10,000 hommes, qu’on suppose enfermés dans Hambourg, auraient non seulement à une la possession de la ville, mais aussi celle de tout le litto­ral de l’Elbe. L’ennemi, pour attaquer cette place, sera obligé i ne circonvallation immense. A tous ces avantages Hambourg joint celui d’être la capitale, la position centrale, et de se garder elle-même.

Quelle garnison et quelle dépense faudrait-il pour occuper cette place, et pour avoir deux ou trois points bien retranchés, en forme de citadelles, pour contenir les habitants ?

Dœmitz a l’avantage de donner un point sur l’Elbe, le plus près de l’Oder; mais il s’éloigne beaucoup de Hambourg; il ne contribue directement ni indirectement à la défense de cette ville ; les transports de Hambourg, Brème et Lübeck sur ce point doivent être difficiles. Toutefois il est nécessaire que le comité pèse les avantages et les inconvénients de ces localités, réunisse les mémoires et les plans et me mette le tout sous les yeux.

Le seul point d’appui de tout le Nord est Magdeburg, et Magdeburg est beaucoup trop loin; un point de refuge devient nécessaire. Dans cette matière ce qui arrête toujours, ce sont les garnisons; il faut calculer que dans les trois départements il y aura toujours 1,500 douaniers, 1,000 hommes de la marine, 500 hommes de gendarmerie, ce qui forme déjà 3,000 hommes d’élite, indépendam­ment des gardes forestiers, des percepteurs des droits réunis, des divers percepteurs des impositions, des autres Français établis à Ham­bourg, des habitants qui seront vraiment affectionnés à la France, des Français même qui s’y établiront; on peut compter tout cela pour près de 6,000 hommes.

Les dépôts de l’armée, qu’on suppose toujours en avant, serait un objet de 4 ou 5,000 hommes; et enfin un corps d’observation, qu’il est impossible de ne pas laisser sur les côtes, formera toujours un corps de 5 à 6,000 hommes.

On voit donc qu’on pourra toujours réunir un corps de 14 à 15,000 hommes pour contenir et garder cette ville.

Si l’armée, au contraire, n’est pas en avant, mais en Hollande, en France ou sur d’autres frontières, occupée d’une autre guerre, les fortifications de Hambourg seraient encore utiles ; car les Anglais débarqueraient seuls, ou de concert avec les Danois, une armée de 25,000 hommes pour s’en emparer.

Si donc la ville de Hambourg présentait des facilités pour son occupation, il y aurait de fortes raisons pour en profiter.

Sa grande population est sans doute une objection ; mais Gênes est aussi peuplée, Anvers, Strasbourg, Lille, Mayence, Danzig, sont des villes tout aussi peuplées, et enfin, dans la situation des armées d’aujourd’hui, il faut de grandes villes pour servir de dépôts.

La population de Barcelone est plus forte; et cependant qu’ont-ils pu faire ? Malgré leur rage et leur passion, ils ont manqué de pain, et il n’y a jamais eu que 4,000 Français de garnison.

En coordonnant deux ou trois points forts où des mortiers puissent brûler la ville, en ayant une bonne citadelle où seraient placés tous les établissements d’artillerie, toutes les casernes, les munitions et les vivres, les dépôts, la grande population cesserait d’être un obstacle.

L’emplacement de cette citadelle devrait être entre Hambourg et l’Elbe, de manière à être maître de l’entrée du port et à s’étendre jusqu’à la rive gauche par des ouvrages extérieurs, de manière qu’en supposant Hambourg pris cet immense camp retranché pût faire une bonne résistance. II est urgent d’avoir là une très bonne place.

Au premier aspect du plan de Hambourg, on voit que l’attaque est sur un espace de 1,400 toises; c’est donc l’objet de deux ou trois beaux forts extérieurs.

Il faudrait présenter le projet d’une citadelle, placée immédiate­ment sur la rive droite de l’Elbe, qui se liât, s’il était possible, avec le château de Harbourg, de sorte que l’ennemi ne pût se placer entre la citadelle et la ville, et qu’on restât maître des îles; et, comme ces îles peuvent être inondées, on peut les occuper par des forts qui feraient un système dont on tirerait le parti qu’on voudrait.

Le problème se réduirait à ce que l’ennemi ayant pris Hambourg n’eût encore rien. Alors l’ennemi serait obligé d’employer une armée de 30 ou 40,000 hommes contre 12 ou 15,000 hommes de toute espèce de troupes, qui l’arrêteraient extrêmement longtemps.

 

Saint-Cloud, 29 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, les onze bataillons du train que j’ai en Allemagne, en France et en Italie, me paraissent suffisants, puis­qu’ils me fournissent plus de 16,000 chevaux, pour mettre en bon état le service de l’armée d’Allemagne.

Je désirerais donc que les trente-sept compagnies du train dont les cadres reviennent d’Espagne restassent en tout ou en partie à Pau, Toulouse ou Auch et fussent là complétées en hommes, en harnais et en chevaux. On réunirait ainsi 4 à 5,000 chevaux d’artillerie pour remonter, au mois d’août, tous les équipages de l’armée d’Espagne.

Je désirerais également que tous les hommes à pied de la cava­lerie de l’armée d’Espagne qui reviennent en France fussent envoyés dans un dépôt général, et que là on pût réunir 3 à 4,000chevaux, qui remonteraient la cavalerie de cette armée.

La même mesure sera prise pour les équipages militaires.

Je ne veux faire aucun mouvement rétrograde : cela n’est que pour les hommes qui n’auraient pas dépassé Bayonne et Bordeaux.

Donnez ordre qu’on retienne à Rayonne et Bordeaux les hommes qui arriveraient, et rendez-m’en compte.

 

Saint-Cloud, 29 avril 1811

NOTE DICTÉE EN CONSEIL D’ADMINISTRATION DU COMMERCE.

Au prochain conseil, les ministres des relations extérieures, de l’intérieur et des finances, et le directeur général des douanes, pré­senteront à Sa Majesté un rapport sur notre position actuelle à l’égard des Américains.

Ils placeront sous les yeux de Sa Majesté les dernières circulaires sur cet objet, et proposeront ce qu’il y a à faire pour le commerce des États-Unis, en empêchant les abus.

Par exemple, les permis ou licences choquent les États-Unis; il leur parait, ce qui est vrai, que c’est une restriction à la liberté du commerce, mais, en laissant subsister les permis ou licences pour les particuliers, il n’y aurait peut-être point de difficulté à admettre les Américains avec des marchandises de leur cru, et sous la condi­tion d’exporter des soies, des vins, etc.

Il faudrait aussi s’assurer que les marchandises importées par eux proviennent réellement des États-Unis ; pour établir cette preuve d’ori­gine, il est indispensable d’exiger des certificats, des papiers de bord, visés par des consuls français; on pourrait, pour prévenir les faux , y faire ajouter quelque chose en chiffre.

Par cette méthode, la question serait à peu près résolue pour les bâtiments qui viennent directement d’Amérique; mais elle devient plus difficile pour ceux qui sont conduits en Angleterre ou qui ne viennent en France qu’après y avoir relâché.

Les bâtiments qui entrent dans les ports anglais ou qui en sortent sont dans le cas d’être arrêtés par les corsaires français, d’après les décrets de Milan et de Berlin. Pour juger si ce droit subsiste, il faut savoir ce qu’a fait le congrès.

La loi d’Amérique défend aux bâtiments américains d’aller en An­gleterre, et aux marchandises anglaises d’entrer en Amérique. Tout bâtiment américain qui va en Angleterre est saisi en Amérique.

Ce qu’on fait en Amérique, on peut le faire en pleine mer, puisque l’État conserve la même juridiction sur ses sujets : le gouvernement américain pourrait donc faire saisir au milieu de l’Océan par ses fré­gates ou ses corsaires les bâtiments américains en contravention à l’acte de non-intercourse, qui auraient relâché en Angleterre ou qui s’y dirigeraient.

De là il résulte que tout bâtiment qui a touché en Angleterre ou qui s’y dirige est désavoué par les Etats-Unis, est en opposition aux lois de ce gouvernement et hors de sa protection ; ce n’est plus qu’un contrebandier.

Par conséquent les navires français peuvent exercer la répression qu’exerceraient les vaisseaux du gouvernement américain.

Par conséquent le gouvernement français peut faire arrêter dans ses ports tout bâtiment américain venant d’Angleterre, parce que par ce seul fait il a cessé d’être américain, attendu qu’il est impossible qu’un bâtiment avoué par les États-Unis arrive d’Angleterre : ce n’est pas un bâtiment dénationalisé, c’est un bâtiment anglais.

Cette manière de venir au système du blocus de l’Angleterre serait fondée sur les termes de l’intercourse.

Sa Majesté désire que ses trois ministres pèsent tout cela pour savoir comment on doit concilier les facilités à accorder au commerce des Etats-Unis avec les décrets de Milan et de Berlin, qui sont des lois fondamentales dérivant de la nature des choses.

Tout souverain doit protéger son pavillon, non seulement pour moi-même, mais en faveur des neutres. Lors donc qu’une autre puis­sance viole ce pavillon, on doit lui faire la guerre.

Les États-Unis n’ont point déclaré la guerre à l’Angleterre, mais ils ont reconnu les décrets de Berlin et de Milan, puisqu’ils ont autorisé leurs nationaux à commercer avec la France et leur ont défendu toute relation avec l’Angleterre. En vrai droit public, l’Empereur devait exiger que les États-Unis déclarassent la guerre à l’Angleterre: mais enfin c’est faire la guerre en quelque sorte que de consentir à l’application du décret de Berlin aux bâtiments qui auront commu­niqué avec l’Angleterre.

Dans cette hypothèse, on dirait : « Les décrets de Berlin et de Milan sont rapportés quant aux États-Unis ; mais, comme tout bâti­ment qui a relâché en Angleterre ou qui s’y dirige est un bâtiment sans aveu, que les lois américaines punissent et confisquent, on peut le confisquer en France. »

Si ce raisonnement pouvait être établi, il ne resterait plus qu’à prendre des précautions pour ne pas recevoir sur les bâtiments américains d’autres denrées que celles provenant des Etats-Unis.

Les passeports des consuls, les chiffres, et enfin quelques for­malités qui constitueraient un nouveau mode de certificat d’origine, pourraient donner quelques garanties.

On pourrait éviter les visites prescrites par le décret de Berlin, qui sont trop rigoureuses, et y substituer des visites simples, qui n’auraient pour but que de s’assurer de l’origine des marchandises et du bâtiment.

Enfin, s’il était impossible de tracer dans ce système une boute théorie, le mieux serait de gagner du temps, en laissant les princi­pes de cette matière un peu obscurs, jusqu’à ce qu’on vit les Etats-Unis prendre un parti; car il ne parait pas que ce gouvernement puisse rester longtemps dans sa situation actuelle relativement à l’Angleterre, avec laquelle il a d’ailleurs des discussions politiques pour les affaires de l’Amérique espagnole.

 

Saint-Cloud, 29 avril 1811

A Jérôme Napoléon, roi de Westphalie, à Cassel

Mon Frère, je reçois votre lettre du 14, dans laquelle vous me faites connaître le départ de votre brigade pour Danzig, ainsi que du bon état où elle est et le bon esprit qui l’anime. J’ai reçu cette nou­velle avec plaisir.

Le baptême du roi de Rome a lieu le 2 juin; arrangez-vous pour être à Paris à cette époque. Je serai bien aise de vous voir.

Puisque la reine va aux eaux, témoignez-lui mes regrets. Je sou­haite que les eaux lui soient utiles et remplissent ce que vous désirez.

 

Saint-Cloud, 30 avril 1811

A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Paris

Monsieur le Duc de Bassano, je vous envoie un rapport que je reçois du prince d’Eckmühl sur deux contrebandiers qu’il vient d’ar­rêter à Hambourg. Vous y verrez que la contrebande est plus active que jamais en Prusse; qu’elle se fait par Kolberg, et de là se dirige sur Leipzig et Francfort. Parlez-en ici au ministre de Prusse. Il faut écrire en Saxe pour se plaindre de ce qu’on laisse tranquille ce com­merce de contrebande, et demander pourquoi les marchandises an­glaises, qui s’accumulent ainsi à Leipzig, ne payent pas les droits. Envoyez un agent pour veiller sur ce qui se passe aux foires de Leip­zig et de Francfort. Écrivez également à M. de Saint-Marsan qu’il se laisse duper par la Prusse; que, si les intentions du gouvernement prussien étaient franches, il n’aurait pas besoin de faire un pont sur l’Oder ni de réunir des troupes à Dirschau ; que tous ces mouvements sur les côtes sont inutiles, puisqu’on n’a rien à craindre d’une des­cente des Anglais; qu’enfin si, avant de nous être entendus, la Prusse fait des armements, ils sont contre moi, et je ferai aussitôt occuper le pays; qu’il faut donc que la Prusse reste tranquille, qu’elle ne rappelle aucun semestrier, qu’elle ne fasse aucun mouvement tant que ma querelle avec la Russie ne sera pas terminée; qu’on a pu vou­loir lui faire accroire qu’on envoyait des troupes contre les Anglais, mais qu’on sait bien que les Anglais ne feront pas de descente.

 

Saint-Cloud, 30 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Je vois par une lettre de la grande-duchesse que deux capitaines du second bataillon étranger de l’île d’Elbe sont indiqués comme peu sûrs et mauvais sujets; que dans les officiers du régiment italien deux sont désignés comme ivrognes et d’une conduite peu régulière.

On m’assure que dans les trois bataillons de la Méditerranée qui sont à l’île d’Elbe il y a deux ou trois hommes à ôter pour mettre dans le bataillon colonial qui est en Corse; il me semble qu’il faut les ôter sans délai et les envoyer au bataillon en Corse : il ne faut que quelques hommes par compagnie pour corrompre tout un régiment.

 

Saint-Cloud, 30 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Je reçois votre rapport sur l’organisation du génie, et je l’approuve.

Il est nécessaire que les dix-neuf compagnies qui appartiennent au corps d’observation de l’Elbe soient toutes en Allemagne. Quant à celles des corps d’observation du Rhin et d’Italie, il faut en laisser les deux tiers dans les places. Un tiers suffira pour les premières marches de ces corps; on sera à temps de faire marcher le reste quand ces troupes se mettront en mouvement.

Les huit compagnies de sapeurs destinées pour le corps d’observa­tion de l’Elbe doivent exister en Allemagne. Quant à celles pour les corps d’observation du Rhin et d’Italie, il suffira d’en faire rejoindre le tiers ; le reste pourra continuer les travaux jusqu’au moment où l’on mettra les corps en marche.

La compagnie de mineurs qui est à Cherbourg doit faire partie du corps d’observation du Rhin. Il sera temps de la faire rejoindre quand ce corps passera le Rhin.

La 1e compagnie de mineurs doit faire partie du corps d’observa­tion d’Italie. Il sera temps, quand le corps d’Italie devra entrer en Allemagne, que cette compagnie quitte Osoppo.

Les compagnies de sapeurs qui sont à Wesel, à Ostende et Anvers seront à temps de partir quand le corps d’observation du Rhin, auquel elles appartiennent, passera le Rhin. Cependant il sera né­cessaire qu’il y ait deux ou trois compagnies quand on formera le corps.

Ce qui est important, je le répète, c’est que le corps d’observation de l’Elbe, qui doit former l’avant-garde, soit en tout et pour tout prêt à marcher.

Quant aux trois compagnies du train qui se forment à Metz, il faut les compléter en tout, chevaux, voilures, harnais, hommes, etc.

Je pense que, dans tous les cas, il doit y avoir en France une compagnie de sapeurs à Ostende, une à Anvers et une au Helder.

Quant aux 300,000 francs qui sont nécessaires, vous pouvez les prendre d’abord sur les fonds du budget; on les régularisera après. L’important est de mettre sans délai en état tout le matériel du génie.

 

Saint-Cloud, 30 avril 1811

Au général Clarke, duc de Feltre, ministre de la guerre, à Paris

Monsieur le Duc de Feltre, je reçois votre travail du 29 avril sur la composition de l’artillerie de l’armée d’Allemagne. Les bases n’en sont pas bonnes. Il paraît qu’il y a eu erreur dans la copie de ma lettre. Je n’ai pas demandé de pièces de 8 ; j’ai demandé que les bat­teries fassent de huit pièces de canon. Toutes les divisions de cuiras­siers et de dragons doivent avoir douze pièces d’artillerie à cheval, et non pas six. Ainsi le corps d’observation de l’Elbe doit être com­posé de deux batteries de 12, formées chacune de six pièces de 12 et de deux obusiers à grande portée; de cinq batteries d’artillerie à cheval, formées chacune de deux obusiers de 5 pouces 6 lignes et de quatre pièces de 6; de cinq batteries d’artillerie à pied, composées chacune de deux obusiers de 5 pouces 6 lignes et de six pièces de 6 ; ce qui fait cinquante pièces de 6, vingt obusiers de 5 pouces 6 lignes, douze pièces de 12 et quatre obusiers à grande portée ; total, quatre-vingt-six bouches à feu; plus deux batteries d’artillerie à cheval, com­posées de deux obusiers et de quatre pièces de 6, pour la division de cuirassiers qui est en Allemagne. Je préfère, pour la règle, que cela soit porté sur la réserve de cavalerie. Mais, comme cela doit exister en Allemagne, il faut le porter au corps, en encre noire, pour tota­liser, et à la réserve de cavalerie, en rouge. C’est donc quatre-vingt-dix-huit bouches à feu qu’il faut au corps de l’Elbe.

Le corps d’observation du Rhin sera composé de deux batteries de réserve de huit pièces chacune, savoir : six pièces de 12 et deux obusiers à grande portée; quatre batteries à cheval, chacune de deux obusiers et de quatre pièces de 6; et de quatre batteries d’artillerie à pied, chacune de deux obusiers et de six pièces de 6; ce qui fera douze pièces de 12, quarante pièces de 6, quatre obusiers à grande portée, et seize obusiers de 5 pouces 6 lignes ; total, soixante et douze bouches a feu.

Le corps d’observation d’Italie sera comme vous l’avez présenté.

Les divisions de grosse cavalerie doivent avoir deux batteries d’artil­lerie à cheval, chacune de deux obusiers et de quatre pièces de 6.

Quant à l’artillerie de la Garde, elle sera organisée de la manière suivante : deux batteries à cheval, chacune de deux obusiers et qua­tre pièces de 6; deux batteries à pied, chacune de deux obusiers à grande portée et de six pièces de 12; enfin quatre batteries à pied, chacune de deux obusiers et de quatre pièces de 6; ce qui fera pour le service de la Garde seize obusiers, douze pièces de 12 et trente-deux pièces de 6; total, soixante bouches à feu.

Les deux batteries d’artillerie à cheval qui sont en Espagne, les trois compagnies de régiment qui sont également en Espagne ne comptent point dans ce nombre de pièces.

Il sera joint à la Garde quatre batteries d’artillerie à cheval servies par la ligne, chacune de deux obusiers et de quatre pièces de 6; deux batteries à pied, chacune de deux obusiers et de six pièces de là; enfin quatre batteries à pied, chacune de deux obusiers et de six pièces de 6; ce qui fera soixante et douze pièces d’artillerie. Ainsi la réserve de l’armée, jointe aux soixante pièces de la Garde, sera de cent trente-deux bouches à feu. Les compagnies du train de la Garde qui sont en Espagne y resteront. Les deux bataillons devront suffire autant que possible à tout service. A cet effet, les compagnies du train de la Garde seront portées au même complet que la ligne, et, si cependant cela ne suffit pas, on y suppléera par le train de la ligne.

Ordonnez tous ces mouvements, sans prendre mes ordres, pour compléter l’artillerie du corps d’observation de l’Elbe comme je viens de le déterminer. Mais vous ne devez faire aucun mouvement pour ce qui regarde le corps d’observation du Rhin que lorsque j’aurai approuvé ce mouvement et donné un nouvel ordre.

Je vous renvoie donc votre travail pour que vous le corrigiez.

Je ne conçois pas trop pourquoi vous ôtez du corps d’observation de l’Elbe deux compagnies du 5e régiment qui y sont, pour y mettre deux compagnies du 2e régiment. Il ne faut, en général, rien ôter au corps de l’Elbe pour donner aux autres corps, puisque ces corps ne se rencontreront peut-être jamais. Ainsi il faut employer au corps de l’Elbe tout son matériel de l’artillerie, du génie, du train, n’avoir rien à lui envoyer que de nouveau et n’avoir rien à lui retirer

Je voudrais placer le 1er d’artillerie à cheval à la réserve d’artil­lerie de l’armée, devant marcher avec la Garde.

Il ne faudrait pas donner deux compagnies du 2e régiment d’artil­lerie à cheval pour l’escorte de l’artillerie ; il vaudrait mieux former un escadron de marche de 200 hommes de cavalerie légère ou de dragons.

 

Saint-Cloud, 30 avril 1811

Au général Lacuée, comte de Cessac, ministre directeur de l’administration de la guerre, à Paris

Monsieur le Comte de Cessac, il est arrivé de Mayence dans l’île de Walcheren 560 habits; le drap en est mauvais et les habits sont trop étroits de la poitrine et trop longs; on sera obligé de les refaire en entier. Il est arrivé des magasins de Paris 1,084 habits, qui sont gaiement trop étroits de la poitrine. 940 vestes et 400 culottes sont arrivées des magasins de Mayence : c’est un véritable rebut de magasin. 1,600 shakos sont également arrivés; ils sont bons; 3,200 chemises idem; 1,600 paires de bas idem; 3,300 paires de souliers idem. Ainsi, au 20 avril, il est arrivé bien peu de chose. L’hôpital de Middelburg est extrêmement mauvais : les hommes y meurent beaucoup. Voyez à remédier à tout cela.

 

Saint-Cloud, 30 avril 1811

Au vice-amiral comte Decrès, ministre de la marine, à Paris

Mon intention est qu’en réparant le magasin général de Flessingue on le voûte pour le mettre à l’abri de la bombe. Dans une place comme Flessingue, tout bâtiment qui n’est pas à l’abri de la bombe est sans résultat. Je préfère donc, si cela est nécessaire, que ce magasin soit moins élevé, mais que les premiers étages soient à l’abri de la bombe. Faites-moi un rapport là-dessus.

 

Saint-Cloud, 30 avril 1811

Au capitaine Montmorency, officier d’ordonnance de l’empereur, à Paris

Monsieur le Comte Montmorency, rendez-vous à la Rochelle; vous ferez le tour de la place; vous compterez le nombre des pièces qui sont en batterie, vous noterez de quel calibre elles sont; vous verrez les travaux qu’on y fait, la garnison qui s’y trouve.

De là, vous passerez dans l’île de Ré, où vous séjournerez cinq ou six jours. Vous ferez le tour de l’île; vous prendrez note des bat­teries et de leur armement, ainsi que des forts qui la défendent; vous prendrez le nom des officiers qui y commandent, et me rendrez compte de tout ce qui peut m’intéresser. Vous verrez la garnison, le régiment de conscrits réfractaires. Vous vous informerez si les capi­taines, lieutenants, sous-lieutenants, sergents et caporaux sont arrivés; combien il en manque; combien il y a de bataillons de formés; si l’habillement est arrivé, si les conscrits sont habillés; si l’armement est arrivé et si les conscrits sont armés ; quand ils seront habillés et armés; quelle volonté ils ont. Si cinq ou six jours ne vous suffisent pas, vous resterez plus longtemps pour vous mettre en état de me donner le plus de détails possible. Vous m’enverrez tous les jours un rapport de ce que vous aurez vu.

Vous reviendrez de l’île de Ré à la Rochelle, et de là vous suivra le long de la côte jusqu’à l’embouchure de la Charente. Vous prendrez connaissance du nombre et de la force des batteries, du nombre d’hommes employés à chacune d’elles, de la manière dont le service se fait, des travaux qu’on y fait; vous noterez celles qui sont fermées à la gorge.

De la batterie de Fouras vous retournerez, par la rive droite de la Charente, jusqu’à Rochefort, de batterie en batterie, en faisant les mêmes observations. Vous m’enverrez un premier rapport de Rochefort. Vous visiterez les remparts de cette place; vous prendrez note de la quantité de pièces qui sont en batterie et de leur calibre, du nombre d’ouvriers qui travaillent à l’arsenal,  de l’emplacement des cales et des lieux où sont les bâtiments en désarmement. Vous m’enverrez l’état de situation des troupes.

De Rochefort vous vous rendrez à l’île d’Aix. Vous visiterez les travaux qu’on y fait, les batteries, leur armement et leur approvi­sionnement, les commandants, les troupes, enfin tout ce qui inté­resse mon service. Vous y passerez une nuit entière. Vous irez voir ensuite les vaisseaux et frégates en rade. Vous reviendrez à Rochefort, d’où vous m’enverrez le rapport de votre visite à l’île d’Aix et sur l’escadre.

A Rochefort, vous descendrez la rive gauche de la Charente jus­qu’à l’île Madame, et de là à l’embouchure de la Gironde. Vous remonterez de la rive droite de la Gironde jusqu’à Blaye, et vous m’enverrez le résultat de vos observations pendant cette tournée sur tout ce qu’il m’importe de connaître.

De Blaye vous pourrez aller passer deux jours à Bordeaux, après quoi vous reviendrez en droite ligne dans l’île de Ré ; vous y passera deux jours pour revoir les progrès qu’a faits le régiment de l’île de Ré, et vous retournerez à Paris.

 

Saint-Cloud, 30 aprile 1811

AU PRÉSIDENT DU SÉNAT DU ROYAUME D’ITALIE, À MILAN.

Signor Présidente del senato, desidero che facciate conoscere al senato il mio aggradimento pei sentimenti che mi esprime all’occasione della nascita del re di Roma. Mi fa piacere l’intendere che i popoli del mio regno d’Italia abbian trovato in questo fausto avvenimento nuovi motivi di speranze, e dato nuovi contrassegni d’attaccamento alla mia persona. Niuna cosa potrà mai esser più grata al mio cuore di ciò che mi confirma l’amore de’ miei popoli.


 

References

References
1 Cette note se trouve au ministère de la guerre, dans la collection du Dépôt des fortifications, sous ce titre: Note dictée par Sa Majesté. Elle se trouve également transcrite sur un registre du Dépôt de la guerre, intitulé : Ordres de l Empereur relatifs à la défense des places.
2 MM. de Barrai, Duvoisin et Maonay
3 M. Chabrol de Volvic, préfet du département de Montenotte