Correspondance de Napoléon – Août 1812
Smolensk, 23 août 1812, au soir.
Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le 1er corps de la Grande Armée, à Dorogobouje.
Mon Cousin, j’ai reçu votre lettre du 22 à minuit. Je suppose que ; vous serez aujourd’hui à Dorogobouje. Réunissez tout votre corps entre la poste de Mikhaïlovka et Dorogobouje. Je donne ordre au vice-roi de se rendre sur votre gauche à Prost ; au prince Poniatowski de se placer à droite sur la route entre Dorogobouje et Yelnia ; au duc d’Elchingen de se porter sur Mikhaïlovka, et aux Westphaliens de remplacer le duc d’Elchingen à Sloboda-Pnevo. Ainsi, dans vingt-quatre heures, toute l’armée peut se réunir. J’attends de vos nouvelles ce soir pour mettre en marche la Garde, afin que, si l’ennemi veut nous attendre, nous puissions lui livrer bataille.
Smolensk, 24 août 1812, neuf heures du matin.
A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, commandant le 4e corps de la Grande Armée, à Prost.
Mon Fils, vous aurez reçu l’ordre que je vous ai donné de vous diriger sur Prost. Le roi de Naples me mande que l’armée est en présence et que l’ennemi a toute son armée en bataille à Dorogobouje; il vous en aura sans doute instruit. Il est donc nécessaire que vous rejoigniez promptement l’armée. Je partirai cette nuit. L’avant-garde du roi de Naples est entre Ousviate et Dorogobouje, et son quartier général est en avant d’Ousviate.
Les nouvelles de Vitebsk sont que l’ennemi a disparu, non-seulement du côté de Vitebsk, mais encore de Souraje, pour se retirer sur Velije. Écrivez au général Pino, comme de mon côté je lui ai écrit, de se mettre en marche promptement pour vous rejoindre, et de se trouver à la bataille. Le général Pino n’a pas bien compris ses instructions : sans aller à Vitebsk, il pouvait d’Inkovo avoir, par des patrouilles de cavalerie et par des agents, des renseignements sur ce qui se passait à Vitebsk. Tâchez de n’avoir point de traînards et de réunir tous vos moyens. Si vous passez par la rive droite du Dniepr, j’ai écrit au roi de Naples de faire jeter un pont en arrière d’Ousviate; mais on assure que la rivière de ce côté est bien peu de chose.
Smolensk, 24 août 1812.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Smolensk.
Mon Cousin, donnez ordre au général Claparède de partir à midi avec sa division, pour faire une marche pour se rendre à Ponova dans la direction de Dorogobouje ; indépendamment des huit pièces de régiment qu’a celte division, on fera marcher avec elle toutes les pièces de la division Delaborde, à l’exception des huit pièces de régiment de la jeune Garde qui doivent toujours être attachées à la division Delaborde.
Vous donnerez également ordre au général Sorbier de partir aujourd’hui avec toute la réserve de l’artillerie de la Garde pour se diriger sur Dorogobouje. Il est nécessaire qu’il marche le plus vite qu’il pourra. Vous donnerez ordre au duc de Trévise de porter aujourd’hui son quartier général à Ponova, avec la division Claparède, qui partira aujourd’hui à midi, la réserve de l’artillerie de la Garde, l’artillerie de la division Delaborde, comme il a été dit ci-dessus, et la division Roguet, laquelle partira à quatre heures après midi.
Donnez ordre au duc de Danzig d’être prêt à partir dans la nuit, de faire en conséquence passer ce soir à sept heures, lorsque tout le corps du duc de Trévise aura passé, tous ses caissons et toute son artillerie au-delà de l’eau t afin que, s’il est nécessaire, il puisse partir demain à deux heures du matin el faire une grande marche.
Smolensk, 24 août 1812.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Smolensk.
Mon Cousin, donnez ordre que les chirurgiens de la Garde et des différents corps partent demain pour rejoindre leurs corps d’armée, vu que l’armée est en présence.
Donnez ordre que le petit quartier général parte à six heures du soir.
Donnez ordre que, dans la journée d’aujourd’hui et celle de demain, les six cents voitures du quartier général qui sont ici partent chargées de vivres ou à vide; elles se chargeront en route.
Smolensk, 24 août 1812.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Smolensk.
Mon Cousin, donnez ordre au duc de Danzig de partir à deux heures du matin avec la vieille Garde pour faire une bonne marche, sans cependant trop fatiguer son monde. Il continuera successivement à marcher jusqu’à ce qu’il ait joint l’Empereur.
Donnez ordre au général Delaborde de rester avec sa division et huit pièces de canon pour garder la place de Smolensk ; il remplira provisoirement les fonctions de gouverneur général. Indépendamment de sa division formant 4,000 hommes, il aura sous ses ordres une compagnie du bataillon du Danube et deux compagnies de sapeurs, un régiment polonais qui est ici et que vous lui nommerez. Vous lui ferez connaître le commandant de la place. Le commandant de l’artillerie laissera un officier d’artillerie, et le commandant du génie un officier du génie. Le général Delaborde aura soin de prendre toutes les précautions pour lu garde de Smolensk ; il fera fermer la brèche avec du bois. Il aura sous ses ordres un commandant d’armes et quatre adjudants. Il tiendra les Cosaques éloignés de la route de communication. Il correspondra avec les commandants de la ligne d’ici à Orcha. Il fera approvisionner la place par des réquisitions dans les campagnes. Il se servira de quelques membres de la municipalité restés, pour engager les habitants à revenir; il fera faire quelques proclamations aux habitants des campagnes, et tâchera de rassurer tout le monde.
Le régiment de marche de la Garde et celui du 3e corps qui sont à Vitebsk auront ordre de venir à Smolensk ; d’autres troupes doivent également y arriver, de sorte que dans sept à huit jours la division de la jeune Garde pourra partir d’ici. Le général Delaborde partira en laissant le commandement dans d’autres mains que l’Empereur désignera, et en laissant une garnison de 4,000 hommes. Il sera laissé une escouade de gendarmerie pour la police des ponts.
Le général Delaborde aura soin d’écrire tous les jours par l’estafette de l’Empereur qui passera, et une autre fois par la correspondance. Il retiendra les hommes isolés et les petits détachements qui passeraient, et en formera des bataillons de marche; il les placera dans des églises ou couvents, jusqu’à ce qu’il reçoive l’ordre de les faire rejoindre. Il surveillera également la manutention. Il commandera des hommes de corvée pour le service des hôpitaux et des blessés. Il se mettra en correspondance avec les gouverneurs de Mohilef, de Vitebsk et de Minsk, afin de s’instruire réciproquement de ce qu’il y aurait de nouveau. Il aura soin de marquer la place que chaque individu doit occuper en cas d’alerte; enfin il travaillera autant que’ possible à la réorganisation de la ville.
- S. L’aide de camp Caulaincourt restera la journée de demain ici pour mettre le général Delaborde au fait.
Smolensk, 24 août 1812.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Smolensk.
Mon Cousin, vous trouverez ci-joint un bon sur l’intendant pour fournir au prince Schwarzenberg une seconde avance de 500,000 fr.
Faites connaître au prince ma satisfaction de la victoire qu’il a remportée; que demain je marche sur l’ennemi, qui a l’air de prendre position à vingt lieues d’ici, sur la route de Moscou ; que je désire qu’il fasse en sorte que Tormasof et les troupes que l’ennemi peut avoir en Volhynie ne viennent pas se porter sur moi ; que je lui recommande de les occuper.
Écrivez au général Reynier dans le même sens.
Vous ferez connaître au prince Schwarzenberg que j’ai demandé à l’empereur d’Autriche que tous les avancements se fassent dans son corps et qu’il lui fût accordé des récompenses; que je me réserve de mon côté d’en accorder sur le rapport qu’il m’en fera ; que j’attends ses propositions.
Écrivez au duc de Tarente pour lui faire connaître ce qui s’est passé, et que je me mets en marche.
Écrivez aussi au général Saint-Cyr; faites-lui savoir que j’attends ses propositions pour donner des récompenses à son corps d’armée; qu’il résulte des bulletins russes que Wittgenstein n’a que deux divisions, formées de bataillons de réserve qui ne sont composés que de recrues.
Smolensk, 24 août 1819.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Smolensk.
Mon Cousin, écrivez au prince Poniatowski pour lui faire connaître que l’armée était en présence sur la rivière de l’Ouja, et que je pars cette nuit pour me rendre à Ousviate; que je suppose qu’il aura communiqué avec le roi de Naples, et qu’il sera déjà en mesure de tourner la position de l’ennemi ou de prendre sa position de bataille.
Smolensk, 24 août 1812.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Smolensk.
Mon Cousin, donnez ordre au général Éblé de lever les ponts et de partir en avant avec son personnel, pour gagner une marche, en laissant ce qui sera nécessaire pour les ponts.
Donnez ordre au général Chasseloup de laisser à Smolensk une compagnie du bataillon du Danube pour rétablir le pont sur pilotis, et deux compagnies de sapeurs, et de faire partir tout le reste avec le petit quartier général pour Sloboda-Pnevo. Vous lui donnerez ordre d’y être rendu de sa personne le plus promptement possible, et, si les localités le permettent, de faire construire sur ce point une redoute à la tête du pont qui puisse protéger le passage rétrograde de l’armée au défilé des ponts, si le cas arrive. Recommandez-lui de faire établir partout des doubles ponts sur les ruisseaux et les défilés, afin que les mouvements rétrogrades de l’armée, s’ils avaient lieu, se fassent avec toute facilité.
Smolensk, 24 août 1812.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Smolensk.
Mon Cousin, envoyez un officier au général Latour-Maubourg pour lui porter le duplicata des ordres que vous lui avez déjà donnés pour lui et pour la division Dombrowski. Mandez au général Latour-Maubourg de presser sa marche pour arriver entre Yelnia et Dorogobouje, et pouvoir prendre part à la bataille qui pourra avoir lieu sous peu de jours.
Réitérez l’ordre au général Dombrowski de prendre des mesures pour protéger le pays de Minsk et assurer la grande route de Borisof et de Mohilef.
Donnez ordre au régiment illyrien qui est à Kovno et au 129e, qui est à Vilna, de se rendre sans délai l’un et l’autre à Minsk.
Smolensk, 24 août 1812.
Au prince de Neuchâtel et de Wagram, major général de la Grande Armée, à Smolensk.
Mon Cousin, écrivez au général Pino que vous avez reçu sa lettre ; que, puisqu’il n’y a rien de nouveau à Vitebsk, il rejoigne, avec la division Pajol et la brigade de cavalerie légère du général Guyon, le 4e corps, parce que nous sommes en présence devant Dorogobouje, et qu’il vous fasse connaître quand il arrivera, la cavalerie pouvant toujours prendre les devants.
Smolensk, 24 août 1812.
Au général comte Hogendorp, gouverneur général de la Lithuanie, à Vilna.
Monsieur le Comte Hogendorp, je vous ai nommé président de la commission provisoire du gouvernement de la Lithuanie. Par un autre ordre du jour, je vous ai chargé de la nomination aux emplois des neuf régiments qu’on lève en Lithuanie et de toutes les mesures à prendre pour accélérer la formation de ces régiments. Je vous envoie différentes notes du duc de Bassano, relatives à cette levée. Voyez ce ministre et pourvoyez à ce qu’il propose.
Smolensk, 24 août 1812.
A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna
Monsieur le Duc de Bassano, l’anarchie et le peu de décision qui existent dans la commission du gouvernement de Vilna m’ont fait penser qu’il était indispensable d’en donner la présidence au général gouverneur général de la Lithuanie. Je défends au général Hogendorp de recevoir aucun traitement extraordinaire du pays ni aucuns frais de table, et je lui écris de manière à le faire changer de conduite. S’il ne le faisait pas, je verrais à le remplacer. Il n’a pour lui auprès de moi que deux faits : c’est que depuis son arrivée à Vilna le service s’y est bien amélioré, et que, d’un autre côté, le gouvernement ne fait rien. Voyez-le et parlez-lui dans ce sens.
Smolensk, 24 août 1812.
A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna
Monsieur le Duc de Bassano, je lis votre lettre du 9 août; j’ai pourvu à tout ce qu’elle contient. J’ai chargé le gouverneur général, par un ordre du jour, de nommer aux emplois dans les régiments (Les neuf régiments créés dans le duché de Lithuanie) et d’accélérer leur formation. J’ai mis 500,000 francs à la disposition de la commission du gouvernement pour l’habillement des troupes, et seulement comme prêt. Les armes doivent être arrivées à Kovno ; il paraît donc qu’aucun obstacle ne doit plus se présenter. J’ai autorisé le 129e régiment et le régiment illyrien à se recruter de Polonais. Les cadres de ces corps existant, cette opération sera plus simple.
Je ne sais pas où en est le 3e régiment de lanciers de la Garde : faites-moi un rapport là-dessus; il paraît que cette organisation va très-doucement. J’avais également autorisé Krasinski à porter à 2,000 hommes son régiment, en prenant toute la jeune noblesse qui voudrait se présenter ; mais ce beau régiment, où l’on est si bien payé, n’est encore que de 3 à 400 hommes. Je ne vois rien se faire ! D’un autre côté, l’armée du prince Poniatowski n’a que 12 à 15,000 hommes; tous ses corps se fondent et aucuns renforts ne sont envoyés. En dernière analyse, on est de bien peu de secours. Parlez-en avec les membres de la commission de Vilna; mettez-les d’accord avec le gouverneur et avec M. Bignon. Je ne veux aucune discussion ni d’étiquette ni de contrariété.
Smolensk, 24 août 1812.
A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna
Monsieur le Duc de Bassano, j’ai nommé le général Hogendorp président de la commission provisoire du gouvernement de la Lituanie; par ce moyen, toutes les difficultés survenues cesseront. Je suis peu satisfait de M. Bignon, qui, au milieu des besoins et embarras où je me trouve, fait des épigrammes et des quolibets. Il est un fait, c’est que depuis l’arrivée du général Hogendorp le service s’est amélioré. Le devoir de M. Bignon était donc de le seconder avec force et non de le contrarier.
Je vous prie de témoigner de ma part à la commission du gouvernement de Vilna mon mécontentement de son peu d’activité ; elle ne fait rien. Celles de Minsk, de Mohilef, etc., ont fait bien davantage. Le résultat de tout cela serait de dégoûter de la cause. Ils n’ont pas un seul homme, un seul bataillon à donner, soit pour garder les marais de Pinsk, soit pour arrêter les Cosaques. Bien plus, je suis obligé de laisser à Vilna et à Minsk des garnisons comme dans des villes ennemies. On ne m’a fourni aucune espèce de ressource, mes hôpitaux sont mal, mes magasins sont dépourvus de tout. Le gouvernement ne m’aide en rien et ne fait rien que des babioles. L’autorité civile et l’autorité militaire doivent marcher ensemble.
Enjoignez à M. Bignon d’être en quelque sorte le secrétaire do gouvernement général et de l’aider de tous ses moyens; que c’est le seul moyen que je connaisse pour lui de me rendre des services.
J’ai besoin de former enfin mes magasins pour nourrir mon armée pendant toute une année; il faudrait 1,200,000 quintaux de farine et le reste en proportion, qu’il s’agit de répartir entre les gouvernements de Vilna, de Minsk, de Grodno, de Bialystok, de Mohilef et de Vitebsk. Je vous prie de voir comment cette répartition pourrait se faire et de suggérer les moyens d’organiser les différents services. Pendant le temps de la récolte et tout le reste de la belle saison, l’armée peut se nourrir en fourrageant, au grand détriment de la discipline et aussi du pays; mais, pendant la mauvaise saison et l’hiver,, cela est impossible. J’avais ordonné que des marchés fussent passés pour le transport des magasins de Kovno et des effets d’habillement : je ne sache pas qu’on ait encore rien fait ; du moins je n’en ai plus entendu parler. C’est cependant une opération bien importante.
IL doit y avoir un payeur à Vilna; je suis étonné qu’il ne soit pas garni des fonds nécessaires.
Smolensk, 24 août 1812.
A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna
Monsieur le Duc de Bassano, par votre lettre du 9 août vous m’avez proposé l’établissement d’inspecteurs supérieurs pour l’organisation des régiments, et différentes nominations. Mon intention est que le gouverneur général, que je viens d’établir président de la commission provisoire du gouvernement, ait toute l’autorité nécessaire pour cela, sauf à faire breveter dans la suite les individus par moi. Mon éloignement et mes occupations ne me permettant pas de répondre à toutes les demandes avec l’exactitude nécessaire, j’ai donc confiance entière dans le gouverneur général et dans M. Bignon pour cet objet.
Smolensk, 24 août 1812.
A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna
Monsieur le Duc de Bassano, je pars cette nuit pour me porter sur Dorogobouje, où il parait que les armées sont en présence, l’ennemi ayant fait halte. On assure qu’il y a une position dont ils veulent profiter pour livrer bataille et couvrir Moscou. –
Smolensk, 24 août 1812.
A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna
Monsieur le Duc de Bassano, j’ai donné ordre au duc de Bellune de se porter sur Kovno en quatre colonnes , par la rive droite et par la rive gauche, afin d’arriver promptement. Vous pouvez lui transmettre cet ordre directement, en cas que l’officier du major général perde du temps pour arriver.
Le général Loison a, je ne sais pourquoi, marché avec 10,000 hommes de Königsberg sur Rastenburg et Grodno. J’ai blâmé sa conduite. Je lui ai ordonné de renvoyer à Königsberg les jeunes conscrits de la division Lagrange qui n’ont pas besoin d’être fatigués, et qui sont destinés à réparer les pertes que font les cadres. Je lui ai fait donner l’ordre de diriger sur Minsk le 7e et le 8e régiment de marche de cavalerie , et le 8e régiment westphalien , et deux bataillons saxons des régiments de Low et de Rechten, sur Minsk. Écrivez au général Loison par l’estafette pour lui faire connaître cette disposition. Écrivez en même temps par des agents polonais qui iront à la rencontre de ces régiments, pour qu’au cas qu’ils se trouvent du côté de Loraza ils se rendent directement à Minsk.
Écrivez au duc de Tarente que l’avant-garde est à soixante lieues de Moscou; que l’armée ennemie est en position et qu’il paraît qu’elle veut donner bataille.
J’ai donné ordre au régiment illyrien et au 129e de se rendre à Minsk; ce mouvement est nécessaire. Les troupes du pays peuvent suppléer à la garnison de Vilna. Le duc de Bellune, d’ailleurs, qui arrive en position à Kovno, peut remédier à tout événement; au lieu qu’à Minsk, soit la garnison de Bobrouisk, soit un corps venant de Volhynie, peut inquiéter les communications. Faites connaître au
gouverneur de Minsk qu’il aura un régiment illyrien, deux bataillons du 129e avec leurs canons, deux bataillons du 33e léger, deux bataillons westphaliens et deux bataillons saxons avec leur artillerie ; que la division Dombrowski avec deux régiments de cavalerie et vingt-quatre pièces de canon a eu ordre de rétrograder sur Minsk, pour tenir en respect la garnison de Bobrouisk. Faites connaître au gouvernement de la Lithuanie qu’il serait nécessaire de tenir deux bataillons de chasseurs du côté des marais de Pinsk, ou même deux bataillons de gardes nationales, qui mettent le pays à l’abri des incursions des Cosaques. Les fusils doivent être arrivés à Minsk; qu’on en envoie partout où on peut armer des troupes. Il est ridicule que des villes comme Vilna, Minsk, Mohilef, ne puissent pas se défendre contre un escadron de Cosaques, et puissent être mises à contribution par ces misérables.
- S. Faites passer cette lettre à Vienne par un courrier.
Smolensk, 24 août 1812.
A François Ier, empereur d’Autriche, à Vienne.
Monsieur mon Frère et très-cher Beau-Père, en exprimant à Votre Majesté Impériale ma satisfaction de la conduite du corps que commande le prince de Schwarzenberg, qui n’aura pas manqué de mettre sous ses yeux le rapport de l’avantage qu’il a dernièrement remporté, je prie Votre Majesté de faire une chose qui me serait extrêmement agréable, en accordant de faire remplir les places vacantes dans ce corps par des officiers qui en font partie. Ayant mis sous les ordres du prince de Schwarzenberg le corps que commande le général Reynier, et les circonstances de la campagne pouvant me mettre à même de lui confier d’autres corps, je prie Votre Majesté de lui accorder le grade de feld-maréchal.
Je saisis cette occasion pour remercier Votre Majesté de tout ce qu’elle a fait pour l’Impératrice pendant son séjour en Bohême. Elle est en ce moment à Saint-Cloud, où tout le monde l’a trouvée bien portante et fort engraissée.
Je pars cette nuit pour me rendre à mon avant-garde, qui est à vingt lieues sur le chemin de Moscou.
Je prie Votre Majesté de ne pas douter de mon inaltérable attachement , ni du désir que j’ai de lui être agréable dans toutes les circonstances et de lui donner des preuves de l’estime et de la haute considération avec lesquelles je suis, de Votre Majesté Impériale, le bon Frère et Gendre.
Napoléon.
Smolensk, 24 août 1812.
A Frédéric, roi de Wurtemberg, à Stuttgart.
Monsieur mon Frère, j’ai reçu les deux lettres de Voire Majesté, le 23 juillet. Le prince royal, qui doit être maintenant auprès de Votre Majesté, lui aura donné les détails de l’affaire désagréable dont elle me parle. Je regrette que la santé du prince l’ait ainsi éloigné de l’armée, et m’ait privé d’une occasion de lui prouver qu’il n’a rien perdu des sentiments que je lui porte.
Je fais donner des ordres au duc de Tarente, qui est dans la Courlande, pour que la terre de Vurzau soit traitée avec les ménagements auxquels a droit Mme la duchesse Henriette, belle-sœur de Votre Majesté.
Napoléon.
Dorogobouje, 26 août 1812, deux heures du matin.
A Eugène Napoléon, vice-roi d’Italie, commandant le 4e corps de la Grande Armée, à Zasur.
Mon Fils, je reçois votre lettre par laquelle vous m’informez que vous serez de bonne heure à Dorogobouje. Restez sur la rive droite du Dniepr. Passez le Dniepr entre Blagové et Chorki (la position de ces deux points correspond, sur la carte de l’état-major russe, à celle de Molodilova et de Blagoiechtchenskoïé), et dirigez-vous sur Viazma, en vous tenant toujours à une ou deux lieues sur la gauche de la route. Vous aurez devant vous le général Grouchy, qui se liera au roi de Naples. Éclairez bien votre gauche. Je ne suppose pas que vous puissiez aller aujourd’hui plus loin qu’au-delà du Dniepr, mais le général Grouchy ira jusqu’à la hauteur de Slavkovo, qui est le point qu’occupera le soir le roi de Naples. Le prince Poniatowski forme la droite et marche sur la gauche de la Vosma.
J’aurai probablement aujourd’hui toute la journée mon quartier général à Dorogobouje.
Écrivez au général Pino et au général Pajol pour qu’ils viennent. Il est probable que l’armée ennemie nous attendra à Viazma ; il faut y arriver nombreux et en ordre. Faites battre la route de Dorogobouje à Velije. Je suppose qu’il ne sera rien passé sur cette route et que tout sera reployé sur Viazma.
Dorogobouje, 26 août 1812, deux heures du matin.
Au maréchal Davout, prince d’Eckmühl, commandant le 1er corps de la Grande Armée.
Mon Cousin, formez une avant-garde d’infanterie qui marche avec la cavalerie une heure avant votre corps d’armée, et prenant toujours position à une lieue en avant de vous. Cette avant-garde doit elle-même être précédée par deux bataillons de voltigeurs. Le reste de votre corps, placez-le toujours en bataille une heure en arrière. Allez aujourd’hui jusque près de Slavkovo.
Le vice-roi marche à votre gauche et le prince Poniatowski sur votre droite, de sorte que ces trois corps bivouaqueront en bataille, formant une seule ligne, séparés chacun par une lieue ou deux d’intervalle et occupant de la gauche à la droite trois à quatre lieues.
Le duc d’Elchingen, la Garde et le duc d’Abrantès formeront la seconde ligne.
Il faut marcher à petites journées et avec ordre. Si la plaine est comme on le suppose, et que la cavalerie puisse passer de droite et de gauche, la marche peut être dirigée de manière qu’elle ne soit pas fatigante pour l’infanterie. Il la faut venir de bonne heure. Toutes les probabilités sont que l’ennemi nous attendra à Viazma; il faut donc y arriver en ordre. Faites bien réparer tous les ponts et faites-
en faire de doubles. Il faut mettre trois jours pour arriver près de
Viazma.
Dorogobouje. 26 aoAl 1812.
Au Prince de Neuchatel et de Wagran, major général de la grande Armée
Mon Cousin, vous ordonnerez l’arrestation du sieur qui, au lieu de faire Hier des effets des hôpitaux, a, sous prétexte d’envoyer du vin à l’Empereur, fourni dix caissons à un marchand de vin. Vous remarquerez que , indépendamment de la violation du service des hôpitaux, il y a aussi violation du respect dû à l’Empereur, daus la prostitution qui a été faite du nom de sa Maison. Le sieur… savait bien que ce n’était pas vrai, ou du moins ne s’est fait représenter aucune lettre du grand maréchal qui pût certifier une pareille assertion. Vous ferez demander aussi au sieur ce que c’est que deux caissons que le commandant de la jeune Garde a escortés à Vilna ; c’est probablement encore du vin; de sorte que cet offleier a sacrifié ses devoirs à des spéculations de commerce. Tous les effets que le sieur a ainsi fait transporter abusivement sur ces dix caissons et sur les deux autres seront versés aux ambulances pour le service des hôpitaux.
Vous me rendrez compte de l’interrogatoire du sieur. .. ., pour qu’il soit pris à son égard les mesures qu’exige la gravité du délit.
Napoléon.
Dorogobouje. 26 aoAl 1812.
Au Prince de Neuchatel et de Wagran, major général de la grande Armée
Mon Cousin, donnez ordre au duc d’EIchingen de porter ce soir son quartier général et de réunir tout son corps d’armée sur la grande route, au delà de la Vosma, en arrière du village de Boldinesky.
Donnez ordre au duc d’Abrantès de porter ce soir son quartier général à Dorogobouje et de placer son corps d’armée en avant de la ville.
Napoléon.
Dorogobouje, 26 aoôi 1812.
Au Prince de Neuchatel et de Wagran, major général de la grande Armée
Mon Cousin, écrivez au duc de Bel lune de se rendre de sa personne à Vilna, afin d’y voir le duc de Bassano et d’y prendre connaissance des affaires et de l’état des choses; quc’je serai après-demain à Viazma, c’est-à-dire à cinq marches de Moscou’ qu’il y aura probablement une bataille qui nous conduira à Moscou ; qu’il est possible que dans cet état de choses les communications viennent à être interceptées; qu’il faut donc que quelqu’un prenne alors le commandement et agisse selon les circonstances; que j’ai ordonné qu’on dirigeât sur Minsk le 129e régiment, le régiment illyrien, le régiment west-phalien qui était à Kœnigsbcrg et les deux régiments saxons; que j’ai en outre placé entre Minsk et Mohilef la division Dombrowski, forte de 12 bataillons et d’une brigade de cavalerie légère; que je crois qu’il est important que son corps s’approche de Vilna et qu’il le dirige selon les circonstances, afin d’être à’méme de soutenir Smolensk, Vitebsk, Mohilef et Minsk; que la division Dombrowski doit être suffisante poor maintenir la communication de Minsk par Orcba jusqu’à Smolensk, puisqu’elle n’a à contenir que la division russe du général Hertel qui est à Mozyr, forte de 6 à 8,000 hommes, la plupart recrues, et contre laquelle d’ailleurs le général Schwarzenberg peut opérer; que les nouveaux renforts que j’envoie à Minsk pourront aussi subvenir à tous les inconvénients, et que, dans tous les cas, le mouvement du duc de Bellune sur Minsk et Orcha, et de là sur Smoleusk, me parait propre à maintenir tous les derrières; que j’ai 4,000 hommes de garnison à Vitebsk et autant à Smolensk; que le duc de Bellune, prenant ainsi position entre le Dniepr et la Dvina, sera en communication facile avec moi, pourra promplement recevoir mes ordres et se trouvera en mesure de proléger les communications de Minsk et de Vitebsk ainsi que celles de Smolensk sur Moscou; que je suppose que le général Gouvion Saint-Cyr a suffisamment des 2e et Ge corps pour tenir en échec le général IVitlgenslein et n’en avoir rien à craindre; que le duc de Tarente peut se porter sur Kiga pour investir la place ; enGn que j’ordonne aux quatre brigades de marche formant 9,000 hommes, qui faisaient partie de la division Lagrange, de se diriger sur Kovno; qu’ainsi ce ne serait que dans le cas où le général Gouvion Saint Cyr serait battu par le général VVitt-genstein et obligé de repasser la Dvina que le duc de Belltine devrait marcher à son secours d’abord ; que, ce cas excepté, il doit suivre sa direction sur Smolensk.
Napoléon.
Dorogibouje, 26 août 1812.
Au Prince de Neuchatel et de Wagran, major général de la grande Armée
Mon Cousin, je ne sais trop quels ordres donner au duc de Reggio. C’est lut seul qui doit voir l’état de sa blessure. Si elle devait le meltre pour longtemps hors d’état de servir, je ne verrais pas d’objection à ce qu’il retournât en France; enGn, ce que je désire avant tout, c’est qu’il se rétablisse promptement.
Napoléon.
Dorogobouje, 26 août 1812.
Au Prince de Neuchatel et de Wagran, major général de la grande Armée
Mon Cousin, donnez l’ordre au prince Poniatowski de se diriger aujourd’hui 26 sur Viazma, jusqu’à la hauteur en arrière de la première poste, en suivant la rive gauche de la Vosma et en envoyant des partis de cavalerie de manière à éclairer toute la droite. Le roi de Nuples sera aujourd’hui à une lieue en avant de Slavkovo. Le prince d’Eckmûhl sera à Slavkovo; il aura soin de communiquer fréquemment, aûn de pouvoir agir suivant les circonstances, si Ton avait besoin de lui.
Donnez ordre au vice-roi de se diriger sur Viazma eo passant le Dniepr entre Blagové et Chorki ‘, et de se tenir toujours à une ou deux lieues de la route, sur la gauche. H aura devant lui le général Grouchy, auquel vous donnerez le même ordre. EnGo vous lui donnerez ordre d’éclairer bien la gauche et de correspondre avec le roi de Naplcs et le prince d’Eckmûhl, qui iront aujourd’hui jusqu’à Slavkovo. Vous manderez de plus au vice-roi d’accélérer l’arrivée du général Pino et de la division Pajol ; donnez le même ordre au général Grouchy.
Napoléon.
Dorogobouje, 26 août 1812.
A M. Maret, duc de Bassano, ministre des relations extérieures, à Vilna
Monsieur le Duc de Bassano’ l’ennemi, après avoir construit des1 fortifications, élevé des batteries et des redoutes et avoir annoncé l’intention de tenir ici, a, comme à l’ordinaire, manqué de résolution. Nous sommes entrés dans cette ville, qui est assez considérable, puisqu’il y a huit ou dix clochers. Le pays est bon et Ton assure qu’il se soutient très-beau jusqu’à Moscou. La chaleur que nous éprouvons est excessive. Le temps continue à être très-beau. On dit que l’ennemi est résolu à nous attendre à Viazma.’Nous y serons dans peu . de jours, et nous serons alors à rai-chemin de Smolensk à Moscou , et, je crois, à quarante lieues de Moscou. Si l’ennemi est battu là, rien ne pourra garantir celte grande capitale, j’y serai alors le 5 septembre.
Je vois avec plaisir le duc de Bellune arriver à Kovno ; il sera là en mesure de se porter partout où il sera nécessaire pour maintenir ses communications avec moi , si elles venaient à être interrompues par la présence de quelque force que ce soit. –
Vous ne manquerez pas de réitérer l’ordre que le 8e régiment westphalien, les deux bataillons saxons qui étaient sous les ordres du
i Voir la note de la pièce 19142.
général Loison , ainsi que le régiment illyrien et le 129# régiment, se rendent à Minsk. Écrivez au gouverneur de Minsk de se servir de ces troupes pour assurer sa communication avec l’armée, et, réuni à la division Dombrouski, pouvoir se porter partout où cela serait nécessaire, au secours de Smolensk ou sur tout autre point. 11 ne faudrait pas attendre mes ordres si la communication veuait à être interrompue.
Donnez de mes nouvelles au général Saint-Cyr à Pololsk, au duc de Tarente et au prince Schwarzenberg.
je désirerais que le bataillon de la division Dombrowski, qui est à Grodno, se rendît à Minsk pour rejoindre cette division.
Mandez au duc de Bellune de faire faire, pour chaque soldat, un sac capable de contenir dix livres, et de faire prendre à chacun dix Uvres de riz.
Napoléon.
Dorogibouje, 26 août 1812.
Au vice -admiral comte decrès, ministre de la marine à paris
Monsieur le Comte Decrès, nou3 sommes maîtres de tous les pays et débouchés qui fournissent des mâts. J’espère que vous avez envoyé des maîtres et des ouvriers pour les reconnaître et faire des abatis, que j’aurai soin de me conserver dans les conditions de paix.
Napolj&ox.
Slavkovo, 27 août 1812.
Au Prince de Neuchatel et de Wagran, major général de la grande Armée
Mon Cousin, écrivez au prince d’Eckmùhl que’je viens de donner ordre à la division Compans de prendre les armes, pour profiter de la fraîcheur et se porter avec la cavalerie légère, s’il n’y a pas
x d’obstacle, à six lieues en avant. Le prince d’Eckmûhl suivra ce mouvement avec tout son corps d’armée, en faisant prendre les armes successivement, de manière qu’il n’y ait pas d’encombrement et que
,1a troupe ait le moins de fatigue possible.’ Il mettra en marche tous ses bagages et tous ses derrières, afin que le duc d’Elchingcn et la Garde puissent arriver ici aujourd’hui sans obstacle. Écrivez aussi au prince Poniatowski par le général Bordesoulle d’accélérer son mouvement, afin de se trouver à la hauteur de l’avnnt-garde.
Donnez ordre au duc d’Elchingen de se porter ici ; il fera occuper par sa cavalerie légère l’embranchement des deux routes à une lieue en avant du quartier général. 11 placera une division en avant du quartier général pour nous couvrir. 11 est bon que la lre division arrive de meilleure heure possible.